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Restauration de Notre-Dame : le projet de loi adopté en nouvelle lecture à l’Assemblée

L’exécutif a finalement fait volte-face en introduisant dans le projet de loi pour la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris, examiné ce 2 juillet en nouvelle lecture par l’Assemblée, une partie de ce qui devait initialement figurer dans les ordonnances prévues respectivement pour créer un établissement public ad hoc et fixer le cadre des dérogations aux règles du droit commun. 

 

L’Assemblée a adopté, dans la nuit ce 2 juillet, en nouvelle lecture, le projet de loi pour la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris, par 32 voix pour, 7 contre et 8 abstentions. Le texte, qui répond au défi de reconstruction de l’édifice incendié en cinq ans et fixe à cet effet un cadre à la souscription nationale dédiée, doit à présent repasser au Sénat, avant de revenir devant l’Assemblée qui aura le dernier mot. Suite à l’échec de la commission mixte paritaire (CMP), les députés ont largement rétabli leur version du texte, lors de l’examen en commission le 26 juin, en réintroduisant en particulier, le vaste régime dérogatoire au droit commun de l’article 9, et ce malgré les réserves exprimées par les partis politiques de tous bords. Mais, contre toute attente, le gouvernement a renoncé en partie à y procéder par la voie d’ordonnances en proposant, en séance, de préciser directement dans la loi certaines des dérogations prévues, notamment en matière d’archéologie préventive, de délivrance d’autorisations de travaux et de domanialité publique. 

Cadre des dérogations

L’article 9 fige désormais dans les grandes lignes les assouplissements envisagés aux législations en vigueur. Les dérogations en matière de patrimoine permettront notamment de confier à l’Institut national de recherches archéologiques préventives la réalisation des fouilles archéologiques rendues nécessaires dans le cadre des travaux. Dans cette course contre la montre, le texte table également sur la réduction des délais d’instruction, en supprimant la consultation de la commission régionale du patrimoine et de l’architecture en cas de recours contre la position de l’architecte des bâtiments de France sur les installations et constructions temporaires du chantier. 
Il permet en outre à l’autorité compétente d’autoriser, "dans un objectif de valorisation culturelle, artistique et pédagogique du chantier", l’occupation ou l’utilisation du domaine public, à titre gratuit, en vue de l’exercice d’une activité économique, et ce sans mise en œuvre d’une procédure de sélection préalable mais après publicité préalable.

Le principe d’interdiction de la publicité, notamment sur les bâches de chantier, est clairement posé. Seuls les dispositifs visant exclusivement à informer le public sur les travaux en cours seront autorisés, y compris sur les palissades. 
L’habilitation à légiférer par ordonnances est en revanche maintenue en matière de voirie, d’urbanisme et d’environnement - en particulier en ce qui concerne la mise en compatibilité des documents de planification, la délivrance des autorisations nécessaires, ainsi que les procédures et délais applicables - "car la définition de ces dérogations demande une connaissance précise du projet de restauration", a justifié le ministre de la Culture Franck Riester. 

Contours du futur établissement public ad hoc

Tout autant contesté, le recours au régime des ordonnances pour la création d’un établissement public dédié aux travaux de restauration de la cathédrale est finalement abandonné "compte tenu du travail de préparation déjà engagé". La nouvelle rédaction de l’article 8 trace ainsi les contours de cet établissement à caractère administratif ad hoc, placé sous la tutelle du ministre de la Culture, et dont la mission première sera d’assurer la maîtrise d’ouvrage. L’établissement se voit également confier la charge de réaliser les travaux d’aménagement des abords de la cathédrale, à savoir principalement le parvis, le square Jean XXIII, et la promenade du flanc sud de l’Île de la Cité. La composition de son conseil d’administration permettra d’associer à sa gouvernance la ville de Paris et le diocèse. Un conseil scientifique, "garant de la qualité scientifique et historique de la restauration", y sera adossé. Parallèlement, l’avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture sera là aussi sollicité sur l’avancée des travaux et les choix de restauration. Une réunion est d’ailleurs prévue ce 4 juillet pour évoquer les opérations liées à Notre-Dame. Les statuts de l’établissement et la date de sa création effective sont quant à eux renvoyés au décret.  

Seulement 10% des dons concrétisés

Pour accompagner l’élan de générosité né du désastre, le texte organise une souscription nationale et fournit, à l’article 4, une base légale aux dons effectués par les collectivités territoriales en dehors de leur champ de compétence géographique. Les dépenses des collectivités et de leurs groupements en faveur de Notre-Dame seront ainsi considérées comme des dépenses d’équipement et ne seront donc pas prises en compte pour apprécier le plafond annuel d’évolution des dépenses de fonctionnement fixé à 1,2%. Les éléments connus à ce stade sur la participation des collectivités locales à la souscription "tempèrent d’ailleurs certaines des critiques", estime Marie-Ange Magne, rapporteure pour avis de la commission des finances : "Sur les 85,5 millions d’euros d’ouvertures de crédits annoncées, 70% proviennent de la ville de Paris et de la région Île-de-France". 
Reste la question du régime fiscal des donations, à propos de laquelle l’opposition a marqué son désaccord de fond. A l’article 5, l’Assemblée a rétabli la déduction fiscale exceptionnelle de 75% pour les dons de particuliers - réalisés entre le 16 avril et le 31 décembre 2019 - dans la limite de 1.000 euros, qui avait été supprimée en commission. Ce dispositif a été contesté par Jean-Luc Mélenchon (LFI) qui a défendu, sans succès, une motion de rejet arguant que ces dégrèvements d'impôts seront payés au final par le reste des contribuables. Là encore, la rapporteure de la commission des finances a tenu à relativiser les critiques sur le plafond de 1.000 euros en faisant valoir que "les éléments communiqués par les fondations font état d’un don moyen de l’ordre de 100 euros". Le ministre avait rappelé dès l’ouverture des débats, à ceux qui "prétendent que nous disposerions déjà de trop de fonds collectés, plus qu’il n’en faut pour restaurer la cathédrale", que "pour le moment, un peu plus de 10% des promesses de dons ont été concrétisées".  

 

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