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Economie - La vie des entreprises bientôt simplifiée par ordonnances...

Le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, a présenté ce mercredi 4 septembre en Conseil des ministres un projet de loi autorisant le gouvernement à agir par ordonnance pour simplifier et sécuriser la vie des entreprises.
C'est sur la base d'un rapport du député Thierry Mandon remis en juillet, mais aussi des travaux des différents comités interministériels de modernisation de l'action publique (Cimap), que quatre grands ensembles de mesures de ce "choc de simplification" dédié aux entreprises ont été décidés pour 2013-2015. D'autres mesures ne nécessitant pas de passer par voie législative feront l'objet de modifications réglementaires, a précisé Bercy. Le texte devrait être examiné par les parlementaires en octobre et adopté d'ici à la fin de l'année. Les ordonnances, qui feront ou font déjà l'objet de concertations, seront publiées en 2014. Le ministère de l'Economie estime que ces simplifications pourraient permettre aux entreprises françaises de réaliser jusqu'à 15 milliards d'euros d'économies.
Parmi les quatre grands ensembles, on trouve d'abord l'allègement d'obligations pesant sur les entreprises, notamment les très petites, en limitant le nombre de documents à transmettre à l'administration ou en ramassant une série de documents en un seul. Le deuxième pilier concerne le financement des entreprises, et comprend notamment un volet visant à faciliter le financement participatif et un autre "améliorant le traitement des entreprises en difficulté". Bercy souhaite également "faciliter les rapports entre les entreprises et les pouvoirs publics" par le développement de la facturation électronique ou la sécurisation du très haut débit. Enfin, certains secteurs spécifiques feront l'objet d'une série de mesures de simplification.
Le projet de loi comprend à la fois des mesures nouvelles "sur lesquelles le gouvernement a travaillé depuis trois mois", note Bercy, et des mesures déjà connues depuis le dernier Cimap de juillet (voir ci-contre notre article du 18 juillet). Avec, comme cela semble être d'usage pour les projets de loi de simplification, une grande… diversité dans les questions traitées. Focus sur celles qui, au-delà des entreprises elles-mêmes, auront un impact direct ou indirect sur les collectivités.

Achat public / Dématérialisation
Il s'agit de développer la facturation électronique entre les acheteurs publics - l'Etat ou les collectivités - et leurs fournisseurs par, indique l'article Ier, "l’institution d’une obligation, applicable dès les contrats en cours, de transmission dématérialisée pour toutes les entreprises ou certaines d’entre elles". Autrement dit, le gouvernement prévoit de rendre progressivement obligatoire l’utilisation des factures électroniques entre l’Etat et ses fournisseurs. S'agissant des collectivités locales en revanche, "une concertation permettra de déterminer si et dans quelle mesure celles-ci entendent s’inscrire dans ce type de démarche", précise l'exposé des motifs.

Très haut débit
Dans le cadre de sa feuille de route numérique, le gouvernement souhaite faciliter le raccordement des immeubles au très haut débit (fibre) en clarifiant le partage des responsabilités des opérateurs et des copropriétés. Aujourd'hui, "les incertitudes sur le responsable à qui incombe la charge, notamment financière, des travaux, selon les emprises concernées […] constituent des freins à la prise de décision et des causes de retard au fibrage proprement dit". Des mesures incitatives à la prise de décision par les copropriétés sont également envisagées, ainsi qu'une extension des dispositions existantes aux lotissements.

Etablissements sportifs
L'un des articles (article 7) prévoit de "supprimer ou aménager les obligations déclaratives des établissements où sont pratiquées une ou plusieurs activités physiques et sportives, ainsi que les sanctions correspondantes, de même que les règles applicables à ces pratiques hors de ces établissements". La délivrance des autorisations serait transférée du préfet au maire.

Commerce
Il est prévu de modifier les dispositions du Code de commerce applicables aux ventes en liquidation : désormais, ces ventes en liquidation feront l’objet d’une déclaration préalable auprès du maire de la commune de la même manière que les ventes au déballage.
Un autre article supprime la déclaration préalable en préfecture pour les entrepreneurs étrangers non résidents voulant exercer en France une profession commerciale, industrielle ou artisanale.

Crowdfunding
Le "crowdfunding" ou "financement participatif", qui permet de financer des projets voire des entreprises en collectant les apports financiers de particuliers via des plateformes internet, a le vent en poupe… Il s'agit donc aujourd'hui d'adapter la réglementation pour tenir compte de la spécificité de cette pratique (entre autres en étendant le champ des dérogations au monopole bancaire pour autoriser le prêt par des personnes physiques).

Immobilier d'entreprise
L'article Ier du projet de loi prévoit la création d’une procédure intégrée pour la création ou l’extension de locaux d’activités économiques, soumise à une évaluation environnementale et applicable à des projets d'"intérêt économique majeur". "Afin de renforcer le caractère intégré de la procédure et diminuer les délais, l'ordonnance pourrait prévoir de regrouper au sein d'une procédure unique l'instruction et la délivrance des autorisations d'urbanisme mais aussi des autorisations requises pour la réalisation du projet par d'autres législations, en fonction des travaux menés dans le cadre de la conférence environnementale", souligne l'étude d'impact du texte.

