Orientation : des freins persistants pour les lycéens ruraux
Les études se suivent et se ressemblent : selon l'Afev, les lycéens des territoires ruraux éprouvent toujours des freins dans leurs choix d'orientation vers les études supérieures. À ces difficultés liées au territoire s'ajoutent celles liées au milieu social.

© Afev et Adobe stock
Les lycéens veulent très massivement poursuivre des études supérieures mais leurs ambitions sont modérées par leur environnement social mais surtout territorial. C'est ce que révèle une enquête de l'Afev (Association de la fondation étudiante pour la ville, qui accompagne dans leur parcours scolaire des enfants et adolescents fragiles par le mentorat), en partenariat avec Trajectoires Reflex, l'Unaf (Union nationale des associations familiales) et Rura, dévoilée le 24 septembre 2025 à l'occasion de la journée du refus de l'échec scolaire.
Menée auprès de 1.507 lycéens, cette enquête a cherché à élargir les conclusions de différentes études qui, ces dernières années, ont montré les difficultés d'orientation et de formation rencontrées par les jeunes ruraux.
Les jeunes ruraux plus inquiets pour l'orientation
Le premier constat est celui d'une orientation et d'une projection dans les études qui dépendent "surtout du milieu social". Si 35% des jeunes disent rencontrer des difficultés dans leurs apprentissages, l'Afev juge que "le lieu de vie ne semble pas jouer un rôle dans l'expression de ces difficultés scolaires". De la même manière, 61% des jeunes se sentent bien informés et accompagnés pour les études possibles après le lycée, et ce "peu importe le lieu de vie et l'origine sociale". Toutefois, les jeunes ruraux sont plus nombreux à faire part de leur inquiétude quant à l'orientation que les jeunes urbains (65% contre 55%).
Il est par ailleurs intéressant de noter que pour l'ensemble des répondants, les principales sources d'information liées à l'orientation sont principalement internet et les réseaux sociaux (28%), la famille (25%) et les professeurs (17%), loin devant les journées portes ouvertes (12%), les conseillers d'orientation (7%) ou les forums consacrés aux études ou à l'emploi (6%).
Les jeunes ruraux moins ambitieux
Une différence selon les milieux sociaux apparaît plus notable à l'heure de se projeter dans les études : quand 92% des enfants de parents diplômés d'un master ou d'un doctorat envisagent de poursuivre des études supérieures, seuls 73% d'enfants de parents sans diplôme ou détenteurs d'un CAP et BEP ont le même souhait.
D'autre part, les différences géographiques influencent le niveau d'études visé : les lycéens des plus grandes villes se projettent pour 46% en master contre seulement 38% des jeunes ruraux. À l'inverse, 23% des jeunes ruraux envisagent une filière courte permettant de s'insérer rapidement sur le marché du travail, contre 15% des jeunes citadins.
Attachement au territoire
Alors qu'on note un attachement au lieu de vie plus élevé chez les lycéens ruraux (85%) que chez les urbains (76%), ces jeunes ruraux sont aussi plus nombreux à envisager de quitter le domicile familial pour poursuivre leurs études (77% contre 59%). Logiquement, 17% des jeunes ruraux déclarent songer à partir de chez leurs parents sans en avoir l'envie, contre 9% des jeunes citadins.
Ces départs ressentis comme plus contraints chez les ruraux se doublent de problèmes de mobilité : quand les lycéens des villes déclarent à 87% qu'il est facile pour eux de se déplacer, ils ne sont que 55% parmi ceux habitant une commune rurale. Pour expliquer ces difficultés de déplacements, les lycéens concernés mettent en avant le fait qu'ils dépendent de leurs proches pour réaliser leurs trajets en voiture (80%), une fréquence de bus ou cars à proximité insuffisante (64%) ou des horaires de bus ou cars à proximité non adaptés (58%). Sans surprise, alors que 83% des jeunes des plus grandes villes mettent moins de trente minutes pour se rendre au lycée, ils ne sont que 65% parmi les répondants résidant dans une commune rurale.
Confiance en l'école
Enfin, alors que la croyance en une vie meilleure que celle de ses parents est plus répandue chez les lycéens des villes (36%) que des campagnes (25%), la confiance dans l'école est plus marquée chez les jeunes ruraux que chez les jeunes urbains (69% contre 62%). Et la différence est plus marquée encore chez ceux issus de classes populaires rurales (68% de confiance en l'école) que chez ceux issus classes populaires des villes (53%).
"Ces résultats, conclut l'Afev, montrent à quel point l'accompagnement des jeunes les plus fragilisés dans leurs parcours est indispensable, afin qu'ils ne soient pas entravés par une assignation sociale ou territoriale." Mais l'association prévient : "Cet accompagnement des trajectoires, à lui seul, ne suffit pas. Il doit aller de pair avec un investissement plus fort des politiques publiques de qualification et de revitalisation des territoires vulnérables – qu'il s'agisse des quartiers prioritaires urbains ou des espaces ruraux [et des] petites communes – notamment en termes d'offre éducative."