Énergie, environnement, transports : les grands chantiers d'Élisabeth Borne

Après sa nomination express le 16 juillet comme ministre de la Transition écologique et solidaire, en remplacement de François de Rugy, Élisabeth Borne va devoir affronter une rentrée particulièrement chargée. Projet de loi d'orientation des mobilités, fiscalité écologique, projet de loi pour une économie circulaire, biodiversité, gestion de l'eau… : revue de détail des grands chantiers en cours.

Après les démissions de Nicolas Hulot en septembre dernier puis de François de Rugy le 16 juillet, Élisabeth Borne, déjà ministre des Transports, a hérité du portefeuille de la Transition écologique et solidaire et des lourds dossiers qui vont avec. D'autant que lors de sa déclaration de politique générale le 12 juin dernier, Édouard Philippe a bien insisté sur les enjeux : "les douze prochains mois seront ceux de l'accélération écologique", a assuré le Premier ministre. Mais son souhait de voir adoptés "avant l'été" les projets de loi d'orientation des mobilités (LOM) et sur l'énergie et le climat n'a pas été exaucé.

Nouveau tour de piste pour la LOM

La commission mixte paritaire (CMP) réunie le 10 juillet a échoué à trouver un compromis sur le premier. Les discussions ont achoppé sur le volet financement de la nouvelle compétence d'"autorités organisatrices de la mobilité" attribuée aux communautés de communes. Face à l'impatience des acteurs de la mobilité, Élisabeth Borne va donc devoir passer la vitesse supérieure pour que le texte, qui devrait revenir le 10 septembre à l'Assemblée nationale, soit bouclé avant la fin de l'année. En parallèle, la question de l'avenir des petites lignes ferroviaires risque de revenir sur le devant de la scène, lorsque le préfet François Philizot aura remis les conclusions de sa mission.

Projet de loi Énergie et Climat : en attendant le PLF

Sur le projet de loi Énergie et Climat, députés et sénateurs sont parvenus à un accord en CMP le 25 juillet et le texte qui reviendra à l'Assemblée le 16 septembre n'aura plus besoin que d'une lecture dans chacune des deux chambres pour être définitivement adopté. Mais critiqué dès le départ par les associations environnementales pour son manque d'ambition, il n'a pas non plus convaincu le Collectif sénatorial d'urgence climatique, dont quatre membres ont participé à la CMP. "Au-delà de cette déception globale, y compris les reculs de la CMP sur les objectifs de développement des énergies renouvelables, nous savons tous que c’est bien en loi de finances que se dessine la réelle ambition de la politique énergétique et climatique. Notre collectif sera donc particulièrement vigilant sur les propositions que l’État portera lors du prochain PLF", a-t-il prévenu.

Fiscalité environnementale : sujet toujours sensible

La fiscalité environnementale, qui avait servi d'élément déclencheur à la crise des gilets jaunes à l'automne dernier, ne manquera pas d'animer les débats de la rentrée. Pour financer les infrastructures de transport, François de Rugy, encore ministre de la Transition écologique et Élisabeth Borne, en sa qualité de ministre des Transports ont annoncé début juillet, lors du deuxième Conseil de défense écologique, deux nouvelles mesures qui ont déjà fait grincer des dents. La première est une écocontribution sur le transport aérien au départ de la France qui pourrait être mise en place dès 2020, l'autre une réduction de deux centimes d'euros par litre du remboursement partiel de taxation sur le gasoil dont bénéficie le transport routier de marchandises. Comme il avait tenté de le faire dans le PLF 2019, l'exécutif pourrait aussi revenir à l'offensive sur la suppression progressive de la niche dont bénéficient certains secteurs concernant le gazole non routier. Autre mesure très attendue dans le prochain budget : la remise à plat du crédit d'impôt transition énergétique (CITE). L'idée est de le transformer en prime pour cibler davantage les ménages modestes et donner ainsi un coup de pouce aux travaux de rénovation énergétique qui peinent à être engagés. Des propositions de nature législative et réglementaire pour atteindre la neutralité carbone sont aussi attendues dans le cadre de la "convention citoyenne" qui se tiendra en septembre et sera composée de 150 personnes tirées au sort.

Arrivée au Parlement du projet de loi sur l'économie circulaire

La rentrée sera aussi marquée par l'arrivée au Parlement du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire préparé par la secrétaire d'État Brune Poirson. Examiné en séance publique au Sénat à partir du 24 septembre, le texte prévoit notamment d'interdire l'élimination des invendus non alimentaires, de déployer un système de consigne pour lutter contre la pollution des plastiques, d'élargir les filières de responsabilité élargie du producteur (REP) à des produits comme les jouets, les lingettes, les cigarettes, les articles de sport et loisir, de bricolage et de jardinage. L'éco-conception et une meilleure information des consommateurs font également partie des mesures phares du texte, qui compte en outre améliorer la gestion des déchets issus de la construction et mieux lutter contre les dépôts sauvages.

Mise en place de l'OFB et lutte contre l'artificialisation des sols

Autre dossier à suivre : la mise en place de l'Office français de la biodiversité (OFB), né de la fusion de l'Agence française pour la biodiversité (AFB) et de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Environ 2.700 agents vont être regroupés dans un même établissement, qui devrait permettre, selon le ministère, de "renforcer l'efficacité des politiques publiques de l'eau et de la biodiversité, notamment dans leur dimension territoriale". Alors que le plan Biodiversité lancé il y a un an a encore du mal à se concrétiser, le gouvernement compte fixer dans les prochains mois la trajectoire permettant d'atteindre l'objectif "zéro artificialisation nette", qui figurait en bonne place dans ce plan. Après la remise d'un rapport de France Stratégie, il a annoncé le 23 juillet l'installation d'un groupe de travail. Composé de représentants de la société civile, d'aménageurs, d'ONG, de parlementaires et d‘associations d’élus, il devra identifier les mesures opérationnelles permettant d'enrayer le phénomène d'artificialisation des sols.

Eau : de plus en plus de tensions sur la ressource

Après la clôture du second volet des Assises de l'eau, le 1er juillet, qui a donné lieu à des mesures visant à donner davantage de moyens aux collectivités pour tirer parti d'outils existants ou en expérimenter de nouveaux, les tensions sur la ressource restent un sujet de préoccupation majeure du fait de la sécheresse qui touche actuellement la majeure partie du territoire. Selon le site Propluvia, 79 départements faisaient l'objet de restriction d'eau au 31 juillet. La situation est particulièrement difficile pour les agriculteurs. À l'issue du dernier comité de suivi hydrologique qui s'est tenu le 23 juillet, en pleine canicule, Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès de la ministre de la Transition écologique, a lancé "un appel au civisme" pour éviter de gaspiller l'eau. Didier Guillaume, le ministre de l'Agriculture, a pour sa part annoncé le 29 juillet la mise en place de nouvelles mesures d'aide aux agriculteurs, dans l'attente de l'activation du dispositif des calamités agricoles. 27 départements supplémentaires ont obtenu la "dérogation pour cas de force majeure", une disposition qui permet aux éleveurs concernés par un manque de fourrage de valoriser leurs jachères. Cette annonce a porté à 60 le nombre de départements bénéficiant de cette dérogation fin juillet. À plus long terme, se pose la question de la gestion quantitative de l'eau. Face aux sénateurs le 23 juillet, Didier Guillaume s'est dit favorable à une proposition de loi qui permettrait de faciliter les retenues d'eau pour l'irrigation alors que ces projets sont régulièrement attaqués devant les tribunaux administratifs. Un sujet à haut risque face à des associations environnementales toujours très mobilisées sur le sujet.

 

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