Archives

Projet de loi "séparatismes" : quelles conséquences pour les collectivités ?

Comment se traduira le nouveau "contrat d’engagement républicain" des associations ? Qu’implique la nouvelle procédure de "carence républicaine" pour les maires ? Quels services sont concernés par les nouvelles obligations de neutralité ? Que prévoient les nouvelles mesures de protection de agents publics ? Décryptage des nombreux enjeux du projet de loi "confortant le respect des principes de la République" dont le parcours parlementaire vient de débuter.

Le maire est-il l’allié ou le mal-aimé du projet de loi "séparatismes" ? Le texte de 51 articles présenté en conseil des ministres le 9 décembre, a commencé son parcours parlementaire le 17 décembre, au sein d’une commission spéciale. Présidée par François de Rugy, celle-ci a inauguré ses travaux avec les auditons du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et du ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer. Preuve de l’importance accordée au sujet sensible qui touche à la fois à la liberté de culte, à la liberté d’association et à la liberté d’enseignement : pas moins de sept rapporteurs ont été désignés, que ce soit sur les associations, le service public, la haine en ligne, la dignité de la personne humaine, la transparence des conditions d’exercice des cultes, l’éducation et les sports…  

Si la question de l’interdiction de l’instruction à domicile aura finalement peu d’impact sur les collectivités (voir notre article), on ne peut pas en dire autant du reste. Neutralité dans les services publics, procédure de "carence républicaine", protection des agents ou encore "contrats d’engagements" des associations : elles sont concernées à plus d’un titre. À cet égard, la volumineuse étude d’impact du gouvernement (plus de 400 pages) apporte plusieurs précisions importantes.

Une définition du "séparatisme"

Le premier intérêt est de donner une définition du "séparatisme", terme qui, au fil du temps, s’est substitué à celui de "repli communautaire" qui prévalait dans la communication gouvernementale il y a quelques mois encore. S’il a disparu de l’intitulé du projet de loi rebaptisé "projet de loi confortant le respect des principes de la République", il n’en est pas moins le cœur du sujet. Le séparatisme "constitue une forme de communautarisme radical, qui ne se limite pas à demander des accommodements remettant en question le principe d’égalité". Il s’agit d’une "forme d’antithèse du projet républicain" mais qui ne se manifeste "pas mécaniquement par des actes terroristes", bien qu’il puisse en constituer "un substrat idéologique". "Cette dynamique, qui a pour conséquence de soustraire certains groupes à la société française, s’exprime dans des domaines aussi variés que les coutumes matrimoniales, les pratiques médicales, la transmission héréditaire, l’engagement associatif, le respect des principes du service public, ou encore les conditions de scolarisation des enfants." Ainsi est brossé le contenu de la loi. Si le terme est bien évoqué dans l’exposé des motifs, il ne l’est pas dans le contenu du texte, ce que n’a pas manqué de relever la député Annie Genevard (LR, Doubs), lors de la première réunion de la commission spéciale, accusant le ministre de l’Intérieur de "fausse pudeur". De même, l’islamisme (désigné pour cible par Emmanuel Macron) n’est mentionné nulle part. Gérald Darmanin joue la prudence. "Ce texte est aussi ce qu’il n’est pas. Ce n’est pas un texte qui vise une religion ou des religions (…). Toutes dispositions mises en place dans ce texte s’adressent à tous les cultes."

Neutralité des salariés du service public

Le titre 1er cherche précisément à "garantir les principes républicains" contre les atteintes à la laïcité. L’article 1 vise à inscrire dans la loi un principe déjà reconnu par la jurisprudence, à savoir la neutralité des salariés de droit privé participant à l’exécution d’une mission de service public, sous forme de concession ou de délégation. Cette obligation de neutralité qui incombe au salarié englobe "la manifestation [par la parole ou l’apparence, ndlr] des opinions politiques, philosophiques ou religieuses".

