Taxe d'habitation sur les résidences secondaires : la majoration devient lourde pour les propriétaires, alerte Charles de Courson

La hausse exponentielle depuis trois ans de la majoration de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires conduit à une imposition de plus en plus conséquente des propriétaires de résidences secondaires, alors que beaucoup ne sont pas électeurs dans les communes concernées et n'ont pas des revenus très élevés. Le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale s'en alarme dans un rapport qui s'intéresse par ailleurs aux DMTO, qui offrent aujourd'hui aux départements une petite "bulle d'air" toutefois jugée insuffisante.

Rares sont les taxes qui connaissent une progression de 221% en trois ans. C'est pourtant la croissance enregistrée entre 2021 et 2024 par le produit des majorations de taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS) perçues par les communes, qui a atteint un montant de 436 millions d'euros en 2024. 

C'est entre autres à ce sujet que s'intéresse le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, Charles de Courson, dans le rapport d'information sur l'application des mesures fiscales qu'il a présenté le 30 septembre à la commission des finances.

A l'origine de la hausse vertigineuse de la surtaxe qui a vu le jour en 2017 : l'élargissement par un décret d'août 2023 (voir notre article sur ce texte) du nombre de communes pouvant l'activer. Celles qui disposent de cette faculté sont désormais au nombre de 3.697, contre 1.149 avant la réforme. Et les communes concernées n'ont pas tergiversé face à l'occasion de mettre du beurre dans leurs épinards. 1.628 communes ont ainsi majoré leur THRS en 2025. Par ailleurs, une part importante d'entre elles (près d’une commune éligible sur cinq en 2024) n'a pas hésité à porter l'imposition à son taux maximum de 60 %. Le rapporteur général du budget pointe, enfin, les modalités trop souples à son goût, permettant aux communes d'augmenter leur taux de majoration de THRS. 

Contribution fiscale "disproportionnée"

Les conséquences sont problématiques aux yeux de Charles de Courson. "Les propriétaires de résidences secondaires contribuent de manière disproportionnée aux recettes" des communes, et ce alors qu'"ils ne sont, bien souvent, pas électeurs" dans ces collectivités. Ce phénomène contribue selon lui à distendre "le lien existant entre le citoyen-contribuable et le citoyen électeur", qui a déjà été dégradé par la suppression de la taxe d'habitation, déplore le député Liot. De plus, il faut s'abstraire des clichés, prévient-il :  les propriétaires de résidences secondaires ne sont pas tous fortunés. Selon une étude de l'Insee parue en 2021, seules 34% des résidences secondaires détenues par un ménage résidant en France le sont par des ménages aisés - ces derniers étant définis comme ceux dont le niveau de vie est au-dessus du neuvième décile de niveau de vie national en 2016.

La majoration de THRS n'a pas permis de "rééquilibrer l'offre de logements" au bénéfice des habitations principales, déplore par ailleurs le rapporteur général du budget. La part des habitations principales (légèrement supérieure à 82%) dans le parc de logements est en effet restée stable depuis 2017.

"Redonner des marges de manœuvre" aux départements

Dans le rapport, Charles de Courson appelle par ailleurs à "redonner" rapidement "des marges de manœuvre financières aux départements". En effet, la "bulle d'air" que constitue la faculté inscrite dans la loi de finances pour 2025 de relever de 0,5% les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) pendant trois ans est "insuffisante", selon lui. Au 1er juin 2025, 83 départements avaient décidé de porter leur taux de DMTO à 5% (contre 4,5% auparavant). Ils en tireraient à la fin de l'année un supplément de recettes d'environ 600 millions d'euros au total. Et le surplus serait probablement supérieur les années suivantes. Ces ressources nouvelles s'ajoutent à celles qui proviennent de l'amélioration de la conjoncture immobilière. 

La conjugaison des deux phénomènes a pour effet d'accélérer la croissance des DMTO. "Au 1er septembre 2025", celle-ci atteignait 18,1% "sur les huit premiers mois de l'année par rapport à la même période en 2024", précise le rapporteur général du budget, en citant des données issues des études notariales.

CSG et pouvoir de taux

Avec ces bonnes nouvelles, "l’année 2025 s’annonce un peu meilleure pour les départements", conclut-il, avec un enthousiasme, donc, très modéré. En effet, poursuit-il, "il ne s’agit que d’une stabilisation d’une situation très difficile pour la plupart des départements", découlant notamment du plongeon des DMTO (-32%) entre 2022 et 2024.

Pour sortir les départements du marasme, le député propose "dans l'immédiat" le transfert à ces derniers d'une fraction de la taxe sur les conventions d’assurance (TSCA) perçue par la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF).

Et "à moyen terme", il recommande de remplacer une partie des dotations de l'État aux départements par le produit d'une fraction de contribution sociale généralisée (CSG). Un impôt dynamique, sur lequel les départements exerceraient "un pouvoir de taux encadré". Les dotations en question (qui ont fortement reculé entre 2014 et 2017 avant d'être stabilisées en euros courants), seraient reversées aux organismes de sécurité sociale. Cette piste qui "permettrait de redonner aux départements une autonomie fiscale tout en rétablissant le lien entre le citoyen-électeur et le citoyen contribuable" figurait dans le rapport Woerth sur la décentralisation, remis en mai 2024.

 

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