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Sécurité : les maires de grandes villes remettent 40 propositions aux candidats sur fond de "crispation" de la société

Réunis au Creusot jeudi 3 mars pour leurs Assises de la sécurité, les maires de grandes villes ont remis aux candidats à l'élection présidentielle ou à leur représentant une contribution forte de 40 propositions. Ils aspirent notamment à un recentrage de l'action de la police municipale sur l'action de proximité.

Le champ d’intervention des élus en matière de sécurité "est de plus en plus complexe". Il doit s’adapter "pour répondre à des menaces de toute nature, comme la perte de lien de proximité, les fractures territoriales, les phénomènes de violences radicales". C’est le constat dressé par l’association France urbaine, jeudi 3 mars, à l’issue de ses assises de la sécurité organisées au Creusot, la ville David Marti, également président de la communauté urbaine Creusot Montceau.
Lors de cet événement, les maires de grandes villes ont pu entendre une candidate à l’élection présidentielle (Anne Hidalgo) et les porte-parole des autres auxquels ils ont remis un document intitulé "Pour de véritables politiques locales de sécurité et de prévention", fort de 40 propositions. Nourries par une série de concertations territoriales conduites depuis le mois de décembre 2021 à Besançon, Cherbourg-en-Cotentin, Toulouse, Metz et Marseille, ces propositions s’articulent autour du renforcement de la chaîne pénale et du fameux "continuum de sécurité", fil rouge de ce quinquennat (avec notamment la loi Sécurité globale), malgré de maigres progrès ; le Beauvau de la sécurité s’est avéré décevant pour les élus. Les maires de grandes villes demandent une clarification des compétence des forces de sécurité et des procédures, d’officialiser les relations entre la justice et la police - ce que l'action du garde des Sceaux en matière de justice de proximité n’a pas permis -, de redéfinir les procédures relatives au secret partagé et à l’instruction, pour favoriser la place du maire comme pilier de la chaîne pénale, d’augmenter les moyens dédiés à la prévention (en portant les crédits du FIPD à 140 millions d’euros par an, contre 80 millions d'euros en 2022, avec des engagements pluriannuels), de développer une "approche globale" des politiques de sécurité en faveur de la cohésion sociale.

Recentrer le rôle des polices municipales

"Au regard des difficultés économiques et sociales que la crise a exacerbées, d’une sollicitation accrue des forces de l’ordre (gilets jaunes, terrorisme, crise sanitaire, trafic de stupéfiants) et d’une crispation partielle de la population, il existe aujourd’hui des risques (fractures territoriales, pertes de lien de proximité, développement des marginalisations, des addictions, des violences intrafamiliales, des souffrances psychiques, impact des réseaux sociaux, faible attractivité des métiers territoriaux, illisibilité de l’action publique…) qui, cumulés, concourent à la fragilisation de la cohésion sociale", alertent les élus.

S’agissant des polices municipales, les maires proposent de "recentrer" leur rôle dans une action de proximité avec une généralisation de la forfaitisation pour toutes les contraventions et délits du quotidien (occupation de hall d’immeuble, vente à la sauvette, conduite sans permis, vol simple…). Les policiers municipaux bénéficieraient par ailleurs des mêmes spécificités que les autres forces de sécurité (travail de nuit, prime, etc.), avec les mêmes obligations (absence de droit de grève). Les élus veulent plus généralement s’attaquer au manque d’attractivité du métier : réviser les modalités des concours et de la formation initiale, supprimer les seuils de recrutement pour certains postes de direction, revoir les conditions d’évolution de carrière et de départ à la retraite (avec un départ possible à partir de 57 ans), intégration des primes dans le traitement indiciaire… Sur le plan opérationnel, ils demandent l’extension complète et gratuite de l’accès aux fichiers (FOVeS, SNPC, SIV, FPR). France urbaine reprend la possibilité pour les villes qui le souhaitent d’expérimenter de nouvelles compétences – une possibilité de la loi Sécurité globale retoquée par le Conseil constitutionnel - , dans un "cadre borné", en permettant aux policiers municipaux de constater de nouvelles infractions sur la voie publique.

Une santé mentale abîmée par la crise

L’association appelle à "améliorer le cadre législatif de la relation entre le Parquet et les collectivités locales", avec mise à disposition "obligatoire" dans chaque parquet d’un chargé de mission interlocuteur des collectivités (en dehors des réunions du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance). Elle propose aussi de renforcer le recours aux TIG en élargissant les partenaires (Sdis, bailleurs…) ou en améliorant la rémunération des tuteurs…

S’il est souvent dit que la sécurité doit marcher sur ses deux jambes, la prévention n’est pas oubliée. Les maires pourraient par exemple se substituer aux propriétaires défaillants dans le cadre d’un squat… Plus nouvelle est la préoccupation des maires pour la question de la "santé mentale" des Français qui se serait détériorée du fait de "la crise sanitaire et des mesures d’isolement successives". Il importe, selon eux, de "renforcer le dialogue avec la psychiatrie de secteur pour instruire avec réactivité, bienveillance, et souci d’inclusion les cas les plus complexes" que la fermeture des lits d’hospitalisation en psychiatrie conduit dans les commissariats ou à la rue. L'association s'inquiète aussi des phénomènes de radicalisation (mouvements identitaires, mouvements sociaux...) et suggère de les redéfinir dans un sens plus large, en intégrant les questions de "souffrances psychologiques et psychiques, et de déracinement culturel".

Curieusement, le document ne fait pas référence aux "contrats de sécurité intégrée", dont le premier avait été signé à Toulouse en octobre 2020.

 

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