Expérimentation sur le financement des Ehpad : les règles de rétro-compensation par les départements à l’État bientôt édictées
L'expérimentation impliquant la fusion des sections soins et dépendance se déploie dans 23 départements depuis le 1er juillet 2025, jusqu'au 31 décembre 2026. La prise en charge par la sécurité sociale de la section dépendance, qui sera versée aux établissements au sein d’un forfait unique soins-dépendance, implique que les départements concernés se voient retirer les recettes afférentes à la dépendance. Le projet de décret précisant les règles de fixation du montant à reverser a reçu un avis favorable du comité des finances locales. Le mode de calcul favorise les départements ayant fixé, ces dernières années, un point de GIR supérieur au premier quartile de la distribution nationale des valeurs du point.

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L’expérimentation d’un nouveau régime de financement des Ehpad, mais aussi de certaines petites unités de vie (PUV) et des établissements de santé autorisés à dispenser des soins de longue durée (USLD), impliquant la fusion des sections soins et dépendance et la mise en place d’un forfait global unique (FGU) versé par la sécurité sociale (la branche Autonomie pour les Ehpad et la branche Maladie pour les USLD) selon un forfait fixé par l’agence régionale de santé (ARS), a officiellement démarré le 1er juillet 2025 dans les 23 départements concernés *. La fin de cette expérimentation est programmée au 31 décembre 2026. Le projet de décret précisant les règles de fixation du montant à reverser – ou "rétro-compensation" - par les départements à l’État ou à la sécurité sociale "en contrepartie du transfert de charges" a fait l’objet d’un avis favorable par le comité des finances locales (CFL) le 22 juillet 2025. Le texte devrait donc être prochainement publié. Il complétera le décret en Conseil d’État du 20 février 2025, publié au Journal officiel du 22 février 2025, relatif au financement des établissements participant à l’expérimentation.
Convergence à la hausse du point GIR : un coût de 30 millions d’euros pour l’État
L’article 1 fixe les modalités de plafonnement de la rétro-compensation des départements expérimentateurs, ce qui permet de réduire le montant de cette dernière pour les départements ayant fourni ces dernières années un effort particulier sur la valeur du point GIR (groupe iso-ressources, correspondant au niveau de perte d’autonomie des personnes âgées). Ces modalités sont "issues des concertations entre le gouvernement et les départements lors du premier trimestre 2024", selon la note de la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS, ministères sociaux) adressée aux membres du CFL. Les montants des dépenses d’APA en établissement (APA-E) des années 2022 à 2024 sont pris en compte pour le calcul de la rétro-compensation et un plafond de 7,34 euros de valeur du point GIR est fixé – ce qui correspond au premier quartile de la distribution nationale des valeurs de point GIR constaté en 2024 par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Cela signifie que, pour chaque année considérée, ce montant est pris en compte pour le calcul des dépenses des départements qui avaient utilisé une valeur de point GIR supérieure à 7,34 euros – ce qui diminue donc le montant global qu’ils sont tenus de reverser. Pour les départements qui avaient fixé des montants de point GIR inférieurs à ce plafond, ces derniers sont "repris en l’état".
Concernant la valeur du point GIR qui sera utilisée pour le forfait global versé par la sécurité sociale aux Ehpad dans les départements expérimentateurs, il est fixé à 7,84 euros, soit une convergence à la hausse destinée à réduire les disparités territoriales de financement des établissements. Le coût pour l’État de cette convergence est de 30 millions d’euros, selon une fiche d’impact réalisée par la DGCS.
Le solde de rétro-compensation sera prélevé sur la taxe spéciale sur les conventions d’assurance
Le temps de l’expérimentation, les départements concernés ne toucheront plus l’APA-E qui sera déduite du concours versé par la CNSA – concours désormais global, depuis la réforme entrée en vigueur au 1er janvier 2025, qui comprend la compensation relative à l’APA, au tarif plancher des services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad) et aux revalorisations salariales dans les Saad. L’article 2 du décret examiné par le CFL prévoit les modalités d’imputation de la rétro-compensation sur le concours versé par la CNSA, mais un autre décret en Conseil d’État sur la réforme des concours précisera l’ajustement opéré au titre de l’article 81 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2025 visant à prendre en compte les effets de cette réforme.
Le montant du solde de rétro-compensation pour chaque département expérimentateur, après imputation sur le concours APA, sera couvert par une reprise de recettes de taxe spéciale sur les conventions d’assurance, selon l’article 132 de la LFSS. Ces montants seront publiés par arrêté.
L’article 3 du décret précise les données devant être transmises par les départements concernés à la CNSA avant le 30 septembre 2025, pour le calcul des rétro-compensations, ainsi que les données demandées aux départements et aux ARS, à compter de l’exercice 2025, pour l’évaluation de l’expérimentation.
Par ailleurs, chaque département expérimentateur devra continuer à verser l’APA-E pour ses ressortissants vivant en Ehpad dans un autre département n’ayant pas rejoint l’expérimentation. Les montants versés à ce titre seront remboursés en totalité au département par la CNSA, selon des modalités – dont un versement d’acompte – décrites également à l’article 3 du décret. Dans le sens inverse – accueil dans un établissement situé dans un département expérimentateur d’une personne ayant son "domicile de secours" dans un département non-expérimentateur -, l’APA-E afférente ne sera pas reversée à la sécurité sociale, ce qui représentera donc une économie pour les départements concernés.
*Les 23 départements expérimentateurs sont l’Aude, le Cantal, la Charente-Maritime, la Corrèze, les Côtes-d’Armor, la Creuse, le Finistère, la Haute-Garonne, les Landes, le Lot, le Lot-et-Garonne, le Maine-et-Loire, la Haute-Marne, la Mayenne, le Morbihan, la Nièvre, le Pas-de-Calais, les Pyrénées-Orientales, la Métropole de Lyon, la Savoie, la Seine-Saint-Denis, la Guyane et la Réunion.