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Le "plan d'investissement dédié au tourisme de montagne" sera présenté en mai

Joël Giraud participait le 23 avril à un comité de massif Pyrénées "exceptionnel", doublé d'une réunion de travail avec les six préfets concernés. Il a à cette occasion évoqué les grands axes du futur plan d'investissement en faveur du tourisme de montagne qui sera présenté au prochain comité interministériel du tourisme : la "diversification et digitalisation de l'offre", le développement durable et - à l'heure notamment où les résidences de tourisme cumulent les difficultés - l'évolution du parc d'hébergement. 

Face à la chute brutale d'activité des stations de montagne (voir notre article du 9 mars 2021), le gouvernement prépare la réponse. Joël Giraud a ainsi participé, le 23 avril en visioconférence, à un comité de massif Pyrénées "exceptionnel", doublé d'une réunion de travail avec les six préfets concernés. Le secrétaire d'État chargé de la ruralité a confirmé la mise en place prochaine d'un "plan Montagne pour une relance adaptée aux enjeux des massifs", annoncé par le Premier ministre en mars dernier (voir notre article du 12 mars 2021). Il s'est plus particulièrement attardé sur le volet du tourisme et a présenté les grandes lignes du futur plan d'investissement.

Du plan Montagne au plan d'investissement touristique

Ce n'est pas le premier déplacement de ce type dans le but de préparer le plan Montagne, puisque Joël Giraud et Jean-Baptiste Lemoyne, le secrétaire d'État auprès du ministre des Affaires étrangères, en charge du tourisme, ont lancé la démarche de concertation le 11 mars à Chamonix et se sont rendus dans les Vosges le 12 avril. Les deux ministres ont par ailleurs rencontré, le 14 avril, le groupe d'études sénatorial sur le développement économique de la montagne, présidé par Cyril Pellevat, sénateur (LR) de Haute-Savoie, très actif sur le sujet. Des réunions sont également prévues avec les autres massifs.

Le futur plan Montagne a une vocation globale, centrée sur le long terme et l'avenir de ces territoires, et devrait donc couvrir l'ensemble des dimensions : agriculture, activités économiques, services publics, désenclavement, thermalisme... Mais le déplacement dans les Pyrénées était plus spécialement centré sur le volet tourisme, de loin le plus touché par la crise sanitaire. Les stations de ski ont bénéficié cet hiver d'un plan d'urgence d'environ 4 milliards d'euros, qui s'ajoutent aux mesures générales en faveur des entreprises. Pour sa part, le "plan d'investissement dédié au tourisme de montagne" vise à accompagner, à court terme, la reprise de l'activité des stations et, à moyen et long termes, à faire évoluer leur modèle économique pour les rendre moins dépendantes du ski et des aléas climatiques. Dans son communiqué du 23 avril, Joël Giraud affirme d'ailleurs que "depuis les plans Neige des années 60 et 70, dont le but était d'aménager des stations de sports d'hiver de haute montagne, il n'y avait pas eu de grand plan d'investissement dédié à la montagne".

Offre touristique, développement durable et rénovation de l'hébergement

Ce plan d'investissement touristique sera présenté par les deux ministres au prochain comité interministériel du tourisme, qui devrait se tenir dans le courant du mois de mai, à une date non encore fixée. En attendant, Joël Giraud en a détaillé les trois grands axes. Le premier concerne la "diversification et digitalisation de l'offre touristique de loisirs et de services des stations et plus globalement de la montagne". Face à la tendance à la réduction des périodes d'enneigement et à l'élévation des limites de la neige, il s'agit de concrétiser l'évolution vers un tourisme "quatre saisons", moins dépendant du ski et de la saison d'hiver.

Le second axe consiste en la "prise en compte de la dimension environnementale dans la transformation de la destination Montagne". En pratique – et comme pour l'atténuation de la dépendance au ski –, il s'agit de prendre en compte les effets climatiques, qui tendent à s'accélérer en montagne. Aussi cet axe du plan prévoit-il que "la relance de l'activité touristique passera par une meilleure prise en compte du développement durable (préservation de la ressource en eau, biodiversité, mobilités...), tendance forte dans les nouvelles pratiques touristiques".

