Congrès des maires – Nouvelles recettes, chasse aux coûts : les communes aux budgets serrés ne sont pas sans solutions
Avec la perspective de nouvelles ponctions sur leurs budgets dès la première année du prochain mandat, le quotidien des futurs maires et présidents d'intercommunalité ne s'annonce pas tout rose. D'ores et déjà, les collectivités peuvent établir un diagnostic et utiliser des leviers pour tenter de dégager des marges financières qui seront utiles au maintien ou au développement des projets locaux au cours des six années à venir. Et les solutions sont multiples, tant en recettes qu'en dépenses, comme a essayé de le montrer ce 19 novembre un forum organisé dans le cadre du Congrès des maires.
© Aurélie Roudaut/ Thomas Rougier et Éric Barbier
"Le premier conseil à donner aux maires (…), c'est d'avoir une connaissance actualisée et précise de la situation financière de leur collectivité", a suggéré Éric Barbier, chef du service des gestions publiques locales à la direction générale des finances publiques (DGFIP) à l'occasion de cette rencontre. "C'est indispensable", a-t-il dit, "pour déterminer les bons niveaux d’autofinancement brut et d’endettement durant le mandat". Les collectivités peuvent obtenir cet état des lieux en s'adressant au conseiller aux décideurs locaux compétent localement (il s'agit d'un cadre de la DGFIP). Auprès de ce dernier ainsi que des services compétents de la direction, les collectivités peuvent obtenir d'autres offres s'agissant de la maîtrise des risques financiers, de la connaissance de l'actif, ou du recouvrement des recettes locales.
"Réinterroger la tarification"
Dans ce domaine, des avancées ont été annoncées en ce qui concerne la dématérialisation des factures locales. En effet, la dématérialisation des avis de sommes à payer (Asap) devrait être généralisée "prochainement". "Cela peut être une source d’économies aussi pour les collectivités locales" qui pourront "centraliser les éditions et l’affranchissement", a soutenu l'expert de Bercy. C'est aussi en partenariat avec la DGFIP que les collectivités dotées d'observatoires fiscaux peuvent œuvrer à contrôler et enrichir leurs bases fiscales, et ainsi engranger des recettes de fiscalité supplémentaires. Le conseiller aux décideurs locaux peut par ailleurs réaliser à la demande des élus locaux des simulations concernant des scénarios d'évolution des taux d'un ou plusieurs impôts locaux. Mais, "s'il y a encore des marges sur la fiscalité, le conseil c'est d'y aller avec prudence" dans un contexte de prélèvements ressentis comme élevés par les contribuables, a estimé Éric Barbier.
"Souvent, on oublie les recettes non fiscales", a-t-il aussi constaté, en invitant les élus locaux à "réinterroger la tarification", ainsi qu'à "s'intéresser au coût de revient" et au "coût de la gratuité". Mais quand le "tissu social" du territoire est "fragile", "comment augmenter la tarification ?", s'est interrogée une représentante de l'outre-mer présente dans la salle.
Une commande publique plus économe des deniers
Autant le représentant de la DGFIP que les élus locaux ont insisté sur la possibilité de dégager d'importantes économies en matière d'achat public. Le premier a insisté sur la nécessaire poursuite de la "professionnalisation" et de la "mutualisation" de cette fonction, tandis que les seconds ont mis l'accent sur la simplification des procédures. Pointant des coûts probablement supérieurs de 20% en lien avec la commande publique, Emmanuel Sallaberry, maire de Talence et coprésident de la commission finances et fiscalité locales de l'AMF, a plaidé pour un relèvement des seuils de passation des marchés publics. "Les normes, les assurances, les aléas, l’intervention de toute une série de bureaux d’études, de contrôles" renchérissent le coût des investissements, a déploré de son côté Fabrice Loher, maire de Lorient. La construction d'une école "coûte aujourd’hui à peu près deux fois plus cher qu’il y a dix ans", a abondé son collègue de Talence.
Dans leur recherche de financements nouveaux, l'intercommunalité est un acteur central pour les communes, en ce qu'elle est le lieu à la fois de la mutualisation et de la solidarité financière. Et ce, parfois, grâce à des moyens renforcés. La communauté de communes de Nozay (Loire-Atlantique) a par exemple décidé avec les communes sur le territoire desquelles une zone d'activité intercommunale est implantée, que celles-ci lui reversent 90% du produit de la taxe foncière payée par les entreprises. S'agissant de la taxe d'aménagement, le reversement est intégral, comme l'a expliqué Claire Théveniau, la présidente. La communauté de communes a de ce fait les moyens de financer les investissements structurants et d'aider les communes au financement de leurs projets (via des fonds de concours et une dotation de solidarité communautaire).
Subventions : la fin d'un âge d'or ?
Il convient de passer du "développement permanent" où "on empile les choses" à une stratégie d'"enveloppement" qui consiste à "investir sur les biens communs" (eau, énergie, sol) et optimiser l'usage des bâtiments publics - telles les écoles qui sont fermées la moitié de l'année -, a mis en avant de son côté Michel Bisson, président de la communauté d’agglomération de Grand Paris Sud (Essonne). En conseillant aussi de rechercher des financements privés en complément de ceux de nature publique.
Une piste à suivre dans la mesure où les subventions (État, région, département…) pourraient s'amenuiser, voire se tarir. Le risque a été pris très au sérieux par Emmanuel Sallaberry et Philippe Laurent, maire de Sceaux et président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT). Ce dernier a par ailleurs estimé que les collectivités ne pouvaient pas faire l'impasse sur un effort pour accroître la rémunération de leurs agents - faible pour beaucoup - en raison des tensions sur l'emploi.