Réutilisation des eaux usées traitées : l’arrêté pour les usages de propreté urbaine enfin paru

Après les usages agricoles et les espaces verts, c'est au tour de la propreté urbaine de faire l'objet d'un cadre réglementaire permettant "d’autoriser plus rapidement" des projets d’utilisation des eaux usées traitées dans le cadre du plan Eau.

Mise en avant par le plan Eau, la réutilisation des eaux usées traitées (Reut) fait l’objet d’un nouvel arrêté ouvrant la voie à certaines pratiques de propreté urbaine (nettoyage des voiries, des quais de déchetterie ou des bennes à ordures, par exemple). Plusieurs chantiers ont été menés en parallèle : un pour la réutilisation des eaux usées traitées (décret n°2023-835 du 29 août 2023 et arrêtés des 14 et 18 décembre 2023 pour les espaces verts et les usages agricoles) ; un autre relatif aux eaux réutilisées dans les entreprises du secteur alimentaire (décret n°2024-33 du 24 janvier 2024 et décret n°2024-769 du 8 juillet 2024) ; et un troisième concernant les eaux impropres à la consommation humaine (EICH). Sur ce volet, deux textes (décret n°2025-239 et arrêté du 14 mars 2025) ont dernièrement fixé le cadre d’usage des "eaux non-conventionnelles" au sein des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). 

La France toujours à la traîne 

Pour rappel, le plan Eau prévoit d'atteindre 10% d'économie d'eau d'ici 2030 et de réutiliser 10% des eaux usées, soit 300 millions de m³. D’autres pays européens comme l’Espagne atteignent 15%, alors que la France reste à la traîne avec 1%. Et force est de constater que le dossier de la Reut s’inscrit dans le temps long. Les dispositions prévues par le présent arrêté ont été établies sur la base d’un avis de l’Anses en date du 17 janvier 2024, qui remonte donc à presque deux ans en arrière. Un autre avis en date du 7 juin 2024 concernant un dossier local de demande de réutilisation d’eaux usées traitées (au titre de l’article R.211-131), porté par le consortium Life ReWa Métropole de Montpellier, a également permis de baliser le terrain. Une mise en consultation publique du texte avait été organisée en février dernier (lire notre article) conduisant à des modifications sur plusieurs points. Sont ici visés différents usages urbains, comme le nettoyage de voirie par balayeuse, le nettoyage, sans lance d’aspersion, des accotements et des ouvrages d’art, le nettoyage de quais de déchetterie, l'hydrocurage de réseaux d'assainissement et des réseaux d'eaux pluviales, les opérations sur installation d'assainissement non collectif, le nettoyage de bennes à ordure. 

Régime d’autorisation à la main du préfet

Pour certains des usages mentionnés, à l’exemple du nettoyage de quais de déchetterie, l’hydrocurage de réseaux d’assainissement, les opérations sur installation d’assainissement non collective et le nettoyage de bennes à ordures,  qui "ne requièrent pas de traitement complémentaire des eaux usées traitées" en sortie de station d’épuration, l’arrêté prévoit un dossier simplifié avec moins de pièces requises et des conditions d’utilisation moins exigeantes. Toutefois, le gouvernement n’a pas accédé à la demande - formulée par une partie des acteurs lors de la consultation - de supprimer l’autorisation, au profit d’un régime de déclaration voire un "porté à connaissance" auprès du préfet. Les articles R.211-123 à R. 211.137 introduits dans le code de l’environnement par le décret n°2023-835 du 29 août 2023 relatif aux usages et aux conditions d’utilisation des eaux de pluie et des eaux usées traitées prévoient une procédure d’autorisation "pour tout usage d’eaux usées traitées", rappelle-t-il. 

Pas question non plus d’étendre le champ d’application à d’autres types d’eaux non conventionnelles pour les usages de propreté urbaine et des usages non domestiques des collectivités, tels que les eaux de vidanges de piscines, et les eaux d’exhaure. Les usages directement liés aux activités identifiées pour la propreté urbaine ont pu être ajoutés (cas du nettoyage des ouvrages et des équipements associés à l’hydrocurage des réseaux d’assainissement, et l’hydrocurage des réseaux d’eaux pluviales). Les modalités de mise en œuvre des autres usages "pourront utiliser le même référentiel de qualité et les mêmes dispositions de mise en œuvre que celles inscrites dans le présent arrêté", est-il précisé. 

Le gouvernement a également refusé de mettre en place un cadre allégé dédié à la possibilité de mobiliser l’utilisation des eaux usées traitées de façon ponctuelle (chantiers bâtiments-travaux publics par exemple). Il aurait nécessité là encore de faire évoluer la procédure d’autorisation du décret n°2023-835 du 29 août 2023. Il n’a pas souhaité non plus revenir sur les critères de qualité des eaux pour baisser les coûts de mise en oeuvre comme certains acteurs l'y invitaient. 

Quelques assouplissements supplémentaires

Sur les modalités de surveillance quelques précisions ont été apportées. Il a aussi été décidé de lever l’interdiction de l'utilisation d'eaux usées traitées au sein d'un périmètre de protection rapproché (PPR) pour le nettoyage de voiries, d'accotements ou d'ouvrages d'art réalisé sur des surfaces imperméabilisées avec drainage des eaux de ruissellement vers le réseau pluvial, sans risque notable d'infiltration dans la nappe. 

On notera également que des modifications ont été apportées afin que le rinçage et le nettoyage des camions-citernes dédiés aux EUT ne se fassent pas avec de l’eau potable (sous certaines conditions) : temps de séjour dans le matériel, vidange et rinçage avec des eaux usées traitées de qualité A lorsqu’il est temporairement mis hors service pendant une période prolongée de 72 heures.

L’obligation d’établir un programme de surveillance des virus entériques -particulièrement contraignante et coûteuse, alors que les virus sont déjà suivis via le paramètre Coliphage- a été supprimée. 

Enfin, l’arrêté modifie également l’arrêté du 14 décembre 2023 s’agissant de la Reut pour l’arrosage d’espaces verts, et l’arrêté du 18 décembre 2023 pour l’irrigation de cultures. Le gouvernement a notamment accédé à la demande de permettre l’utilisation d’EUT de qualité A ou B suivant des conditions de mises en œuvre (irrigation permettant d’ajuster finement ressources en eau et besoins d’irrigation, avis favorable d’un hydrogéologue agréé, mise en place d’un suivi spécifique) à l’intérieur d’un périmètre de protection rapprochée de captage d’eau potable. Des précisions sont également ajoutées à l’arrêté du 14 décembre 2023 (espaces verts) s’agissant d’élargir la liste des EUT issues des ICPE pouvant être autorisées, en supprimant le critère du rejet dans le milieu naturel. Il a été décidé de prendre en compte cette demande émise lors de la phase de consultation en précisant les dispositions évitant le contournement des normes des rejets raccordés. 

Référence : arrêté du 8 septembre 2025 relatif aux conditions de production et d'utilisation des eaux usées traitées pour la propreté urbaine et modifiant l'arrêté du 14 décembre 2023 relatif aux conditions de production et d'utilisation des eaux usées traitées pour l'arrosage d'espaces verts et l'arrêté du 18 décembre 2023 relatif aux conditions de production et d'utilisation des eaux usées traitées pour l'irrigation de cultures, JO du 5 octobre 2025, n°14.

 

 

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