Enfin, le troisième axe concerne un serpent de mer, évoqué à de multiples reprises dans les comités interministériels, ainsi que dans des rapports parlementaires et des propositions de loi (voir notre article du 13 décembre 2018). Il s'agit en effet de la rénovation et de la transformation du parc d'hébergements touristiques. Ce patrimoine vieillissant, qui remonte aux années 60 à 80, ne répond plus aux attentes actuelles, qu'il s'agisse de la taille des appartements, de la performance énergétique ou de la qualité des espaces publics. S'y ajoute le problème des "lits froids" (logements rarement occupés par leurs propriétaires, qui ne sont pas proposés à la location, ou ne trouvent pas de locataires). Mais ces hébergements – qui prennent souvent la forme de résidences de tourisme – se trouvent aujourd'hui dans une situation très difficile, du fait des loyers impayés aux particuliers propriétaires par les organismes gestionnaires de ces résidences (voir encadré ci-dessous). Il paraît donc difficile d'engager une rénovation significative à court terme, sauf à envisager "un effort considérable". L'enveloppe consacrée à ce plan d'investissement sera donc examinée de très près.

  • Les résidences de tourisme au bord du gouffre

Si l'ensemble du secteur du tourisme compte parmi les principales victimes économiques de la crise sanitaire, les résidences de tourisme cumulent les difficultés, au point de remettre en cause la survie du modèle. Très présentes dans les stations, elles ont notamment subi l'impact de la fermeture – de facto – des stations de ski, qui a fait chuter leur fréquentation. Et la saison d'été s'annonce pour l'instant encore très incertaine.

Mais surtout, les résidences de tourisme – que la direction générale des entreprises définit comme "un ensemble de logements 'prêt-à-vivre', équipés pour recevoir une clientèle de loisirs ou d'affaires en séjour de courte durée" – font le plus souvent l'objet d'un modèle économique particulier, qui les distingue fortement des autres infrastructures touristiques. En effet, les grands opérateurs du secteur ne sont pas propriétaires des murs des résidences. Les appartements mis en location appartiennent à des particuliers, qui ont été incités à réaliser ce type d'investissement grâce à plusieurs avantages : statut de loueur professionnel, réductions d'impôt sur le revenu (dispositif Demessine ou dispositif Censi-Bouvard, qui lui a succédé), récupération de la TVA payée sur le logement... Sans oublier des rendements alléchants, parfois un peu trop beaux pour être vrais.  

Or, avec la crise sanitaire et la chute de la fréquentation, les opérateurs de résidences de tourisme ont cessé de régler les loyers ou pris un retard important dans leur versement. En février, le groupe Pierre & Vacances, un des principaux opérateurs, a ainsi annoncé suspendre "provisoirement" le règlement de ses loyers, comme il l'avait déjà fait pendant le premier confinement et au début du second. Plus de 700 propriétaires de cottages Center Parcs l'ont d'ailleurs déjà assigné pour impayés de loyers. Et d'autres opérateurs sont dans le même cas.
Outre la fragilisation de l'ensemble de l'écosystème des résidences de tourisme, cette situation risque d'avoir une autre conséquence : les propriétaires mis en difficulté par les impayés de loyer – surtout s'ils se sont endettés pour investir et doivent faire face à leurs propres échéances – ne pourront pas investir dans l'entretien et la rénovation de leurs biens. Or les résidences vieillissantes des années 1960 à 1980 – période faste pour le développement de cette formule – ont un besoin urgent de réhabilitation, souligné par plusieurs rapports parlementaires et propositions de loi (voir notre article du 13 décembre 2018).

Conscient de la situation, le gouvernement a bien pris des mesures pour venir en aide à ce secteur (au-delà du dispositif général d'aide aux entreprises). Un décret du 24 mars 2021 "visant à compenser les coûts fixes non couverts des entreprises dont l'activité est particulièrement affectée par l'épidémie de covid-19", s'adresse notamment aux résidences de tourisme (mais aussi à l'hôtellerie, aux salles de sports, aux zoos...), autrement dit aux entreprises ayant des frais fixes importants. Mais, dans un communiqué du 8 avril, un collectif – réunissant le SNRT (Syndicat national des résidences de tourisme), Pierre & Vacances, VVF Vacances, Belambra, Club Med... –, estime "que les promesses faites ne seraient pas tenues" et que "le décret ne répond absolument pas aux aides attendues". Les signataires font notamment valoir que le décret "prend en compte un quart des charges fixes (janvier à avril), quand 85% du chiffre d'affaires annuel est réalisé sur la période". En outre, "le plafonnement des indemnisations à 10 millions par groupe pénalise dangereusement les grandes entreprises". Le collectif "reproche également au texte le seuil de 50% de perte d'activité alors que la Commission européenne permet d'accorder des aides dès 30% de pertes". Enfin, il déplore que les associations organisant des séjours pour enfants en montagne (colonies de vacances, classes de neige, mini-camps) soient exclues du dispositif "pour une raison administrativo-technique qui n'est pas acceptable". 

 

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