Rénovation énergétique : un fardeau français, entre urgence et complexité administrative
Entre attachement profond à leur logement et contraintes économiques croissantes, les Français peinent à s’engager pleinement dans la transition énergétique de l’habitat. Si leur foyer demeure un refuge essentiel, ils sont nombreux à juger leur logement inconfortable et peu écologique. Coût des travaux, hausse des factures et complexité des aides freinent leurs ambitions, plaçant la France parmi les pays européens les plus réticents à franchir le pas de la rénovation énergétique, selon l’Observatoire Cetelem de l’habitat 2025.
© Observatoire cetelem et Adobe stock
Alors que la transition énergétique de l'habitat est au cœur des politiques européennes, les ménages français se trouvent pris en étau entre un fort attachement à leur foyer et les difficultés financières et administratives qu'impliquent les travaux d'amélioration. Selon la deuxième vague de l’Observatoire Cetelem de l’habitat 2025 menée par Toluna Harris Interactive dans huit pays européens, la France affiche des spécificités notables, notamment un sentiment d'inconfort et une forte sensibilité au coût des travaux.
Un logement chéri mais peu confortable
L'étude, réalisée en mai 2025 auprès de 3.055 Français (parmi 12.574 Européens), montre tout d’abord que pour les ménages français, le logement reste un "refuge" dans un contexte de crises successives. L’attachement est élevé, touchant 86% des Français (contre 89% des Européens), et la satisfaction générale est forte (91%). Cependant, lorsqu’il s’agit de la qualité intrinsèque du logement, les Français se montrent plus critiques. Seuls 39% estiment leur logement "tout à fait confortable". Ce chiffre est le plus bas de l’échantillon européen, bien loin des 55% observés en Allemagne ou en Espagne. De même, la perception d'habiter dans un logement "écologique" est basse, n'atteignant que 13% des répondants français.
Face au choix d'un logement, les Français, à l’instar des autres Européens, placent le prix comme le critère principal. L'importance accordée à la facture énergétique annuelle et au sentiment de sécurité arrive en deuxième position des préoccupations, au même niveau que la surface du logement.
L'épée de Damoclès budgétaire
Sans surprise, le budget logement reste sous forte pression. Au cours des 12 derniers mois, 81% des Français ont vu la part de leur budget consacrée aux factures d’électricité, de gaz ou de fuel augmenter. Cette hausse est un moteur puissant de changement, puisque 67% des Français envisagent de modifier leurs habitudes de vie pour mieux gérer leur consommation énergétique au cours des 12 prochains mois, soit le taux le plus élevé des 8 pays étudiés.
Pour les propriétaires français ayant l'intention de réaliser des travaux, l'objectif principal est clair : 44% souhaitent avant tout réaliser des économies. Ce critère devance de loin l'amélioration du confort (19%) ou la réduction de l’impact environnemental (9%). Le coût est d'ailleurs le facteur numéro un dans le choix des travaux à engager, cité par 49% des répondants français comme critère prioritaire absolu.
Les aides et la barrière de la complexité
La difficulté à financer les travaux conduit à des renoncements fréquents. Parmi les propriétaires ayant dû abandonner des projets d’aménagement ou de travaux visant l'efficacité énergétique, 68% en France citent des raisons financières. Ce taux est le plus élevé d'Europe, l'ensemble des 8 pays se situant à 58% en moyenne.
Si les propriétaires français misent principalement sur leurs économies ou leur épargne (49%) pour financer leurs travaux, le recours aux aides publiques est également envisagé ou activé (22%). Néanmoins, l'efficacité des dispositifs d'aide est remise en question.
Concernant les aides financières de l'État ou des organismes publics (primes, crédits d’impôt), une proportion significative de répondants les juge "trop complexes à comprendre" (43%). Ce pourcentage est nettement supérieur à la moyenne des 8 pays (26%).
En outre, seulement 46% disent avoir entendu parler avec précision des réglementations visant à améliorer l'efficacité énergétique des logements (telles que les obligations de performance minimale pour la location), un niveau inférieur à l'Italie (55%) ou la Pologne (52%). Ce manque de lisibilité réglementaire et administrative s'ajoute aux préoccupations budgétaires, créant un environnement peu propice à l'engagement massif dans la rénovation énergétique.