Déclassement de la protection du loup : vers un basculement sur le régime déclaratif pour les tirs de défense
Emboîtant le pas au déclassement du statut de protection du loup au sein de l’Union européenne, l'Etat a annoncé une évolution dès 2026 du dispositif de tirs de défense, permettant aux éleveurs en zone de prédation d’y recourir sur simple déclaration. Une consultation publique s’est par ailleurs ouverte, ce 24 septembre, pour traduire au niveau réglementaire les nouvelles modalités de gestion de l’espèce.

© Adobe stock
A compter de 2026, la réglementation nationale inclura "une simplification significative" des conditions d’accès aux "tirs de défense" pour protéger les troupeaux, avec "la suppression, dans les territoires exposés à la prédation, du régime d'autorisations dérogatoires au profit d'un système déclaratif", a annoncé, ce 23 septembre, dans un communiqué Fabienne Buccio, préfète de la région Auvergne-Rhône-Alpes et coordinatrice du Plan national d'actions sur le loup (PNL). Le président de l’Association nationale des élus de la montagne (Anem), Jean-Pierre Vigier, a immédiatement salué "ce pas important vers une meilleure sécurisation des troupeaux", conforme aux propositions portées par l’association. Cette mesure de simplification, qui suscite l'ire des défenseurs de la faune sauvage, fait suite aux échanges au sein du Groupe national loup (GNL), qui s’est réuni à Lyon ce même jour, pour discuter des perspectives qu'offre ce changement de statut de protection du loup. Le Conseil de l'Union européenne a acté, début juin, la proposition de la Commission visant à "déclasser" le loup d'"espèce strictement protégée" à "espèce protégée", donnant ainsi plus de marge de manoeuvre aux Etats pour gérer les populations de loups et donc faciliter les tirs.
Une traduction réglementaire du reclassement du loup
Le gouvernement n’a pas tardé à mettre à exécution cette évolution. Une consultation publique s’est ainsi ouverte, ce 24 septembre, sur un projet de décret portant diverses dispositions relatives aux mesures de protection des espèces animales non domestiques - dont le loup - et végétales non cultivées. Il s’agit de préparer le terrain - via une "mise en cohérence" des articles L.411-1, L.411-2 et R.411-3 du code de l’environnement - pour permettre de procéder en droit français aux modifications du statut de l’espèce et définir les règles de sa gestion. S’agissant plus particulièrement du loup, une nouvelle consultation doit s’ensuivre concernant l'arrêté cadre interministériel fixant les nouvelles modalités de gestion de l’espèce dans le cadre de son reclassement. "Sa destruction restera mise en œuvre dans le cadre de la défense des troupeaux", est-il précisé. Seuls les tirs en cas d'attaque sont et resteront légaux en 2026. Hors de ce cadre, tuer un loup demeurera un "délit passible d'une peine de prison et d'une lourde amende", a également relevé Jean-Paul Celet, préfet référent pour la conservation du loup. Plusieurs axes du dispositif sont conservés, et ce "eu égard aux obligations qui perdurent en matière de conservation de l’espèce". C’est le cas du plafond de destructions national (de 19%) établi à partir de l’estimation annuelle de la population de loups. Les éleveurs sont donc partagés entre satisfaction et colère. La Fédération nationale ovine (FNO) se félicite de "l’avancée sur le protocole de tirs" mais "alerte sur l’urgence d’aller plus loin". "Il reste encore des points à négocier. En particulier, le relèvement du taux de prélèvements, qui est insuffisant au regard de la pression réelle subie par les éleveurs", remarque Claude Font, éleveur de brebis en Haute-Loire et référent du dossier prédation pour la FNO.
25% d’attaques en plus en 2025
A ce jour 146 loups ont été tués sur un plafond de 192 prélèvements autorisés pour l’année 2025. Le préfet référent a écarté à ce stade toute hausse du plafond fixé à 19% de l’effectif moyen de loups estimé annuellement, "l'un des taux les plus élevés d’Europe", selon lui. Mais sur ce point de "vigilance forte" le cabinet de la préfète coordinatrice fait valoir une marge de manœuvre "dans la limite de 2% supplémentaire". D’autant que l'installation du loup dans de nouveaux territoires accentue le nombre d’attaques enregistrées en 2025 (+25%). Pour y faire face des "propositions d’orientations" sont également sur la table comme l’expérimentation de clôtures adaptées à des spécificités territoriales, la révision de la méthode d’indemnisation des pertes indirectes (avortements, baisses de lactation, moindre prise de poids, etc.) ou l’organisation d’opérations ciblées de prélèvement en cas de hausse soudaine de prédation. "(…) le gouvernement prétexte cette évolution du statut pour ouvrir les possibilités de destruction tous azimuts de loups, sans possibilité effective de contrôler le nombre d’individus tués", s’est indigné un collectif de six organisations de protection de la nature, dont le WWF et France Nature Environnement (FNE), manifestant sa désapprobation par un boycott de la réunion du GNL. "L’Etat indique qu’il maintient un plafond annuel du nombre maximum de loups pouvant être tués. Mais il est dans l’incapacité de dire comment il pourra contrôler les destructions de loups, et donc très concrètement les moyens de faire respecter ce plafond annuel", fustigent-elles. Selon, une étude récente réalisée par le CNRS, le Muséum et l’Office Français de la Biodiversité, que l’Etat "refuse de publier", selon elles, la population de loups est aujourd’hui "au seuil de mortalité supportable", insiste leur communiqué.