La mesure fait écho à un rapport publié en juin 2019 par une mission d’information des députés Éric Diard et Éric Poulliat sur les services publics face à la radicalisation (voir notre article). Les rapporteurs (tous deux désormais rapporteurs de la commission spéciale) avaient notamment pointé le phénomène de communautarisme au sein de certains dépôts de la RATP, citant les exemples d’agents priant sur leur lieu de travail, refusant de serrer la main d’une femme ou encore l’apparition d’un syndicat communautariste dans les élections professionnelles…

Sont visés par cette mesure, en premier lieu, les organismes de droit privé ou de droit public qui se sont vu confier directement l’exécution d’un service public par la loi ou le règlement. Il en va de SNCF Réseau par exemple, des caisses locales de sécurité sociale (CAF, CPAM…), mais aussi des missions locales ou encore des offices publics de l’habitat, qui sont des établissements publics industriels et commerciaux…

En revanche, précise l’étude d’impact, la mesure ne s’applique pas aux organismes privés qui reçoivent un agrément, tels que les écoles privées sous contrat, les sociétés HLM, les établissements de santé privés d’intérêt collectif (Espic).

La seconde catégorie concerne les organismes sous contrat : marchés publics, RATP, lignes d’équilibre du territoire opérées par la SNCF, aéroports concédés. À noter que la mesure vise aussi l’ensemble de leurs sous-traitants.

Autre précision utile : les services ferroviaires ouverts à la concurrence "comme ceux de la SNCF 'grandes lignes' ou TGV, ne sont pas concernés par ces dispositions dans la mesure où, en l’absence d’autorité organisatrice de transport, il ne s’agit pas d’un service public". De la même manière "les lignes de transports par autocars, non conventionnés, ne sont pas considérées comme un service public ni ne font l’objet d’un contrat de la commande publique et ne sont donc pas inclues dans le champ de ce dispositif". En revanche "les transports en commun urbains, comme les transports organisés par Île-de-France Mobilités, sont bien concernés, puisqu’il s’agit d’un service public de transport", précise l’étude.

Concrètement la mise en œuvre de ces dispositions nécessitera "la mise en conformité des contrats en cours d’exécution à l’exception de ceux arrivant à échéance dans les trois ans suivant la promulgation de la loi".

La mesure s’appliquera aux salariés qui sont en contact direct avec le public. Ne sont pas visés les agents d’entretien, les personnes chargées de fonctions dites "support" ou celles qui sont rattachés aux services administratifs, précise l’étude.

La collectivité devra s’assurer que l’entreprise a bien intégré une clause de neutralité dans son règlement. Pour ce qui est du salarié, s’il refuse de s’y conformer, avant toute procédure de licenciement, "l’employeur doit rechercher si un poste sans contact visuel avec la clientèle peut lui être proposé".

Carence républicaine

L’étude se montre moins diserte sur la procédure de "carence républicaine" prévue à l’article 2, dont l’expression même – qui n’est pas sans rappeler les communes "carencées" en logement social – est un irritant chez les maires. Le terme a d’ailleurs disparu de l’exposé des motifs du projet de loi et de l’étude d’impact. Dans son avis, le Cnen avait exprimé sa "très vive contrariété" du fait de l‘usage de cette expression qu’il assimilait à "une manifestation de défiance", une "stigmatisation" des maires (voir notre article). Sur la procédure retenue, le gouvernement a tenu compte des critiques (celle du Cnen mais aussi l’avis du Conseil d’État) puisqu’il est passé d’un mécanisme de "référé suspension" à celui de "référé liberté", laissant un peu moins de pouvoir au préfet. Lorsqu’il constatera un manquement grave au principe de neutralité du service public dans un acte municipal (horaires de piscine aménagé, par exemple), le représentant de l’État s’en remettra au juge qui aura 48 heures pour prononcer sa suspension, avant de statuer sur sa légalité dans un délai de trente jours.

Si derrière cette procédure pèse ainsi un soupçon de compromission, le projet de loi n’apporte, à l’inverse, pas de réponse au sentiment d’isolement des maires. N’éludant par les "ambiguïtés" ni les "politiques d’accommodement" de certains élus, le rapport de la commission d’enquête sénatoriale publié cet été pointait le fait que les élus sont "souvent démunis face à la pression de mouvances religieuses radicales". Il préconisait une série de mesures d’accompagnement et de formation. Dans la même veine, le maire LR de Chalon-sur-Saône et co-président du groupe laïcité de l'Association des maires de France (AMF), Gilles Platret, a reconnu sur France info, la semaine dernière, qu’il pouvait y avoir des cas de "clientélisme" ou des "réflexe électoraliste", estimant cependant qu’il fallait "aider les élus à être responsables et leur donner les moyens", notamment avec un contact plus direct avec les services de l’État et le renseignement territorial.

