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Marchés publics - Candidat en redressement judiciaire : une question de timing pour le repreneur

Dans cet arrêt du 21 octobre 2019, le Conseil d’Etat a apporté des précisions sur l’appréciation de candidature de sociétés en situation de redressement judiciaire. Plus particulièrement, la question concernait ici une entreprise ayant été placée en redressement judiciaire après le dépôt de sa candidature.

En l’espèce, la commune de Chaumont avait lancé un marché de travaux pour la construction du centre international du graphisme de Chaumont. Le lot n°7 "structure métallique – bardages et habillages pierres" avait été attribué à la société Ateliers de France. Candidate évincée, l’entreprise Ateliers Bois a saisi le tribunal administratif (TA) de Châlons-en-Champagne. Ce dernier a rejeté sa demande tendant à l’annulation du contrat et à une indemnisation de plus de 250.000 euros en réparation du manque à gagner subi du fait du rejet de sa candidature, qu’elle considérait comme illégale. Infirmant le jugement du TA, la cour administrative d’appel (CAA) de Nancy avait pour sa part fait droit aux demandes de la société Ateliers Bois. La collectivité a alors saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi en cassation contre cet arrêt. 

Selon la société évincée, la société initialement candidate ne disposait pas des capacités suffisantes pour exécuter ce marché compte tenu de son placement en redressement judiciaire. 

En effet, la date limite des dépôts pour les candidatures avait été fixée au 18 septembre 2013. La société EDM Projets avait alors déposé sa candidature en bonne et due forme. Toutefois, le 31 décembre 2013, le tribunal de commerce de Paris avait arrêté un plan de cession, accordant à la société EDM Ateliers de France le "droit de se présenter comme successeur de la société EDM Projets". Lorsque la collectivité avait demandé aux candidats de compléter leur candidature courant janvier 2014, la société EDM Ateliers de France avait déclaré "reprendre pour son compte et dans les mêmes conditions la candidature et l’offre déposée par la société EDM Projets". Acceptant cette situation, la commune de Chaumont avait alors décidé d’attribuer le lot n°7 au successeur de la société EDM Projets. 

Se posait alors la question de savoir si une nouvelle société pouvait prendre part à une procédure de passation d’un marché public alors qu’elle n’avait pas elle-même présenté sa candidature. 

Le Conseil d’Etat a répondu par la négative, estimant que les sociétés EDM Projets et EDM Ateliers de France avaient deux personnalités juridiques distinctes. Il a également indiqué que "les capacités professionnelles, techniques et financières de la société EDM Ateliers de France […] ne se confondent pas avec celles de la société EDM Projets".

Le Conseil d’Etat a donc confirmé l’arrêt de la CAA, et notamment la condamnation de la commune à verser 267.832 euros à la société évincée en dédommagement de son éviction illégale. En revanche, les juges de cassation ont refusé d’admettre l’annulation du contrat. Ils ont effectivement considéré, d’une part, que le vice relevé ne démontrait pas une volonté de la commune de favoriser la société attributaire et, d’autre part, que la demande d’annulation était dépourvue d’objet, le marché ayant été entièrement exécuté.  

Référence :  CE, 21 octobre 2019, n°416616

 

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