Les caugéens retrouvent le bar-brasserie avec la Foncière de Normandie
Caugé, aux portes d’Évreux, a vu son dernier commerce liquidé en 2021. Grâce à une coopération entre la Foncière de Normandie, la commune et la communauté d’agglomération, un nouveau bar-restaurant a ouvert ses portes début 2025.
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Caugé, commune normande de 850 habitants, est située à 10 kilomètres à l’ouest d’Évreux et une centaine de kilomètres de Paris. L’unique commerce de la commune, un bar-restaurant multiservice, a tenu une place importante dans la vie locale jusqu’en 2019. « Brasserie le midi, bar le soir, dépôt de presse et de pain, soirées à thèmes, privatisation de la salle arrière : ça a très bien fonctionné pendant des années, témoigne le maire, Jean-Marie Maillard. Mais avec le changement de gérance en 2019, nous avons vu la clientèle fondre. » Covid et confinements, en 2020, ont porté le coup de grâce au commerce. En octobre 2021, l’établissement est placé en redressement judiciaire.
La commune prend position pour faire revivre le bar brasserie
Le propriétaire, qui ne recevait plus de loyer depuis un moment, souhaite vendre les murs. La commune ayant un droit de préemption commerciale, le sujet est abordé en conseil municipal. « Tout le monde était d’accord sur les enjeux, explique le maire : faire revivre l’établissement en ayant notre mot à dire sur le choix de la gérance. La commune avait la capacité d’acheter, mais je préférais que l’on reste dans le rôle d’un facilitateur, celui qui met les bonnes personnes autour de la table. » La commune fait donc le choix de ne pas investir dans les murs, mais d’acquérir la licence IV, permettant l’exploitation d’un bar.
Caugé fait partie d’Évreux Portes de Normandie (EPN), communauté d’agglomération de 74 communes, qui, au titre de sa compétence économique propose une aide à la création et à la reprise de commerces en milieu rural. Ainsi, le service commerce de l’EPN met la commune en contact avec la Foncière de Normandie. Complémentaire à l’Établissement public foncier de Normandie, cet outil régional a été mis en place au sortir du covid, dans l'objectif de soutenir l'implantation et le renouvellement du dernier commerce en centre bourg. La foncière porte le projet en acquérant l’immobilier commercial, puis le propose à des candidats à la reprise. « J’ignorais l’existence de la Foncière de Normandie, indique Jean-Marie Maillard. Nous avons été parmi les premiers à la contacter en février 2022. »
Rachat et rénovation du bâtiment avec le soutien de l’ANCT
Le service des domaines procède à l’estimation du bâtiment. Sa vétusté et la difficile gestion des trois dernières années ont laissé les lieux en piteux état et sans aucun équipement professionnel. Des travaux sont à prévoir pour la réfection des sols, murs, plafonds, l’électricité et la mise en accessibilité. « La Foncière de Normandie a négocié le prix d’achat avec le propriétaire qui a été très conciliant. Il a mis du sien pour que cela puisse se réaliser », souligne le maire. La Foncière de Normandie finalise l’achat en juin 2024 et conduit les travaux de septembre à décembre. Elle obtient pour cela un financement de l’Agence nationale de cohésion des territoires au titre du dispositif Reconquête commerciale, sous réserve qu’il propose du multiservice. L’équipement en matériel professionnel et le mobilier seront à la charge du futur exploitant.
La commune achète une licence IV aux enchères
En juin 2022, le conseil municipal avait proposé à l’ancien gérant le rachat de sa licence IV au prix estimé par le liquidateur judiciaire, soit 3 500 euros. Le gérant préférait la louer. Par souci d’indépendance, la commune décide d’acquérir sa propre licence lors d’une vente aux enchères, en février 2023. « C’était un grand moment de stress ! témoigne l’élu. J’avais un budget de 16 000 euros, calculé en fonction de nos capacités d’investissement de l’année N-1. La mise à prix était à 4 000 euros. Tout s’est passé en quatre cinq minutes. » Finalement, la commune obtient la licence pour près de 14 000 euros. En avril 2024, le conseil municipal acte la mise à disposition de la licence IV au futur gérant de l'établissement, sous réserve qu’il dispose d’un permis d’exploitation. « Il était important d’acter cette convention avant l’achat des murs par la Foncière, pour garantir la possibilité d’une exploitation. La mise à disposition à titre gratuit pour la première année pourra être remise en question, mais de toute façon le but n’est pas de gagner de l’argent sur la licence IV. L’intérêt est de maîtriser le choix du gérant. »
SOS Villages pour mettre en place la gérance
Une fois la capacité d’exploiter maîtrisée, reste donc à trouver une gérance. Début 2024, l’appel à candidature est lancé via SOS Villages, plateforme d'aide à la relance des commerces en zone rurale. Et le maire d’ajouter : « Nous avons eu beaucoup de contacts, dont cinq candidatures sérieuses. Nous en avons retenu trois pour l’audition devant notre jury, composé de représentants de la Foncière de Normandie, de la Chambre de commerce et d’industrie, du service commerce d’Évreux Portes de Normandie et de la commune. » Entre les deux candidats restant en lice, le choix se porte sur celui qui prévoit de vivre sur place, gage d’implication durable dans la commune.
La réouverture se fait mi-février 2025, une fois que le nouveau gérant a équipé la cuisine avec le concours financier de la communauté d’agglomération. Le loyer pour les murs (commerce et logement de 100 m² à l’étage) s’élève à 1 400 euros, assurance comprise. « La Foncière a pour but de maintenir le dernier commerce, le montant du loyer est calculé pour simplement équilibrer l’investissement et couvrir les charges. Le gérant a la possibilité de sous-louer le logement au-dessus. S’il le souhaite, il pourra aussi acquérir les murs. Le fonctionnement est souple. »
À la reconquête d’une clientèle
« Cela a été long, nous avons connu des rebondissements et des déceptions, avec par exemple des personnes qui se sont retirées du projet sans prévenir » témoigne le maire. Le bar brasserie est ouvert six jours sur sept, avec des horaires larges répondant aux attentes de la municipalité et des services annexes : dépôt de pain, de presse, de tabac, plats à emporter. « Pourtant la clientèle a du mal à revenir. La brasserie n’atteint pas encore les 15 à 20 repas par jour permettant l’équilibre. Avec la fermeture longue de l’établissement, les gens ont pris d’autres habitudes. Mais le bar fonctionne bien, la première soirée à thème en juillet 2025 a rassemblé 50 personnes. On garde espoir ! » conclut Jean-Marie Maillard.
Coûts d’investissement et d’exploitation
Investissement immobilier par la Foncière de Normandie : 236 000 euros (acquisition 136 000 euros, travaux 100 000 euros) avec une subvention de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) de 50 000 euros
Investissement immatériel (licence IV) par la commune : 13 942 euros
Investissement mobilier par le gérant : 34 400 euros avec un apport de 11 470 euros par la communauté d’agglomération
Charges d’exploitation : loyer 1 400 euros, loyer de la licence IV pour la première année : 0 euro
Commune de Caugé
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