Le nombre de fermes en bio diminue pour la première fois, mais "ce n'est pas le grand basculement"

La consommation en bio, fortement impactée par l'inflation en 2021, reprend des couleurs. Pourtant, et c'est une première, le nombre de producteurs en bio baisse entre janvier et août 2025. Les chiffres de l'Agence Bio récemment publiés témoignent d'un nombre d'arrêts plus importants que de nouvelles installations depuis janvier 2025.

"C'est plutôt un mauvais signal, mais 165 sur plus de 60.000 producteurs, ce n'est pas non plus le grand basculement !" Loïc Madeleine, coprésident de la Fédération nationale d'agriculture (Fnab), temporise la baisse du nombre de fermes en bio enregistrée sur les huit premiers mois de l'année. Pour la première fois, il y a eu plus d'arrêts que de nouvelles installations en bio depuis entre janvier et août 2025, selon le dernier baromètre du moral des agricultrices et agriculteurs bio de l'Agence Bio, publié à l'occasion de la dixième édition de Tech&Bio organisé à Bourg-lès-Valence, les 24 et 25 septembre. L'agence comptabilise ainsi 2.696 entrants et 2.861 sortants, soit un solde négatif de 165 producteurs bio. Pas de quoi se réjouir, mais "quand on regarde la baisse du nombre de producteurs non bio, on voit qu'elle est bien pire", relève le coprésident de la Fnab qui explique que ce chiffre ne dépend pas que des gens qui font machine arrière, mais aussi des personnes qui partent à la retraite retraite. "Quand une ferme change de main, on n'arrive pas toujours à la conserver en bio", explique-t-il.

La baisse du nombre de producteurs bio intervient alors que le bio reprend des couleurs après des années compliquées, dues à la crise inflationniste notamment.

Une progression de la consommation en bio qui se confirme

Le marché du bio avait progressé de manière continue jusqu'en 2020, avec une croissance particulièrement forte à partir de 2012, et après une année particulière en 2020, avec le Covid et les confinements, où les ventes ont augmenté de 10,2% en valeur. Puis le marché du bio s'est replié de 0,5% en 2021 puis de 4,6% en 2022 pour s'établir à 12,1 milliards d'euros en 2023. L'Agence Bio avait noté une amélioration en juin 2025 dans son bilan annuel, avec une progression de 0,8% en valeur des dépenses des ménages en bio (12,2 milliards d'euros) en 2024 par rapport à 2023, surtout dans les circuits spécialisés et la vente directe.

En juin 2025, les ventes avaient progressé de 6,5% dans les magasins spécialisés, qui représentent 29% des ventes) et de 7,4% en vente directe (13,5% des ventes). En revanche, la vente de produits bio était en repli de 5% dans la grande distribution. Elle reste faible dans la restauration hors domicile, pour atteindre seulement 3,3% dans la restauration collective, alors qu'un seuil de 20% de bio dans les cantines est imposé par la loi Egalim.

À mi-2025, la progression de la consommation de bio est toujours là, notamment en vente directe (+8,8% en chiffre d'affaires), en magasins bio (+6,2%) et dans la consommation à domicile (+4,1% en chiffre d'affaires). Même le bio en distribution progresse (+1,4%), c'est une première depuis 2021. Un bio consommé qui est à 82% produit en France (hors produits tropicaux).

Des agriculteurs bio majoritairement insatisfaits de leurs revenus

Si, malgré cette légère reprise, le nombre de surfaces bio ont reculé depuis deux ans (-2% à juin 2025, pour la deuxième année consécutive, moins 110.000 hectares de surfaces bio en deux ans, notamment des grandes cultures), "le nombre de producteurs avait augmenté jusqu'alors".

Cela dit, temporise l'Agence Bio, "bien que confrontés à un environnement économique et climatique difficile, les agricultrices et agriculteurs bio sont profondément attachés au bio". 93% se disent fiers d'être en bio et 86% estiment que le bio contribue à leur bien-être personnel. Ils sont toutefois 57% à être insatisfaits de leurs revenus, malgré une légère amélioration depuis 2023. "La majorité d'entre eux n'ont pas confiance en la politique (81%)", souligne aussi le baromètre. Ils attendent une communication renforcée auprès du public, sur le label bio, ses garanties et avantages, et une juste rémunération pour leurs produits et pour les services qu'ils rendent à la société.

"On est sur un plateau, explique Loïc Madeleine. Il faut dire qu'il y a des dispositifs qui ont disparu", comme l'aide au maintien à l'agriculture biologique, dans le cadre de la politique agricole commune (PAC), dont l'arrêt a été acté en 2017 et effectif en 2023, ou les paiements pour services environnementaux (PSE) abandonnés en 2023.

Des leviers pour soutenir l'agriculture biologique

Pour tenter de soutenir l'agriculture biologique, l'Agence Bio rappelle les leviers que l'étude prospective sur les trajectoires envisageables pour l'agriculture biologique d'ici 2040 identifie : un engagement plus fort aux niveaux européen et international, une meilleure information et éducation du public à l'alimentation et au bio, la prise en compte des coûts environnementaux dans les prix alimentaires, un soutien accru aux filières biologiques via la PAC, la recherche et la formation. L'institution estime qu'il faut aussi une gouvernance renforcée avec de meilleurs outils de suivi, une meilleure accessibilité des produits bio, et une présence accrue en grande distribution. 

Pour la Fnab, il faut en effet relancer la communication autour des bienfaits du bio mais aussi avoir des outils spécifiques, notamment dans le cadre de la PAC, pour reconnaître les bienfaits du bio sur la santé, l'eau, la biodiversité.

 

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