Le hasard du calendrier fait que le Conseil d’État a considéré vendredi 11 décembre que les menus de substitution au porc ne constituaient pas une entrave à la laïcité. Il statuait sur une délibération la commune de Chalon-sur-Saône. Le conseil municipal avait voté en 2015 la suppression des menus de substitution au porc servis depuis 1984. Cette mesure visait à "rétablir un fonctionnement neutre et laïque" des cantines municipales. Dans un communiqué de presse accompagnant sa décision, le Conseil d’État rappelle que les collectivités n'ont pas l'obligation de fournir des menus de substitution au porc et que le principe de laïcité interdit "à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s'affranchir des règles communes". Mais il ajoute que "ni les principes de laïcité et de neutralité du service public, ni le principe d'égalité des usagers devant le service public, ne font, par eux-mêmes, obstacle à ce que ces mêmes collectivités territoriales puissent proposer de tels repas". "Je regrette dans cette décision un certain manque de courage qui ne peut qu'encourager par ailleurs le séparatisme, dont il est tant question aujourd'hui", a réagi Gilles Platret, dans un communiqué.

Protection des agents

Le projet de loi cherche toutefois à "mieux protéger les agents chargés du service public". L’article 4 instaure une sorte de "délit de séparatisme" en punissant de 5 ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende le fait "d’user de menaces, de violences ou de commettre tout autre acte d’intimidation à l’égard de toute personne participant à l’exécution d’une mission de service public, afin d’obtenir pour soi‑même ou pour autrui une exemption totale ou partielle ou une application différenciée des règles qui régissent le fonctionnement dudit service". L’auteur étranger encourt également une interdiction de territoire de dix ans.

Les actes d’intimidations et autres menaces envers les personnes exerçant une fonction publique étaient déjà punis (articles 433-3 du code pénal), il s’agit ici de prendre en compte les motifs particuliers susmentionnés. L’assassinat de Samuel Paty et les pressions exercées sur la direction de l’établissement de Conflans-Sainte-Honorine sont bien sûr dans les esprits. "Dans le contexte actuel de résurgence du fait religieux sur le territoire national, les agents publics, notamment ceux au sein des établissements scolaires, sont particulièrement exposés à des actes d’intimidation et de menace dans l’exercice de leurs fonctions, commis dans le but de bénéficier d’une exemption ou d’une application différenciée des règles qui régissent le fonctionnement du service, au motif tiré de leur croyances ou convictions", souligne l’étude. Elle précise que 4.633 condamnations ont été prononcées en 2019 sur la base de l’article 433-3, dont 4.376 pour des menaces à l’encontre d’une personne dépositaire de l’autorité publique, 47 pour des menaces à l’encontre d’un élu, 10 pour des menaces à l’encontre de gardiens d’immeubles, 51 pour des menaces contre des sapeurs-pompiers...

Une circulaire conjointe du ministre de l’Intérieur, du garde des Sceaux, de la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques et de la ministre déléguée chargée de la citoyenneté, signée le 2 novembre 2020, vise d’ailleurs déjà à renforcer la protection des agents publics face aux attaques dont ils font l’objet dans le cadre de leurs fonctions.

Par ailleurs, l’article 5 améliore le dispositif créé en 2017 pour permettre aux employeurs publics de signaler des violences sexuelles et sexistes commises au sein de leur administration. Ce dispositif avait déjà été étendu aux actes violents en 2019. Le gouvernement souhaite ici élargir l’alerte aux menaces commises à l’encontre d’agents par des usagers. Il s’agit de s’assurer "de la pleine effectivité de la protection fonctionnelle des agents victimes d’attaques dans l’exercice de leurs fonctions".

Le texte permettra en outre de réprimer la diffusion (notamment sur internet) d’informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d’une personne, permettant de l’identifier ou de la localiser, l’exposant ainsi à un risque de violence (article 18). Les peines sont aggravées lorsque la personne visée est dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public.

