IS-ICOPE : un projet pour aider à vieillir en bonne santé en Isère (38)

Détecter les fragilités liées au vieillissement et permettre à chacun de garder son autonomie le plus longtemps possible : voilà l’objectif d’IS-ICOPE. Une initiative née d’un partenariat entre le Centre hospitalier universitaire (CHU) de Grenoble Alpes, le département de l’Isère et La Poste. Inspiré du modèle ICOPE (Integrated care for older people, ou soins intégrés pour les personnes âgées en français) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), IS-ICOPE vise à dépister précocement les fragilités chez les personnes de 60 ans et plus, grâce à une application mobile gratuite et intuitive : Digicope. Le programme est enrichi d’actions d’accompagnement des personnes dans cette démarche.

Au-delà des six fonctions essentielles identifiées par l'OMS (mobilité, nutrition, humeur, mémoire, audition, vision), une septième dimension a été ajoutée dans le dispositif isérois : la situation sociale. « Une notion qui n’a, pour le moment, été intégrée que par notre département », souligne Delphine Hartmann, vice-présidente du département de l'Isère. Une dimension qui s'est avérée essentielle puisque 51 % des personnes inscrites dans le programme ont exprimé un besoin en lien avec leur isolement ou un recours au droit. 

Le facteur, acteur essentiel 

L'une des innovations majeures du dispositif repose sur l'implication des facteurs de La Poste. « Nous avons souhaité profiter de la confiance et de la relation de proximité qu’ils installent avec les gens pour promouvoir le projet et accompagner les seniors dans la réalisation du test via l’application Digicope », explique Bérengère Ray, déléguée au développement régional du groupe La Poste.

Deux types de facteurs ont été mobilisés : les facteurs de tournée, qui sensibilisent les personnes lors de leur passage, et les facteurs experts, spécialement formés par le CHU pour aider les utilisateurs à réaliser le test de dépistage. Une méthodologie éprouvée, qui a non seulement facilité l’accès au dépistage pour les personnes peu à l’aise avec les outils numériques, mais a aussi permis de toucher un public qui ne se serait pas spontanément tourné vers des spécialistes. Au total, 150 facteurs de tournée et 15 facteurs experts ont été formés en Isère, dans le cadre de cette expérimentation.

Agir concrètement sur la santé et le bien-être

En cas de fragilité détectée, les données sont ensuite transmises de manière sécurisée aux professionnels de santé ou sociaux. « Le postulat du CHU était de préserver les professionnels de santé pour qu’ils puissent davantage se focaliser sur l’évaluation approfondie, qui est vraiment d'ordre médical. » À la suite de cette évaluation, un suivi personnalisé est proposé afin d’agir concrètement sur la santé et le bien-être de la personne testée.

Pour le Professeur Gaëtan Gavazzi, chef du service gériatrie du CHU de Grenoble, « la prévention est essentielle ». « Dans deux à trois ans, les baby-boomers auront 80 ans, un âge à fort risque de dépendance. Cela représentera près de 200 000 personnes supplémentaires à accompagner chaque année. Si on veut pouvoir continuer à prendre en charge les plus jeunes, chacun doit se faire suivre au plus tôt pour rester autonome et en bonne santé le plus longtemps possible », insiste-t-il.

Des résultats probants et un déploiement ambitieux

Après deux années d'expérimentation dans la communauté de communes du Grésivaudan et à Grenoble, le bilan est très positif avec 510 dépistages réalisés. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 88 % des personnes dépistées présentent au moins une fragilité avérée, tandis que 87 % ont mis en œuvre les conseils reçus, et déclarent en percevoir les bienfaits. « Même si à 60 ans, on se dit que tout va bien, il peut déjà y avoir des débuts de fragilité qui s'installent et que l’on peut repérer grâce au questionnaire IS-ICOPE. »

Fort de ce succès, l’ambition est de déployer le programme à l’échelle départementale sur la période 2025-2027, avec l’objectif de toucher 11 000 personnes. « L’enjeu est d’acculturer la population à ce dispositif, en l’incitant à se dire ²c’est utile de m’auto-évaluer. Si tout va bien, je recommencerais dans un an. Et si quelque chose ne va pas, je consulte un professionnel de santé² », conclut le Pr Gavazzi.