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Simplification du droit - Un nouveau train de petites simplifications et de transferts de responsabilités

Le Sénat a adopté en première lecture un projet de loi de modernisation et de simplification du droit et des procédures. Ce nouveau texte inclut une série de changements modestes mais concrets pour les collectivités, entre autres dans le champ du social - avec, notamment, la protection juridique des majeurs - et du funéraire.

Le Sénat a adopté en première lecture, le 23 janvier, un projet de loi de modernisation et de simplification du droit et des procédures, centré sur les domaines de la justice et des affaires intérieures. Depuis les débuts du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, il s'agit du quatrième texte de simplification par voie d'ordonnance dont le Parlement est saisi. Contrairement aux volumineuses propositions de loi de simplification adoptées sous la précédente législature, ce texte est de taille limitée. Certaines de ses mesures sont directement applicables, tandis que d'autres habilitent le gouvernement à réformer par voie d'ordonnance, en vertu de l'article 38 de la Constitution. Parmi elles, un certain nombre (essentiellement à l'article 9) concerne de près les collectivités territoriales. Elles portent sur "des mesures de détail, bien qu'utiles", estime le rapporteur, Thani Mohamed Soilihi.

DISPOSITIONS RELATIVES À L'ADMINISTRATION TERRITORIALE

Ces mesures visent à parachever le mouvement de décentralisation initié il y a près de trente-deux ans et, ainsi, à alléger le travail des services préfectoraux.
- Les établissements publics locaux d'enseignement (EPLE), c'est-à-dire les collèges et les lycées pour l'essentiel, ne seront plus obligés de transmettre au préfet leurs actes budgétaires. Le représentant de l'Etat continuera toutefois à être l'arbitre des conflits relatifs aux budgets de ces établissements.
- Les centres communaux d'action sociale (CCAS) ne devront plus solliciter une autorisation préfectorale pour souscrire un crédit bancaire. Se démarquant du gouvernement, les sénateurs n'ont pas souhaité supprimer le contrôle qu'exercent les conseils municipaux sur les demandes de crédits de ces structures. Leurs budgets représentent 2,6 milliards d'euros.
- A la suite de la loi du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire, le texte allège les obligations en matière de surveillance des opérations funéraires (fermeture du cercueil et pose des scellés, etc.).
- Les sénateurs ont précisé les modalités de mise en oeuvre de la disposition de la loi du 19 décembre 2008 conduisant les opérateurs funéraires à déposer des devis-types dans les mairies.
- Le texte transfère du préfet au maire la responsabilité de : l'autorisation des loteries, dans les cas où elles sont licites, par exemple pour les œuvres de bienfaisance ou le financement d'activités sportives à but non lucratif ; la réception de la déclaration des manifestations sportives à caractère communal ne comportant pas la participation de véhicules à moteur, mais qui se déroulent sur la voie publique.
- Le gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance les mesures transférant du préfet au président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (Sdis) l'organisation matérielle de l'élection à ce conseil d'administration des représentants des communes et des établissements publics intercommunaux. Le transfert porte aussi sur l'organisation de l'élection à la commission administrative et technique, ainsi qu'au comité consultatif départemental des sapeurs-pompiers volontaires.
- Par voie d'ordonnance, le gouvernement pourra aussi transférer du préfet au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) l'organisation matérielle des élections internes concernant les différents organes délibérants de l'établissement (conseils régionaux d'orientation et conseil d'administration). Il pourra encore transférer du préfet aux centres de gestion (CDG) de la fonction publique territoriale l'organisation matérielle des élections au sein de leurs conseils d'administration.
- Le texte abroge l'article 104 de la loi du 13 août 2004, qui a créé la commission nationale de conciliation, instance du dispositif qui a permis le transfert de certains services de l'Etat vers les collectivités territoriales, dans le cadre de l'"acte 2" de la décentralisation. Est abrogé aussi l'article 4 de la loi du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers. Lui aussi a mis en place une commission de conciliation. Ces instances n'ont désormais plus lieu d'être.

DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT CIVIL

- Le gouvernement veut simplifier "certains aspects" du droit de la protection juridique des majeurs, "sans, [toutefois], remettre en cause les grands principes de la réforme adoptée en 2007". Le texte, qui serait d'application immédiate, prévoit notamment que le tuteur arrête le budget de la personne protégée et qu'il en tient informé le juge, ou le conseil de famille. Les sénateurs ont refusé d'accorder au juge des tutelles la possibilité de prononcer des mesures initiales de protection pour une durée supérieure à cinq ans. Le gouvernement voulait ouvrir ce droit, lorsque l'état de santé des personnes à protéger ne peut s'améliorer. Le gouvernement soulignait qu'il avait dû augmenter, fin 2013, les effectifs des juridictions pour arriver à réviser toutes les mesures de tutelle décidées avant 2009.
Le texte issu de l'examen par le Sénat autorise le gouvernement à prévoir par ordonnance, que les membres proches de la famille d'un majeur hors d'état de manifester sa volonté, pourront le représenter, ou passer certains actes en son nom, sans qu'il soit besoin de prononcer une mesure de protection judiciaire.
Les mesures de tutelle ont représenté, en 2010, 57 % des 60.888 ouvertures de mesures de protection.
- Par ordonnance, le gouvernement pourra prendre les mesures pour "instaurer un nouveau mode de preuve simplifié" au bénéfice des personnes devant justifier de la qualité d'héritier dans les successions d'un montant limité. Aujourd'hui, les héritiers peuvent prouver leur qualité notamment par l'obtention d'un certificat d'hérédité, établi à titre gracieux par les mairies. Or, "en l'absence de contraintes pour les mairies à délivrer ce type d'actes, beaucoup d'entre elles refusent aujourd'hui de [le] délivrer", indique le gouvernement dans l'étude d'impact du projet de loi. Même lorsqu'ils doivent hériter de faibles montants, les particuliers sont donc obligés de se tourner vers un notaire, dont les services sont payants.

UN TEXTE AUJOURD'HUI MOINS AMBITIEUX

Le Sénat a supprimé l'article 14 qui prévoyait d'autoriser le gouvernement à prendre par ordonnance des mesures pour remplacer, par de simples déclarations, des procédures de demandes d'autorisations administratives auxquelles sont soumises aujourd'hui les entreprises. Par cet article 14, le gouvernement aurait pu aussi toiletter, voire supprimer, des procédures de demandes d'autorisation et de déclarations applicables aux entreprises.
Surtout, l'article 3 qui prévoyait d'habiliter le gouvernement à réformer par voie d'ordonnance le droit des contrats et des obligations est passé à la trappe. Les sénateurs ont considéré que cette réforme, la plus ambitieuse depuis la création du Code civil en 1804, "était trop fondamentale pour être traitée par voie d'ordonnance". Ils ont souhaité que le texte envisagé soit soumis au Parlement sous la forme d'un projet de loi.

A partir de la publication de la loi, le gouvernement disposera d'un délai de six mois, huit mois ou douze mois selon le cas, pour prendre les ordonnances. A partir de la publication d'une ordonnance, il disposera d'un délai de deux mois, ou six mois, là encore selon le cas, pour déposer devant le Parlement le projet de loi de ratification correspondant.
Il revient à présent à l'Assemblée nationale de discuter du texte. La procédure accélérée ayant été déclarée, le texte ne fera pas l'objet d'une seconde lecture.

 

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