Mieux contrôler les associations

Autre volet important du texte : le contrôle des associations. L’article 6 précise que toute association sollicitant une subvention auprès de l'État ou d'une collectivité territoriale devra signer un "contrat d’engagement républicain". Il s’agit par ce biais de rendre opposable les "chartes des engagements réciproques" actuelles adoptées par de nombreuses municipalités. La violation de ce contrat entraînera le remboursement de la subvention. En cas de financements croisés, le non-respect des engagements entraînera "le rappel obligatoire pour l’ensemble des financeurs" (collectivités, office HLM…), a précisé Gérald Darmanin, jeudi 17 décembre.

Un décret en Conseil d’État devra déterminer le contenu de ce contrat, ainsi que les conditions de ce remboursement. Les associations d’élus et le monde associatif vont être consultés pour en définir le contenu.

Concrètement, ce contrat d’engagement républicain passera par une ligne supplémentaire dans le formulaire Cerfa de demande de subvention. Ce qui, selon l’étude d’impact, ne devrait "pas alourdir de manière significative la procédure d’attribution d’une subvention".

L’article 7 vient renforcer les conditions d’agrément des associations en ajoutant aux trois critères actuels - objet d’intérêt général, fonctionnement démocratique et transparence financière - un quatrième : le respect des principes du contrat d’engagement républicain.

Enfin, l’article 8 révise les motifs de dissolution des associations qui, pour certains, sont anciens et désuets (provocation à des manifestations armées dans la rue, atteinte à l’intégrité du territoire national ou à la forme républicaine du gouvernement…) pour prendre en compte de nouvelles formes d’agissements comme la provocation "à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personne à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre". Il sera aussi possible de dissoudre une association lorsque ses dirigeants se seront abstenus de faire cesser les agissements de certains de leurs membres.

Pour le HCVA (Haut-Conseil à la vie associative), l’actuelle charte des engagements réciproques que les associations s’engagent à respecter se suffit à elle-même. "Sauf à voir confirmer dans la convention de subvention, l'engagement de l'association à ne pas enfreindre la loi pénale - ce qui est la portée première de celle-ci", le HCVA "ne mesure pas l'intérêt réel d'instaurer ce ‘contrat d'engagement républicain’ dont l'ensemble des principes existent par ailleurs".

On touche là encore au cœur des relations entre l’État et les collectivités. "L'État, depuis maintenant plusieurs années, a fait un peu de nettoyage dans ces subventions", explique-t-on dans l’entourage du président de la République, mais des collectivités "continuent à financer des associations qui ne sont pas du tout républicaines et qui ont un discours hostile à la République". Seulement avant d’envisager le remboursement d’une subvention, encore faut-il pouvoir contrôler l’activité de l’association. Or comme l’a fait remarquer François Pupponi (Val-d’Oise, Modem) au ministre, jeudi 17 décembre, certaines associations avancent "masquées". "Seules des enquêtes des services territoriaux, des services fiscaux pourront démonter qu’elles ont un lien avec des activités liées au séparatisme", a-t-il argué. Le gouvernement assure de son côté que l’échange d’information entre préfets et maires passe bien, notamment au sein des Clir (cellules départementales de lutte contre l’islamisme et le repli communautaire). La commission d’enquête sénatoriale était plus circonspecte.

Fédérations et associations sportives

Par ailleurs, le projet de loi remplace le régime de tutelle de l’État sur l’ensemble des fédérations sportives par un régime de contrôle. Les fédérations sportives devront signer un contrat d’engagement républicain pour recevoir un agrément valable huit ans (renouvelable). L’échéance de l’agrément actuel arrivant au 31 décembre 2025, la demande d’agrément devra parvenir le 1er mai 2025. Les associations sportives pour lesquelles l’agrément préfectoral ouvre droit à subvention devront elles aussi signer un contrat d’engagement républicain, avec obligation de veiller à l’intégrité physique et morale des personnes, en particulier des mineurs.

Dans les deux cas, si elles se refusent à signer le contrat, associations et fédérations pourront continuer d’exister mais ne pourront plus percevoir de subventions.

