Environnement - L'Europe est encore loin d'avoir atteint ses objectifs environnementaux
"Notre analyse montre que les politiques européennes ont réussi à relever de nombreux défis environnementaux au fil des ans. Mais, dans le même temps, nos sociétés et économies continuent d'endommager les systèmes naturels et les services écosystémiques qui sous-tendent notre prospérité", constate Hans Bruyninckx, directeur exécutif de l'Agence européenne de l'environnement (AEE) dans l'introduction du rapport "L'environnement en Europe. Etat des lieux et perspectives 2015" publié le 2 mars. Ce document qui paraît tous les cinq ans et couvre 39 pays - les 28 membres de l'Union européenne plus l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, l'Islande, le Kosovo, le Liechtenstein, la Macédoine, le Monténégro, la Norvège, la Serbie, la Suisse et la Turquie - fait état d'améliorations dans plusieurs domaines.
Meilleur recyclage des déchets
"Aujourd'hui, les Européens jouissent d'un air et d'une eau plus purs, moins de déchets sont envoyés à la décharge et plus de ressources sont recyclées", souligne notamment l'Agence. Les émissions de gaz à effet de serre ont ainsi diminué de 19% depuis 1990, et ce malgré une augmentation de 45% de l'activité économique. L'utilisation des combustibles fossiles a elle aussi baissé, de même que les émissions de certains polluants provenant du transport et de l'industrie. Les taux de recyclage de déchets ont quant à eux augmenté dans 21 pays entre 2004 et 2012, alors que les taux de mise en décharge ont diminué dans 27 des 31 pays pour lesquels des données sont disponibles. Les pays entrant dans le champ d'étude de l'AEE ont atteint un taux de recyclage moyen de 29% en 2012 contre 22% en 2004. La consommation intérieure de ressources qui était de 16,7 tonnes par personne en 2007 a diminué pour s'établir à 13,7 tonnes par personne en 2012. Mais cette baisse s'explique en partie par l'effondrement de l'industrie du BTP dans certains pays européens, relativise l'Agence. Les politiques environnementales ont aussi amélioré la qualité de l'eau potable et des eaux de baignade et ont réduit l'exposition à des polluants dangereux majeurs, souligne le rapport. Autre élément positif selon l'Agence : le secteur des industries de l'environnement a connu une croissance de plus de 50% entre 2000 et 2011. "C'est l'un des rares secteurs à avoir prospéré en termes de revenus et d'emplois depuis la crise financière de 2008", souligne-t-elle.
Dégradation continue des écosystèmes
Alors que l'UE a lancé sa politique environnementale dans les années 70 et s'est fixé ensuite pour objectif de "vivre bien dans les limites de la planète" d'ici à 2050, l'analyse que livre l'AEE à mi-chemin montre toutefois qu'elle est encore loin du but dans de nombreux domaines. C'est particulièrement le cas concernant la biodiversité qui "continue à être érodée". "Respectivement 60% et 77% des évaluations faites pour les espèces et habitats protégés au titre des directives sur la nature indiquent un état de conservation défavorable", indique l'Agence qui estime que l'Europe n'est pas en mesure de réaliser son objectif de mettre un terme à la perte de biodiversité d'ici 2020. La situation est particulièrement inquiétante pour la faune et la flore marines. Les fonds marins sont abîmés, les eaux polluées, plus acides et envahies par des espèces invasives. Si la surpêche a diminué dans l'océan Atlantique et en mer Baltique, le tableau est plus sombre en Méditerranée : 91% des stocks y étaient victimes de surpêche en 2014. "Pour environ la moitié des masses d'eau douce européennes nous ne parviendrons probablement pas à un 'bon état écologique' en 2015", note encore l'Agence qui constate en outre que "moins de 6% des surfaces agricoles européennes ont été utilisées pour l'agriculture biologique en 2012, avec de grandes différences d'un pays à l'autre." A l'avenir, les impacts du changement climatique devraient s'aggraver et les causes de la perte de diversité perdurer, selon le rapport qui souligne la "menace" que constitue la dégradation continue des écosystèmes "pour l'activité économique, la création de richesses et le bien-être humain."
Impacts de la pollution de l'air sur la santé
Par ailleurs, la pollution de l'air et la pollution sonore "continuent d'avoir de sérieux impacts sur la santé dans les zones urbaines". En 2011, environ 430.000 morts prématurées dans l'Union européenne ont été attribuées aux particules fines contenues dans l'air. Et l'exposition au bruit "contribue tous les ans à au moins 10.000 morts prématurées par malaise cardiaque".
La crise financière de 2008 et les difficultés économiques qu'elle a engendrées "ont contribué à réduire certaines pressions sur l'environnement". "Reste à voir si ces améliorations seront durables", pointe encore le rapport qui appelle à des transformations fondamentales en matière d'alimentation, d'énergie, de logement, de transport, de finances, de santé et d'éducation pour relever les défis environnementaux. "Nous avons 35 ans pour faire en sorte de vivre sur une planète durable d'ici à 2050", souligne Hans Bruyninckx, appelant à "agir maintenant".