Émilie Kuchel (RFVE) : "La rénovation des écoles avance plus vite que ce que l'on avait pensé"
Alors que le Réseau français des villes éducatrices (RFVE) tient ce vendredi 14 juin son assemblée générale à Rennes, sa présidente, Émilie Kuchel, adjointe au maire de Brest chargée de l'éducation, revient pour Localtis sur l'actualité de l'éducation au prisme des collectivités. Dont l'enjeu de l'école inclusive et celui de la rénovation thermique des bâtiments scolaires.
Localtis - Votre assemblée générale va évoquer le rôle des villes dans la mise en œuvre de l'école inclusive. Que pensez-vous de l'adoption récente d'une loi confiant à l'État la prise en charge de la rémunération des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) sur le temps de la pause méridienne ?
Émilie Kuchel - Nous avions milité pour, c'est une bonne chose que l'enfant soit pris en charge par l'école inclusive sur l'ensemble des temps. Pour les AESH, dont le travail était fractionné entre plusieurs employeurs, c'est aussi plus de simplicité et de respect.
L'accompagnement humain des élèves en situation de handicap pose-t-il d'autres questions ?
Il y a des différences entre territoires sur les notifications des MDPH [maisons départementales pour les personnes handicapées] en faveur de l'accompagnement humain des enfants. Dans certaines académies, on signe des conventions et cela se passe bien, les collectivités sont alors informées des notifications de manière à pouvoir faire les choses correctement sur les temps où il leur revient d'organiser la journée de l'élève. Mais il y a encore des académies qui refusent de transmettre les informations sur les notifications et les besoins des enfants, c'est alors aux parents de s'en charger.
Quelles autres remontées de problèmes avez-vous sur l'inclusion scolaire ?
Nous constatons que des dispositifs assez positifs se développent dans les écoles et quand nous avons de bons rapports avec les inspecteurs [de l'Éducation nationale, ndlr], nous y sommes associés. Mais on se retrouve parfois à devoir faire des travaux au dernier moment, par exemple pour adapter une classe à l'autisme. Si on était associés dès le départ à ces dispositifs on pourrait être beaucoup plus proactifs. Certains détails peuvent rendre difficile la vie des familles, par exemple si l'enfant a besoin d'un appareil pour traiter l'asthme, il faudra parfois un appareil sur le temps scolaire et un autre sur le temps périscolaire. Sur ce type de sujet comme sur les travaux, nous voudrions être associés. Nous avons des écoles plus adaptées que d'autres pour accueillir certains handicaps, or nous n'avons pas de regard sur la façon dont tout est réparti par l'Éducation nationale. Certains inspecteurs préviennent les collectivités assez tardivement, avec des travaux supplémentaires ou des meubles à adapter. La question se pose aussi sur l'environnement proche de l'école, qui n'est pas facilement adaptable à tous. Certaines écoles se trouvent à proximité d'un hôpital ou d'un lieu de soin, et c'est là qu'il faudrait mettre les enfants qui ont des besoins spécifiques.
Le début de l'année a été marqué par le lancement d'une expérimentation du port de l'uniforme à l'école. Quelle est la position du RFVE ?
Dans notre réseau, nous étions plutôt contre. Il faut déjà se demander qui paiera dans le cas où cela deviendrait une obligation. Si ce sont les familles, c'est une inégalité forte qui ne va pas pousser à la mixité. Si ce sont les collectivités, on n'a plus les moyens. Le port de l'uniforme ne s'est jamais fait en France, nous avons simplement eu des blouses à une époque. Cela se fait dans les pays anglo-saxons, qui ont un autre système que le nôtre, basé sur les communautés. On ne voit pas l'intérêt des uniformes, cela va cacher des apparences mais la pauvreté des enfants sera toujours la même. Il faut mettre les moyens ailleurs.
À propos de moyens, le grand sujet actuel et à venir est la rénovation thermique des bâtiments scolaires. Cet immense chantier avance-t-il ?
Oui, il avance dans la plupart des villes, et même beaucoup plus vite que ce que l'on aurait pensé il y a cinq ans. La difficulté qu'on a est de reloger les enfants pendant qu'on fait des rénovations. Vis à vis des enseignants, cela a été assez complexe au début, mais on note une compréhension de plus en plus forte, il y a moins de blocage et ils nous accompagnent. Il y a aussi la question du BTP, qui est en crise, avec des problèmes de livraison de matériaux et des prix qui explosent. À Brest, la facture pour la rénovation totale d'une école qui était de 6 millions d'euros en 2017 est passée à 13 millions.
Quels premiers résultats enregistrez-vous en matière d'économies d'énergie?
Les entreprises ont fait beaucoup de progrès. Techniquement, il y a des évolutions. Les premières écoles que nous avons rénovées il y a cinq ans sont à 20% d'économies d'énergie. Celles que l'on rénove actuellement atteignent 30 ou 40%.
Ces chiffres correspondent-ils à ce qui est annoncé avant les travaux ou constatez-vous ces économies sur vos factures ?
Nous les constatons sur les factures. À Brest, c'est une SPL [société publique locale], avec un partenaire privé garant de la maîtrise d'œuvre et du suivi des travaux, qui gère cela et nous finançons ce partenaire en fonction des réussites du marché. Ce système nous a permis de rénover cinq écoles en deux ans, ce que nous n'aurions pas pu faire par nos propres moyens car Brest n'est pas une ville très riche, le tout par le biais de prêts négociés auprès de la Banque des Territoires. Cela avance bien, nous sommes plus outillés qu'il y a encore sept ou huit ans. La prochaine étape est la formation des usagers. Quand ces derniers sont formés et travaillent avec nous sur ces sujets, les économies vont beaucoup plus vite.