Lutte contre les mariages forcés

Le texte comporte plusieurs dispositions relatives au respect de la dignité humaine : lutte contre la polygamie, les certificats de virginité, la discrimination des femmes dans les procédures d’héritage et les mariages forcés. Le renforcement du contrôle de ces deniers entraînera "une augmentation sensible de l’activité des officiers de l’état civil (…) pour la réalisation des entretiens séparés et les saisines du procureur de la République, dans les communes pour lesquelles ces nouvelles dispositions ne correspondent pas à leur pratique actuelle", estime l’étude d’impact. Devant la commission spéciale, Gérald Darmanin a évoqué le nombre de 200.000 mariages forcés en France.

Mieux contrôler les associations cultuelles

Le titre II du projet de loi vise à renforcer la transparence des conditions de l’exercice du culte. "Certains lieux de culte ont pu constituer des relais pour des discours promouvant des valeurs opposées à celles de la République et à la paix civile. De telles situations sont souvent le résultat de la prise de contrôle d’une association gérant un lieu de culte par un groupe de personnes aux intentions contraires à ces principes", indique l’étude d’impact. L’objectif est d’inciter les associations cultuelles sous le régime de la loi de 1901 – soit, pour des raisons historiques, la majeure partie des associations musulmanes - à basculer sur celui de la loi de 1905 de séparation des églises et de l’État, plus transparent sur le plan financier et comptable. En contrepartie, elles pourront avoir accès à des déductions fiscales ou encore tirer des revenus d'immeubles acquis à titre gratuit. Les associations préférant rester sous le statut de 1901 auront les mêmes obligations, sans les avantages.

Le projet de loi cherche à contrôler les financements étrangers (mais ne les interdit pas), afin d’éviter d’alimenter le fondamentalisme religieux. Il s’agit de s’assurer que "la religion n’est pas le soft power d’un État étranger", est venu préciser Gérald Darmanin. Les dons étrangers dépassant 10.000 euros seront ainsi soumis à un régime déclaratif de ressources. De plus, "la certification des comptes annuels par un commissaire aux comptes est prévue dès lors que l'association bénéficie d'avantages ou de ressources provenant de l'étranger".

Le projet de loi contient enfin une mesure dite "anti-putsch" permettant de réprimer le détournement politique d’un lieu de culte ou des propos qui pourraient y être tenus, susceptibles de remettre en cause la "cohésion sociale". En cas de condamnation pour provocation à des actes de terrorisme ou provocation à la discrimination, la haine ou la violence, le projet de loi permettra de prononcer une "interdiction de paraître dans les lieux de culte".

En revanche, il ne contient pour l'heure aucune mesure permettant de fermer un lieu de culte spécifiquement pour "séparatisme". Aujourd'hui, les pouvoirs publics ont deux cordes à leur arc : le contrôle des règles relatives aux établissements recevant du public, jugé "extrêmement hypocrite" par Gérald Darmanin, et le lien direct avec le terrorisme qui a prévalu dans la fermeture récente de la mosquée de Pantin. Lors du débat parlementaire, le gouvernement pourrait donc chercher une troisième voie.

Pas de mesures sur l'égalité des chances ou l'immigration

On rappellera enfin que le volet "égalité des chances" a été retiré du texte, au grand soulagement de l’AMF, de France urbaine et de l’ADCF (Assemblée des communautés de France), qui "avaient exprimé leurs plus grandes réserves". Ces dispositions auraient permis au gouvernement de procéder par voie d’ordonnances pour renforcer la mixité sociale dans l'attribution des logements et poursuivre au-delà de 2025 les objectifs de la loi SRU en matière de construction de logements sociaux. Si la méthode (ordonnances dans le projet de loi "séparatismes") a été écarté, l’objectif du gouvernement reste cependant le même. Et les récentes déclarations de la ministre du Logement ont suscité la colère des maires. "Accusés de ‘ne pas jouer le jeu’ en faveur du logement social", ces derniers se disent victimes de "stigmatisation" (voir notre article). Devant la commission spéciale, Gérald Darmanin a rappelé que le projet de loi n’était qu’un des "volets" du discours d’Emmanuel Macron aux Mureaux. Il en a aussi profité pour réfuter tout lien entre immigration et islamisme ou séparatisme. Le texte ne contient aucune mesure en lien avec l'immigration. "Ce choix je le revendique personnellement. Sous l'autorité du président de la République", a-t-il dit. Précisons enfin que le projet de loi ne revient pas sur les statuts spécifiques à l’Alsace-Moselle et à certains territoires ultramarins.