Commande publique - Subdivision d'un marché public en macrolots : attention, le risque du marché global n'est pas loin...
Dans un arrêt du 1er octobre 2013, la cour administrative d'appel de Bordeaux a eu l'occasion de se prononcer sur la question des macrolots (lots conséquents) d'un marché public.
Dans les faits, le département de la Gironde avait lancé une procédure d'appel d'offres ouvert pour l'attribution d'un marché public en vue de travaux de restructuration d'un collège. Le marché public était subdivisé en deux lots, le premier portait sur les "bâtiments - tout corps d'état" tandis que le second concernait les "VRD - espaces verts". Les lots ont été respectivement remportés par deux sociétés différentes.
Le Syndicat national des entreprises de second œuvre (SNSO) conteste l'attribution de ces marchés devant le tribunal administratif de Bordeaux et demande l'annulation des décisions du président du conseil général liées à la signature des lots litigieux. Le requérant estime notamment que le département a méconnu l'obligation d'allotissement résultant de l'article 10 du Code des marchés publics dans la mesure où le lot n°1 constituait en réalité un marché global. Cette demande étant rejetée par le tribunal administratif, le SNSO saisit alors la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Le département avait-il respecté l'obligation d'allotissement posée par l'article 10 du Code des marchés publics ?
A cette question, la cour d'appel répond par la négative. Elle considère, dans un premier temps, que le lot n°1 correspondait en réalité à "l'ensemble des prestations que tous les corps d'état doivent accomplir pour réaliser les travaux de construction prévus dans le cadre de la restructuration du collège", constituant ainsi un marché global. Dans un second temps, elle estime que le pouvoir adjudicateur ne pouvait pas se prévaloir de l'une des exceptions à l'obligation d'allotir, à savoir celle liée aux difficultés techniques ou au coût financier de l'exécution des prestations, pour passer un marché global. "S'il est vrai que l'exécution des prestations était soumise à de fortes contraintes de délais nécessitant une importante coordination des prestataires et le respect par ceux-ci des délais impartis, le département ne justifie pas que ces contraintes, au demeurant courantes dans des opérations de restructuration, étaient telles que la dévolution en lots séparés (…) aurait, en l'espèce, rendu techniquement difficile l'exécution du marché", souligne la juridiction administrative. La requête du SNSO est donc accueillie favorablement et la décision du président du conseil général de la Gironde de signer le marché portant sur le lot n°1 est annulée.
L'acheteur public doit donc être vigilant lorsqu'il décide de subdiviser un marché public en lots importants. La procédure de passation d'un tel marché peut être censurée par le juge administratif si le macrolot constitue en réalité un marché global et qu'aucune des exceptions prévues à l'article 10 du Code des marchés publics n'est remplie.
Référence : cour administrative d'appel de Bordeaux, 1er octobre 2013, n° 12BX00319
Passation d'un marché global possible dans de strictes conditions
Pour rappel, au regard de l'article 10 du Code des marchés publics, l'obligation pour le pouvoir adjudicateur d'allotir un marché public est la règle. Par exception, la passation d'un marché global est possible mais elle est soumise à de strictes conditions. Les dispositions de cet article prévoient ainsi que "le pouvoir adjudicateur peut toutefois passer un marché global, avec ou sans identification de prestations distinctes, s'il estime que la dévolution en lots séparés est de nature, dans le cas particulier, à restreindre la concurrence, ou qu'elle risque de rendre techniquement difficile ou financièrement coûteuse l'exécution des prestations ou encore qu'il n'est pas en mesure d'assurer par lui-même les missions d'organisation, de pilotage et de coordination (…)".