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PLFSS 2021 : le gouvernement fait voter une enveloppe supplémentaire de 2,4 milliards

L'Assemblée a entamé l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021. Olivier Véran a introduit, par amendement, une "réserve prudentielle" de 2,4 milliards pour les établissements de soins et médicosociaux pour faire face aux surcoûts attendus du fait de la reprise de l'épidémie de covid.

Après avoir adopté le projet de loi de finances en première lecture, l'Assemblée a entamé, à nouveau en première lecture, l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021. Un PLFSS totalement hors norme (pour son contenu, voir notre article ci-dessous du 29 septembre 2020), puisque après les 44,7 milliards de déficit de la sécurité sociale attendus sur 2020 – sous l'effet du Covid-19 et du Ségur de la santé –, le déficit 2021 devrait encore s'établir à 25,5 milliards. "Aurait dû" serait plus juste, puisque le gouvernement a annoncé successivement, depuis la présentation du projet de loi fin septembre, une enveloppe de 200 millions d'euros pour la CNSA afin d'aider les départements à financer des mesures de revalorisation pour les services d'aide à domicile (voir notre article ci-dessous du 19 octobre 2020) et, surtout, une enveloppe supplémentaire de 2,4 milliards pour les établissements de soins et médicosociaux.

Une "réserve prudentielle" de 2,4 milliards

L'annonce est venue d'Olivier Véran lors de l'ouverture de la discussion générale sur le PLFSS, le 20 octobre. Face à la reprise de la pandémie, le ministre des Solidarités et de la Santé a expliqué : "Nous faisons désormais face à une seconde vague qui touche l’ensemble de notre territoire. Son impact financier est difficile à estimer, mais il ne sera pas soutenable dans le cadre de l’Ondam à son niveau actuel. C’est la raison pour laquelle je peux vous annoncer que, par amendement, nous allons introduire une provision prudentielle de 2 milliards d’euros supplémentaires, qui va être ajoutée au PLFSS afin de nous assurer que les établissements de santé pourront couvrir les surcoûts et les pertes de recettes subies dans les prochaines semaines". A ces deux milliards s'ajoutent diverses mesures qui portent le total du "coup de pouce" à 2,4 milliards. L'amendement en question a été adopté le 21 octobre. Pour mémoire, ces 2,4 milliards s'ajoutent aux 10 milliards de majoration déjà prévus pour l'Ondam 2021 (objectif national des dépenses d'assurance maladie).

Olivier Véran a indiqué que cette "provision prudentielle" "sera déléguée en plusieurs temps et sera placée sous la responsabilité des agences régionales de santé – ARS –, qui l’alloueront au plus près de la situation des établissements". L'enveloppe comprend notamment les mesures annoncées par le Premier ministre afin de soutenir les agents engagés auprès des patients et des personnes accompagnées dans les établissements médicosociaux dans les prochaines semaines, qui risquent d'être tendues : survalorisation des heures supplémentaires, indemnisation des jours de congé non pris, accompagnement des ARS et des établissements dans la mobilisation des ressources humaines, afin de répondre aux besoins de la gestion de crise. S'imputent également sur cette enveloppe 100 millions pour permettre aux ARS de financer les mesures exceptionnelles qu’elles ont déjà prises pour faire face au retour de la pandémie, et 50 millions pour ouvrir – comme promis – 4.000 lits à la demande dès 2020 dans les hôpitaux.

Extension du congé d'adoption

Olivier Véran a également confirmé l’engagement de poursuivre, pendant la durée de la crise sanitaire, la couverture des surcoûts liés à cette dernière dans les établissements médicosociaux tarifés par l’assurance maladie avant de l'être par la branche autonomie, dont le principe de la création figure également dans le PLFSS 2021 (voir notre article ci-dessous du 29 septembre 2020).

Les autres mesures présentées par le ministre des Solidarités et de la Santé figuraient déjà dans le texte initial du PLFSS. Olivier Véran a notamment confirmé le lancement d'une mission, confiée au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM), sur la rénovation de l’Ondam. Outre l'accélération de la mise en œuvre des mesures de revalorisation des personnels et de prise en charge de la dette prévues par le Ségur de la santé, le ministre a également rappelé que les hôpitaux bénéficieront d'une enveloppe de 650 millions, au lieu des 150 millions initialement prévus, pour les "dépenses du quotidien" (petits investissements, petits travaux...), "de manière [...] que chaque soignant et chaque patient puisse constater au plus près la réalité du soutien public à l’hôpital". Cette enveloppe pourra être utilisée "à partir du mois de janvier".

Olivier Véran a également annoncé deux autres mesures nouvelles dans le domaine de la politique familiale, qui vont être introduites par amendement : l'extension de 10 à 16 semaines du congé d’adoption, "afin de laisser plus de temps aux parents adoptants pour tisser un lien durable avec leur enfant" et l’avancement du versement de la prime de naissance, "afin de mieux accompagner financièrement l’accueil de l’enfant à naître".

Des réactions plutôt mesurées

A l'exception d'une motion de rejet préalable – présentée au nom du groupe LR par Jean-Pierre Door, député du Loiret, jugeant que "tout ça n'est que de la dette pour nos enfants" –, la discussion générale n'a pas donné lieu à des échanges particulièrement vifs. Paradoxalement – malgré la hausse de l'Ondam de 12,4 milliards d'euros – les réactions les plus vives sont venues de certaines fédérations professionnelles. Dans un communiqué du 20 octobre, l'Uniopss, "salue les revalorisations salariales dans les Ehpad et les établissements de santé, prévues par le Ségur de la Santé". Mais elle estime que le PLFSS 2021 "ne semble pas avoir pris toute la mesure de l’impact de la crise sanitaire et de la crise sociale qui en découle". L'Uniopss "s’inquiète également d’une progression insuffisante des Ondam 'personnes en situation de handicap et personnes âgées', pour répondre aux besoins et aspirations des personnes, pour trouver des solutions nouvelles et créer une 5e branche autonomie à la hauteur des enjeux".

Du côté de la FHF, les critiques sont moins radicales. Dans un communiqué du 6 octobre, la Fédération s'inquiétait "face à un PLFSS illisible et qui ne semble pas tenir ses promesses". Mais le ton change après l'annonce d'Olivier Véran sur l'enveloppe supplémentaire de 2,4 milliards d'euros. Dans un communiqué du 21 octobre, la Fédération se félicite d'"un effort indispensable, attendu et demandé par la FHF". Pour Frédéric Valletoux, le président de la FHF, "cette augmentation est une nécessité pour consolider et sécuriser les établissements de première ligne. Cela participe d’un effort national auquel nous devons tous contribuer en respectant les gestes barrières".

Références : Assemblée nationale, projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, amendement n°2522 du gouvernement.