Les défaillances d'entreprises anticipées grâce au big data

Voilà un usage très concret des technologies "big data" appliquées à la sphère administrative. Nourri des données issues des administrations sociales, fiscales, économiques et financières de l'État (Urssaf, Dirrecte, Banque de France, Sirene…) l'algorithme "Signaux faibles" est capable de repérer les entreprises en difficulté avant que leur situation ne devienne critique afin de permettre aux administrations de leur proposer un accompagnement adapté.

Un projet d'innovation ouverte né en Bourgogne

Chaque année 50 à 60.000 entreprises sont en effet en situation de défaillance et il est souvent trop tard pour intervenir quand les difficultés deviennent publiques. C'est ainsi qu'est né en 2014 le projet "Signaux faible" lors d'un "territoire camp" organisé à Mâcon pour  imaginer des projets d'innovation utilisant des données publiques. C'est un agent de la Direccte Bourgogne-Franche-Comté qui a eu l'idée "d'identifier les données utiles pour capter les "signaux faibles" envoyés par les entreprises fragilisées et développer un algorithme prédictif permettant d’intervenir bien en amont pour mieux les accompagner", précise Etalab qui a piloté ce projet. Plus précisément, l'objectif était de croiser des données financières, des données sur l’emploi et des données sur les cotisations sociales pour mesurer la santé des entreprises et les tensions existantes, comme les défauts de paiement des cotisations sociales, les licenciements ou les problèmes de trésorerie.

Une convention de partage des données

Pour explorer leur idée, les agents ont pu bénéficier du dispositif beta.gouv " qui incubent une trentaine de start-up d'État" avec l'appui de data scientists et autres spécialistes de l'innovation en mode "agile" (notre article). L'accès aux données de la Banque de France s'est révélé décisif pour valider le projet et, testé au cours de l’année 2018, l'outil détecte 63 entreprises en difficulté, 48 entreprises étant contactées par les services de la Direccte Bourgogne-Franche-Comté et 83% d’entre elles accompagnées. La validation du test débouche sur une convention de déploiement et un accord de partage de données – dans un cadre strictement confidentiel – entre la Banque de France, la Direction générale des entreprises (DGE), le ministère du Travail, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) et la Dinsic. Et au-delà du partage de données, les acteurs s'engagent, sous l'égide commissaire aux restructurations et à la prévention des difficultés des entreprises (CRP), à mobiliser leurs services  pour trouver, en lien avec les partenaires locaux dont les conseils régionaux, les solutions adaptées aux problèmes rencontrés (trésorerie, formation, prévention des licenciements…).

Le 3 avril les partenaires de Signaux faibles ont décidé son déploiement progressif à l'échelle nationale. Les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Hauts-de-France, Occitanie et Nouvelle-Aquitaine devraient être les premières à en bénéficier, les CRP et les Dirrecte étant chargés de sa mise en œuvre.