Ministère de la Transition écologique : travaux en cours
Auditionnée tous azimuts par la commission du développement durable de l'Assemblée nationale ce 20 mai, Agnès Pannier-Runacher a profité de l'occasion pour dresser un état des lieux des différents travaux en cours – ou à venir – conduits ou initiés par son ministère. Au menu : Pnacc, restauration de la nature, REP, etc.

© Capture vidéo Assemblée nationale/ Audition d'Agnès Pannier-Runacher devant la commission du déveloement durable le 20 mai
Passée à la question pendant 2h30 par la commission du développement durable de l'Assemblée nationale ce 20 mai, Agnès Pannier-Runacher a fait le point sur plusieurs dossiers en cours ou à venir. Revue de détails.
Plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc), suites
L'audition portait initialement sur le plan national d'adaptation au changement climatique récemment présenté (lire notre article du 10 mars), qui mobilisa la première partie de la séquence. Rappelant notamment sa volonté de "donner une valeur juridique à la trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (Tracc) par voie réglementaire", Agnès Pannier-Runacher a annoncé qu'elle engagera "dans les prochaines semaines une concertation avec les élus locaux" à cette fin. "L'idée, c'est de donner les moyens à un maire d'être sûr de ne pas construire en zone inondable à horizon 2050, d'être sûr de ne pas construire dans une zone qui sera grignotée par la mer […]. C'est attendu par les élus. C'est aussi une protection juridique, car qui sait qui demain lui reprochera de ne pas avoir bien fait les choses lorsqu'il a arrêté son PLU avant 2030", a-t-elle argué, en précisant que "l'idée est aussi que ce soit simple".
Toujours pour aider les élus, la ministre a indiqué qu'un guide définissant "un cadre de référence pour évaluer les risques de mal-adaptation au changement climatique" à destination des collectivités était en cours de rédaction. "C'est essentiel car les collectivités locales, qui sont en première ligne, n'ont pas toujours la possibilité d'avoir des équipes formées à toutes les politiques que nous menons en matière d'adaptation au changement climatique et de transition écologique", a-t-elle justifié. Autre guide "en cours de finalisation", celui sur "la prise en compte de l'adaptation au changement climatique dans les évaluations environnementales et stratégiques des projets". Parmi les travaux "assez largement finalisés", elle évoque encore ceux qu'elle a confiés au Conseil national du trait de côte "afin d'établir une feuille de route spécifique sur l'adaptation et d'avancer des propositions de financement".
La ministre a par ailleurs confirmé avoir "engagé un travail sur l'intégration des enjeux d'adaptation dans les normes et référentiels techniques" : "Un groupe de travail réunissant les services et opérateurs de mon ministère et l'Afnor a été lancé." Elle a de même indiqué avoir confié, avec Bercy, "une mission d'inspection sur la prise en compte du climat futur dans les aides aux entreprises" à l'IGEDD et au Conseil général des entreprises. Et précisé qu'elle annoncera par ailleurs prochainement "la mise en place de territoires d'expérimentation sylvicoles", travaillant parallèlement "à l'amélioration du cahier des charges du renouvellement forestier afin de renforcer son volet adaptation", dans lequel elle traitera notamment de la question des "coupes rases". Toujours dans le domaine forestier, elle a indiqué que le décret devant mettre en musique le droit de préemption "DFCI" au bénéfice des communes (lire notre article du 12 juillet 2023) serait déposé au Conseil d'État "d'ici l'été". Sachant que le Palais-Royal dispose de deux mois pour l'examiner, elle ajoute que le texte devrait ainsi paraître "au début de l'automne".
Conclusions de la mission parlementaire sur l'adaptation de l'aménagement à l'approche
L'audition a également été l'occasion pour les députés Philippe Fait et Fabrice Barusseau, qui conduisent actuellement une mission d'information sur l'adaptation de l'aménagement des territoires au changement climatique, de dévoiler une partie des conclusions de leur rapport à paraître, lesquelles ne surprendront guère. "Deux obstacles majeurs freinent encore notre action : le financement des mesures d'adaptation et la clarté de la gouvernance", a ainsi expliqué Philippe Fait, plaidant pour "une nouvelle organisation qui pourrait regrouper plusieurs collectivités et EPCI". Son collègue a pour sa part mis en avant "le déséquilibre territorial dans la conduite de la Gemapi, faisant peser l'investissement sur les EPCI situés en amont, davantage ruraux et moins peuplés, donc à faible potentiel fiscal et pourtant fortement exposés aux risques".
