"L’ensauvagement de la société" au menu de la nouvelle circulaire FIPD
La traditionnelle circulaire sur l'utilisation des crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) est l'occasion de dévoiler les cinq axes de la future stratégie nationale qui se fait attendre. La place Beauvau insiste tout particulièrement sur la délinquance des jeunes et "l'ensauvagement de la société". À noter que, dans un contexte budgétaire contraint, les crédits du FIPD connaissent une baisse significative.

© Hugo AYMAR- HAYTHAM-REA/ François-Noël Buffet et Bruno Retailleau le 10 avril
En attente depuis de longs mois, annoncée pour le mois de mai, la stratégie nationale de prévention de la délinquance 2025-2030 "paraîtra prochainement" et comportera cinq axes : restaurer l’autorité pour mieux prévenir la délinquance des jeunes ; repérer, orienter et sanctionner plus tôt ; mieux repérer, accueillir et accompagner les victimes ; renforcer le rôle du maire et des élus locaux dans les instances de la prévention de la délinquance ; renforcer le pilotage de la prévention de la délinquance. C’est ce qu’on peut lire dans la traditionnelle circulaire annuelle sur l’utilisation du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) publiée au Bulletin officiel du ministère de l'Intérieur. Cette circulaire, datée du 10 juin est signée par le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, et le ministre délégué, François-Noël Buffet, qui a repris en main l’élaboration de cette stratégie, lors d’un déplacement à Mulhouse au mois de mars (voir notre article du 21 mars). De fait, la circulaire place la délinquance juvénile au cœur de ses priorités. Ecrite quelques jours avant que le Conseil constitutionnel ne censure les principales dispositions de la loi "Attal" (voir notre article du 24 juin), elle demande aux préfets de concentrer les financements sur "le soutien à l’exercice et la restauration de l’autorité parentale".
Civisme
Dans un contexte de "rajeunissement des auteurs", d’aggravation des délits et de "dématérialisation des supports", les deux ministres insistent sur la "responsabilisation des parents". Ils s’inquiètent de "l’enrôlement des plus jeunes et des plus vulnérables dans la criminalité organisée". Ils pointent aussi "l’ensauvagement de la société" et appellent à "l’apprentissage du civisme et de la citoyenneté", précisant que "le maire est au cœur de cet espace d’apprentissage et de contrôle". Un thème cher à l’Association des maires de France qui accueillait, mercredi dernier, les premières premières "Assises du civisme".
"La prévention précoce du décrochage scolaire, de la déscolarisation et de l’enrôlement dans les réseaux constitue une priorité absolue", soulignent également les ministres. Le FIPD doit aussi servir à soutenir des dispositifs de prévention des "violences physiques, psychiques et numériques" - avec, en ligne de mire, la recrudescence de l’usage des couteaux ou du harcèlement numérique - la prévention des conduites addictives et la prévention des violences intrafamiliales.
Les préfets doivent aussi s’employer à prévenir les dérives sectaires en appui de la stratégie nationale de lutte contre les dérives sectaires 2024 – 2027. Un appel à projets doté de 800.000 euros vient d’ailleurs d’être lancé par la Miviludes (voir notre article du 23 juin). Des enveloppes déconcentrées seront également mises à disposition des préfets. Enfin, le troisième axe du FIPD reste la prévention de la radicalisation.
Crédits en baisse
À côté de ces thématiques (prévention de la délinquance, des dérives sectaires et de la radicalisation), le FIPD comporte des "financements spécialisés" tels que le soutien à la vidéoprotection et la sécurisation des lieux sensibles comme les lieux de culte, dans un contexte international marqué par la situation au Proche-Orient. Malgré "la forte contrainte budgétaire", les crédits ont été maintenus, assurent les ministres. Pourtant, le financement des projets de vidéoprotection de voie publique passe de 25 en 2024 à 21,7 millions d’euros cette année "après mise en réserve", dont 18 millions d’euros seront transférés "dans les prochains jours" vers les préfectures de région, avant répartition au niveau départemental. "Dans un contexte de forte demande de la part des collectivités locales, les financements devront porter sur des projets matures, pouvant être effectivement engagés cette année", insiste la circulaire. L'enveloppe confiée au secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (SG-CIPDR) pour financer les autres actions tombe de 62,4 millions d’euros à 52,7 millions. Au total, après cette mise en réserve, les crédits du FIPD passent donc de 87,4 millions d’euros en 2024 (voir notre article du 25 mars 2024) à 74,4 millions d'euros cette année.