Depuis dix ans, la mixité sociale est stable dans les collèges

La mixité sociale dans les collèges a peu évolué au niveau national ces dix dernières années, selon une note de la Depp. Ce constat est toutefois à nuancer. La ségrégation sociale des collèges est plus forte dans les départements les plus urbains. Les écarts sociaux se creusent aussi entre collèges publics et privés. 

On savait depuis la publication inédite de leurs indices de position sociale (IPS) à l'automne 2022 que les collèges avaient des compositions sociales très différentes d'un département à l'autre. Une note d'information de la Depp (direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l'Éducation nationale) publiée le 14 mai 2024 le confirme. Mais elle affirme également qu'au niveau national, la mixité sociale entre collèges a peu varié au cours du temps, même si cette stabilité masque des évolutions plus marquées selon le secteur d'enseignement et les territoires.

La Depp écrit qu'"à l'échelle nationale, la ségrégation sociale entre collèges a relativement peu varié depuis 2014". Cette stabilité est, pour les auteurs de l'étude, le résultat de deux évolutions contraires. D'un côté, après une période de stagnation, la ségrégation sociale a baissé depuis 2018 dans les collèges publics mais aussi dans les collèges privés. D'un autre côté, les écarts de composition sociale entre secteurs public et privé se sont creusés, le secteur privé scolarisant de plus en plus d'élèves de milieu "favorisé". Sur le temps long, cette tendance est particulièrement marquée. Ainsi, alors que la proportion d'élèves de milieu "très favorisé" entrés en sixième était en 1989 de 10,9% supérieure dans les collèges privés sous contrat à celle observée dans les collèges publics, elle est passée à 15,2% en 2009, puis à 20,6% en 2023. 

Indice d'entropie

Pour évaluer les écarts de milieu social entre collèges, la Depp s'appuie par ailleurs sur l'indice d'entropie, lequel varie de 0 à 1. S'il est élevé, la diversité sociale est faible, s'il est bas, les écarts de composition sociale sont proches de celle du territoire. Or, en 2014 et 2023, l'indice d'entropie totale affiche exactement le même résultat : 0,0985. Dans les collèges publics, il passe en dix ans de 0,0759 à 0,0710, ce qui correspond à une légère diminution des écarts sociaux. Le même phénomène s'observe dans les collèges privés, où l'indice passe de 0,1068 à 0,0995 sur la période. En revanche, les écarts sociaux se creusent entre collèges publics et privés, puisque l'indice d'entropie entre ces deux catégories d'établissements qui était en 2014 de 0,0174 s'établit en 2023 à 0,0231.

Les écarts se creusent au sud

Cette stabilité globale cache encore, nous apprend la Depp, des disparités géographiques : "La ségrégation sociale des collèges est plus forte dans les départements les plus urbains." Ainsi, en métropole, l'indice de ségrégation sociale est au plus haut dans les Hauts-de-Seine, à Paris et dans les Bouches-du-Rhône. Autrement dit, les composantes de la ségrégation "tendent à être plus élevées lorsque le degré d'urbanisation est plus fort" et une plus forte ségrégation résidentielle se traduit dans la composition sociale des collèges publics et privés. Dans ces territoires urbains denses, la proximité et le nombre des collèges "exacerbent" la concurrence entre établissements et "peuvent inciter" les familles de milieu social favorisé à recourir à un collège privé. 

Dans le temps, on observe que la ségrégation sociale a diminué de façon plus sensible dans une vingtaine de départements majoritairement situés dans le nord et l'ouest. À l'inverse, dans une vingtaine de départements, plutôt situés dans la moitié sud, la ségrégation sociale a augmenté, avec une hausse marquée des écarts de composition sociale entre secteurs public et privé. Pour la Depp, ces tendances pourraient s'expliquer par des politiques différentes en matière de mixité sociale et des différences de positionnement du secteur privé ou de contexte démographique.