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Abandon du Grand Stade en Essonne : la Fédération française de rugby condamnée

La Fédération française de rugby devra indemniser la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine Essonne Sénart pour l'abandon de son projet de Grand Stade. Elle a méconnu ses engagements contractuels. Et elle ne pouvait pas se prévaloir d'un motif d'intérêt général pour rompre le contrat.

La Fédération française de rugby (FFR) devra verser 3,36 millions d'euros d'indemnité à la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine Essonne Sénart (CAGPS). La raison ? L'abandon du projet de construction d'un Grand Stade dans le département de l'Essonne. Dans un jugement du 3 juillet dont Localtis s'est procuré une copie, le tribunal administratif de Versailles a reconnu que la responsabilité de la FFR était "engagée sur le terrain contractuel". 
L'affaire commence avec l’accord-cadre conclu le 26 juin 2012 entre la FFR et des collectivités territoriales du sud de l'Essonne. Le but de cet accord : la construction d'un stade de 82.000 places par la FFR, alors présidée par Pierre Camou. 
À la suite de l'élection fédérale de décembre 2016, Bernard Laporte devient président de la FFR. Dans son programme figurait l'abandon du projet autofinancé par la fédération pour près de 600 millions d'euros. Le 14 décembre 2016, le comité directeur de la FFR validait l’arrêt définitif du projet. Le 4 janvier 2017, son président déclarait caduc l'accord-cadre. 
Ce sont ces décisions que la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine Essonne Sénart a attaquées devant la juridiction administrative. Elle demandait une indemnité de 29,8 millions d'euros. Selon elle, "aucune stipulation de cet accord ne prévoyait la faculté pour la FFR de procéder à une résiliation unilatérale du contrat". D'autres collectivités cocontractantes de l'accord-cadre, les communes de Ris-Orangis et Bondoufle, s'étaient jointes à la requête. Toutes avaient "engagé d’importantes dépenses pour satisfaire à leurs obligations" vis-à-vis de la FFR dans le cadre de ce projet. Parmi celles-ci : organisation d'un débat public, acquisition du terrain d’emprise de l’ancien hippodrome de Ris-Orangis, démarches nécessaires à l’élaboration du projet d’aménagement, etc.

Pas d'intérêt général à rompre le contrat

Par un courrier du 4 janvier 2017, le président de la FFR a informé les collectivités du groupement de sa décision d’abandonner le projet. Il s'est notamment appuyé sur l’observation faite par la Cour des Comptes un peu plus d’un an plus tôt, selon laquelle ce projet "était susceptible de présenter un risque à la fois pour les finances de la FFR (et donc un "risque de dégradation du soutien à la discipline") ainsi que pour les finances de la collectivité locale qui apporterait sa garantie".
Dans son jugement, le tribunal relève tout d'abord que "la FFR ne peut sérieusement  contester son engagement dans l’ensemble du processus ayant abouti à l’accord-cadre". Elle a donc "méconnu ses engagements contractuels". Et ce d'autant que le contrat "ne comporte aucune clause attribuant à l’une ou l’autre des parties le pouvoir de le résilier unilatéralement". 
Par ailleurs, le projet de création du "grand stade de rugby" n'entre pas dans le champ des missions de service public qui ont été confiées par le législateur à la FFR. La fédération ne pouvait donc pas légalement le rompre unilatéralement pour un motif d’intérêt général. Pour la FFR, ce motif d’intérêt général consistait à prévenir le risque financier lié à ce projet.
Le tribunal condamne la FFR à verser à la CAGPS une indemnité de 3.364.288,12 euros et à la commune de Ris-Orangis une indemnité de 18.328,60 euros. La requête de la commune de Bondoufle est en revanche rejetée.