Sans travaux de rénovation énergétique, un logement sur deux serait interdit de location d'ici 2034 en Ile-de-France

Selon une étude publiée par l'Institut Paris Région ce 13 octobre, 2,3 millions de résidences principales en Île-de-France, soit près de la moitié du parc de logements, sont énergivores et risquent d'être interdits de location d'ici 2034 si des travaux de rénovation ne sont pas engagés.

C'est une véritable bombe à retardement qu'a dévoilée une étude réalisée par l'Institut Paris Région et l'Insee et publiée ce 13 octobre. On y apprend que sur un marché de l'immobilier particulièrement tendu en Île-de-France, 2,3 millions de résidences principales, soit 45% des logements dans cette région, sont menacées par la future interdiction de louer des biens énergivores prévue par la loi Climat et Résilience. Cela représente 20% des logements énergivores de France. Faute de travaux de rénovation, les interdictions de louer ces logements s'imposeront progressivement, touchant d'abord l'ensemble des logements de classe énergétique G en 2025, puis les F en 2028 et les E en 2034.

55% du parc locatif privé concerné

Le parc locatif privé est le plus concerné par les dispositions de la loi Climat et Résilience, souligne l'étude. Au regard des performances énergétiques estimées en 2018, sans rénovation efficace, 745.000 logements (55% du parc) pourraient être interdits de mise en location, dont 22% dès 2025 (étiquette G), 30% en 2028 (étiquette F) et 48 % à l’horizon 2034 (étiquette E). "Cet important volume de logements représente 15% de la totalité des logements occupés en Île-de-France, équivalant à près de onze années de construction, en se fondant sur l’objectif fixé par la loi relative au Grand Paris de bâtir 70.000 logements chaque année", souligne l'Institut Paris Région dans un communiqué. 48% des logements occupés par leur propriétaire sont classés énergivores tandis que les logements sociaux, gérés de façon plus centralisée, sont les meilleurs élèves avec seulement 29% d'étiquettes E, F ou G.

L'étude a été réalisée avec les anciennes étiquettes énergétiques, établies sur la base des caractéristiques propres des bâtiments (année de construction, mode de chauffage, taille du logement…) pour ceux construits avant 1948 et sur la base de la facturation énergétique pour ceux plus récents. Le mode d'établissement des diagnostics de performance énergétique (DPE) a été réformé en 2021 pour davantage tenir compte des caractéristiques objectives des bâtiments, et intégrer les émissions de gaz à effet de serre. Mais "les ordres de grandeur sont les bons, et s'ils doivent être ajustés, c'est plutôt à la hausse", assure Martin Omhovère, directeur du département Habitat à l'Institut Paris Région.

Difficultés particulières des copropriétés

Les logements privés font face à des difficultés particulières : ils sont souvent dans des copropriétés, où engager des travaux de rénovation peut être très fastidieux, et sont plus souvent occupés par des ménages modestes, qui n'ont pas les moyens de financer une rénovation ou d'absorber la hausse de loyer qu'elle entraînerait. "Que ce soit dans le parc en propriété ou dans le parc locatif privé, il y a systématiquement un écart entre le niveau de vie des ménages qui occupent le parc énergivore et les autres", détaille Franziska Barnhusen, cheffe de projet à l'Institut Paris Région. "Ça montre que les personnes qui occupent ces passoires thermiques sont plus vulnérables", dit-elle.

Les travaux de rénovation menés jusque-là sont peu efficaces et peu ciblés sur les logements qui en auraient le plus besoin, notent en outre également les auteurs. En cause, les dysfonctionnements des copropriétés, mais aussi le fait que les propriétaires de maisons individuelles mettent rarement les gains énergétiques au coeur de leurs projets de travaux.

Nombreux freins à lever

Pour amplifier la rénovation, les auteurs de l'étude estiment qu'il faudrait lever les freins du financement des travaux, et renforcer l’accompagnement technique et la formation de l’ensemble des acteurs impliqués, notamment les syndics de copropriété. "Les collectivités ont un rôle à jouer en tant que financeurs des dispositifs publics de conseil au niveau local ou au travers des aides complémentaires à l’action nationale qu’elles peuvent apporter, en visant notamment les foyers les plus modestes", rappellent-ils et l'étude leur fournit une première estimation de l’ampleur des enjeux locaux.
"Ensuite, un défi réel réside dans l’amélioration de la performance des travaux réalisés, poursuivent-ils. Il s’agit d’associer les professionnels du secteur du bâtiment au défi que représente la rénovation du parc pour développer les savoir-faire sur la rénovation énergétique globale, sur l’articulation entre les différents postes (isolation, chauffage, ventilation…) et sur les matériaux biosourcés."
Enfin se pose la question de l’accompagnement social des populations. "Les habitants des logements à faible performance énergétique ne sont pas les plus gros consommateurs d’énergie, relèvent-ils. Cela demande d’anticiper dès à présent les effets potentiels des restrictions, y compris sur les ménages les plus modestes, dont certains pourraient de facto se trouver exclus du parc locatif privé si la rénovation entraîne des hausses de loyer".