Grand Paris
L'article 8 du projet de loi a pour objet d'habiliter le gouvernement à prendre par ordonnance trois types de mesures visant à mettre en oeuvre ses orientations concernant le nouveau Grand Paris. Trois types de modifications de la loi n°2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris sont prévus : déterminer les conditions et modalités selon lesquelles la Société du Grand Paris (SGP) peut financer des projets d’infrastructure de transport destinés à offrir des correspondances avec le réseau de transport public du Grand Paris, ou se voir confier la maîtrise d’ouvrage de tels projets ; permettre au Syndicat des transports d’Ile-de-France (Stif) de confier à la SGP, par voie de convention, toute mission d’intérêt général présentant un caractère complémentaire ou connexe à ses missions ; déterminer la procédure de modification du schéma d’ensemble du réseau de transport public du Grand Paris en précisant son champ d’application et ses principes, y compris les conditions de sa contestation, ainsi que les règles applicables pour la participation du public.

Expérimentation du "certificat de projet"
Selon l'article 13 du projet de loi, un cadre juridique spécifique sera établi par ordonnance pour expérimenter "dans un nombre limité de régions et pour une durée n’excédant pas trois ans", la délivrance de "certificats de projet" aux porteurs de projets d'activité économique. Ce nouveau document énumérerait de manière exhaustive les différentes législations applicables à une demande et aurait pour effet de les "cristalliser", à l'instar d'un certificat d'urbanisme. Le certificat de projet apporterait ainsi au pétitionnaire une garantie de stabilité juridique dans l’hypothèse où il déposerait un dossier de demande d'autorisation dans les 18 mois suivant la délivrance dudit certificat. Cette garantie porterait notamment sur les dispositions en matière de prévention des pollutions, risques et nuisances (livre V du Code de l'environnement). Ne pourraient toutefois y être incluses les dispositions ayant pour objet la santé, la sécurité ou la salubrité publique.
Plusieurs régions sont déjà pressenties pour la conduite de cette expérimentation, notamment l’Aquitaine, la Franche-Comté et Champagne-Ardenne.

Installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE)
L'article 14 du projet de loi prévoit l'expérimentation d'autorisations uniques pour certaines ICPE soumises à autorisation. Ces expérimentations prendraient des formes différentes selon qu'elles concernent certaines installations de production d'énergie renouvelable (éoliennes, installations de méthanisation) ou les autres installations classées. Pour les parcs éoliens, l'expérimentation envisagée permettra la mise en place d'une procédure et d'une décision d'autorisation unique qui sera construite autour de la procédure d'autorisation ICPE, prévoyant la réalisation d'une étude d'impact, d'une étude de dangers et d'une enquête publique. Cette procédure d'autorisation sera au besoin complétée pour y introduire l'ensemble des éléments permettant de garantir la prise en compte des enjeux des autres procédures (par exemple, la prévention des risques pour la navigation aérienne prise en compte dans le cadre du permis de construire, ou encore la consultation du Comité national de la protection de la nature nécessaire pour certaines atteintes à des espèces protégées). Il est par ailleurs envisagé d'intégrer dans cette autorisation préfectorale unique, l'autorisation actuellement délivrée par le ministre de l'Energie au titre du Code de l'énergie pour les installations les plus importantes. L'objectif attendu de cette expérimentation  est de "simplifier la procédure, d'éviter les doublons, d'améliorer la lisibilité des procédures pour les parties prenantes, de réduire les contentieux et de réduire les délais", souligne l'exposé des motifs. Plusieurs régions sont déjà pressenties pour la conduite de cette expérimentation, notamment la Basse-Normandie, Champagne-Ardenne, le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie, qui représentent au total environ un quart des projets éoliens nationaux.
Pour les autres installations classées soumises à autorisation, le 2° et le 3° de l'article 14 visent à permettre une expérimentation consistant à mettre en place un interlocuteur unique, une procédure unique et une décision unique pour l'ensemble des projets. S'ajoutant à l'article 13 relatif au certificat de projet, cet article permet au préfet de département de délivrer une autorisation unique regroupant l'ensemble des décisions relevant de l'Etat au titre du Code de l'environnement et au titre du Code forestier (autorisation de défrichement). En outre, les modalités de délivrance des autorisations délivrées au titre d’autres législations, notamment au titre de l’urbanisme, feront l’objet d’une harmonisation avec la nouvelle procédure d’autorisation unique environnementale. "Par ailleurs, l'expérimentation prévoira la mise en place d'une structure 'projet' entre services de l'Etat autour d'un interlocuteur unique du porteur de projet, des règles de procédure simplifiées et des délais réduits, améliorations qui ne nécessitent pas de dispositions législatives et seront définies par voie réglementaire", indique l'exposé des motifs. L'objectif est là encore de simplifier et d'accélérer la réalisation des projets en encadrant la totalité des procédures dans un délai réglementaire qui pourrait être réduit à dix mois, alors qu'actuellement la moitié des autorisations ICPE nécessitent un délai de plus d'un an.