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Mal-logement - Le projet de loi Alur posera l'interco comme "acteur unique" de la lutte contre l'habitat indigne

Suite du feuilleton "Alur" orchestré par le ministère du Logement. Après les professions immobilières la semaine dernière puis, lundi, l'habitat alternatif (qu'il soit "participatif" ou "mobile"), c'est au tour de l'habitat indigne. Sur ce volet, le projet de loi Alur entend sacrer l'intercommunalité "acteur unique" de la lutte contre l'habitat indigne, mais aussi "donner un coup d'arrêt aux activités des marchands de sommeil" et contraindre davantage les bailleurs indélicats à réaliser des travaux.

Le projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur), qui sera présenté en Conseil des ministres le 26 juin, entend poser l’intercommunalité comme "acteur unique" de la lutte contre l’habitat indigne. Il ne s'agit pas tant de révolutionner les dispositifs existants, que de gagner en efficacité en faisant mieux face à "la complexité et la lourdeur des procédures" et surtout "la multiplicité des acteurs aux responsabilités diverses et leur difficile coordination". L'intercommunalité est apparue la mieux placée pour mettre en œuvre "une politique intégrée du logement et de l'hébergement". C'est "l’échelon le plus approprié pour regrouper l’ensemble des pouvoirs et compétences nécessaires aux actions de lutte contre l’habitat indigne", a estimé Cécile Duflot, notamment parce que son niveau de décision se situe "ni trop loin du terrain, ni trop proche des administrés".
Concrètement, le texte permettrait aux présidents des EPCI de se voir déléguer les compétences et pouvoirs de police spéciale du préfet, "dès lors que les communes de l’intercommunalité ont également décidé de leur confier leurs pouvoirs en la matière".
"Les intercommunalités pourront signer elles-mêmes les arrêtés d'insalubrité et soumettre à une astreinte financière de 200 euros par jour les propriétaires qui refusent de mettre leur logement aux normes", avait déclaré Cécile Duflot dans un entretien accordé à lacroix.fr et publié le 18 juin au soir.

Pour les propriétaires indélicats, ce sera 200 euros par jour

Cette astreinte de 200 euros est également une nouveauté du projet de loi Alur. C'est le montant que pourraient payer les propriétaires bailleurs indélicats, par jour de retard, "lorsque les travaux prescrits sur des logements insalubres ou indignes n’ont pas été exécutés dans les délais fixés par arrêté, et en amont des procédures pénales au bout desquelles l'État ou la collectivité territoriale se substitue aux propriétaires".
Cette astreinte s’appliquerait au stock d’arrêtés non suivis d’effet, ce qui pourrait rapidement constituer un petit pactole. Une partie serait affectée à l’Anah, pour financer les travaux de propriétaires de bonne foi. Une autre partie servira au relogement des victimes de marchands de sommeil et des personnes vivant dans les logements dégradés et dangereux.
Par ailleurs, le texte proposera que le coût de la maîtrise d’ouvrage des travaux d’office soit mis à la charge des propriétaires défaillants. "La réglementation actuelle ne permet pas le recouvrement des frais induits par le travail des services de l'État ou des communes pour la maîtrise d’ouvrage des travaux", a noté le ministère, "alors qu’il s’agit bien d’une charge supplémentaire directement imputable au non-respect, par les propriétaires et/ou gérants, des actes administratifs leur prescrivant la réalisation de travaux". Chaque année, 6 millions d'euros resteraient ainsi à la charge de l’Etat, et 1 million d'euros à la charge de l’Anah.
Enfin, le texte entend suspendre le versement des allocations logement aux bailleurs pour lesquels les biens ont été déclarés non décents, afin de les inciter à réaliser les travaux. Il prévoit d'instaurer un système de consignation des allocations qui permettrait au locataire de ne payer au bailleur que la part résiduelle (hors allocation) de son loyer durant la durée des travaux et au bailleur de récupérer les allocations consignées une fois les travaux achevés.

Lutter contre les marchands de sommeil avec les notaires et les syndics

Plusieurs dispositifs s'attaqueront aux marchands de sommeil. Le texte du ministère prévoit que le juge pourra condamner un marchand de sommeil à l'interdiction d’achat de biens immobiliers à des fins de location. "Cette mesure empêchera une personne physique d’acheter en son nom propre et également via une société dont il serait gérant, associé ou dirigeant", précise le ministère. Avant la signature d’une vente, les notaires vérifieront auprès des services du casier judiciaire si l’acheteur n'a pas été condamné pour "hébergement contraire à la dignité humaine" et si c'est le cas, la vente serait annulée.
Contre les marchands de sommeil opérant dans les copropriétés, le texte propose d'interdire à un copropriétaire qui a accumulé des dettes et des impayés d'acheter des lots supplémentaires. Au moment d’une vente, le notaire vérifierait auprès du syndic si l’acquéreur potentiel n'est pas déjà copropriétaire et, si c'est le cas, le syndic devrait délivrer au notaire un certificat attestant que cette personne n’a pas fait l’objet d’une mise en demeure restée infructueuse depuis plus de 45 jours (et si c’est le cas, le copropriétaire devrait payer ses dettes dans un délai de trente jours, faute de quoi la vente de ne pourrait se conclure).
Le texte prévoit par ailleurs d'empêcher les copropriétaires endettés de bloquer, en assemblée générale, les procédures de saisie de leur bien. Il s'agirait tout simplement de ne pas tenir compte de leur vote en AG. Enfin, afin de lever les réticences des autres copropriétaires, les frais de procédure et d'avocat engagés par le syndicat seront imputés au copropriétaire condamné.

 

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