"J'ai tendance à penser qu'on aura toujours sur ce type de sujets des moutons à cinq pattes qui ne rentreront pas dans une loi standardisée", a confié la ministre. "L'EPTB [établissement public territorial de bassin] paraissant être une bonne approche. Je constate sur le terrain qu'elle est difficile à mettre en œuvre, parce que les élus de terrain peuvent avoir le sentiment de perdre leurs compétences sur des sujets sur lesquels ils sont, eux, en première ligne". Pour elle, une chose est certaine : "On a besoin d'un vecteur législatif pour avancer, pas trop long si on veut avoir une chance qu'il puisse [advenir]."
Le chantier de la restauration de la nature lancé ce vendredi
Autre sujet abordé, la restauration de la nature, dans le cadre du règlement européen dédié, adopté dans la douleur (lire notre article du 17 juin 2024) et publié (lire notre article du 29 juillet 2024) l'an dernier. Afin de préparer le plan national que chaque État membre doit soumettre à la Commission européenne au plus tard le 1er septembre 2026 – un règlement d'exécution en définissant le "format standard" vient d'ailleurs d'être publié au JOUE ce 20 mai –, la ministre lancera ce vendredi, à l'occasion d'un déplacement dans le Pas-de-Calais, une concertation préalable de tous les Français, conduite par la Commission nationale du débat public jusqu'au 23 août prochain. Plusieurs modalités de participation sont prévues, prenant notamment la forme d'une plateforme participative, d'un questionnaire – "simple, pour connaître les priorités des Français", précise le cabinet de la ministre – ou encore de différents événements locaux. "L'idée de ce plan, c'est de mettre en cohérence tous les instruments, toutes les actions engagées, notamment par les collectivités, au sein d'un même document, d'une seule stratégie nationale", précise le cabinet de la ministre.
Unoc 3 et plan plastique, leasing social, REP PMCB, loi Duplomb…
D'autres sujets devraient particulièrement occuper la ministre ces prochaines semaines.
• Du 9 au 13 juin, elle sera particulièrement mobilisée par la Conférence des Nations unies sur l'océan (Unoc 3 pour les intimes), qui se tiendra à Nice. Le "plan sur la pollution plastique" annoncé dans le cadre du dernier Conseil de planification écologique (lire notre article du 1er avril), qui devrait notamment contribuer à réduire le montant de l'amende (1,5 milliard d'euros par an) payée par la France à la Commission faute d'atteindre ses objectifs (lire notre article du 14 mai), devrait être lancé pour l'occasion.
• Autre mesure annoncée lors de Conseil de planification qui mobilise le ministère : la relance, en septembre prochain, du "leasing électrique" ou "social", dispositif de location avec option d'achat de véhicules électriques réservé aux ménages modestes. Un projet d'arrêté a été transmis au Conseil supérieur de l'énergie. Le dispositif porterait sur 50.000 véhicules, dont au moins 5.000 réservés pour zones à faibles émissions-mobilité, comme souhaité par Agnès Pannier-Runacher (lire notre article du 13 mai). Les critères d'éligibilité seraient "très similaires, voire identiques" à ceux de la précédente édition, indique le cabinet de la ministre. Le montant du loyer est lui encore "en discussion", avec pour cible un montant proche des 100€, là encore comme dans le dispositif de l'an passé, lequel avait pour mémoire été victime de son succès (lire notre article du 12 février 2024).
• Autre chantier toujours en cours, la refonte de la filière REP des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB), pour laquelle la ministre a mis en place un moratoire (lire notre article du 21 mars). Les concertations prévues dans ce cadre avec l'ensemble des acteurs, groupes par groupes (metteurs en marchés, association d'élus, etc.) ont presque toutes été conduites. "Cela fait deux semaines qu'elles se déroulent et elles se termineront ce vendredi", indique le cabinet de la ministre. Lequel prévoit "d'utiliser les 2 à 3 semaines qui suivent pour atterrir sur une position de compromis". Autre REP sur le métier, celle relative aux textiles, que la ministre entend réformer en urgence (lire notre article du 19 mai). "On a lancé les concertations il y a quelques semaines. L'objectif est d'avoir clarifié [la position] d'ici l'été", prévient le cabinet de la ministre.
• À très court terme, c'est au Parlement que pourrait s'activer la ministre, avec les discussions à venir de la très discutée proposition de loi Duplomb visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur (notamment ses dispositions relatives aux ouvrages de stockage d'eau), et celles toujours en cours sur la proposition de loi de simplification de la vie économique (lire notre article du 15 avril).