La restauration collective comme moteur d’une alimentation durable
En France, la restauration collective représente près de 8 millions de repas servis quotidiennement, tous secteurs confondus (cantines scolaires et d’entreprise, hôpitaux, maisons de retraite et autres établissements de soins). Face à la prise de conscience générale de l’importance d’une alimentation durable et saine, la question de la transition alimentaire gagne de plus en plus de terrain.

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La restauration collective, un poids lourd de la commande publique
En restauration collective, les chiffres parlent d’eux-mêmes :
- les cantines scolaires servent près de 1,2 million de repas chaque jour en France, pour environ 7 millions d’enfants ;
- les établissements de soins environ 2 millions ;
- les structures de restauration d’entreprise sont à environ 4,5 millions.
Au vu du volume, les plats servis dans les cantines – scolaires ou non – ont longtemps pâti d’une réputation peu flatteuse associée à la quantité, supposément produite au détriment de la qualité.
Pour redorer les lettres de la restauration collective et y instaurer une démarche positive et vertueuse, les collectivités, qui gèrent en direct environ 60 % de la restauration collective, accélèrent leur transition vers une alimentation durable1.
Les cantines comme laboratoires de l’alimentation durable
Instruire les écocitoyens de demain
Les cantines, en particulier dans le milieu scolaire, sont aussi un outil d’éducation à l’alimentation durable. Elles sensibilisent les enfants à la saisonnalité des produits, à la lutte contre le gaspillage alimentaire, à l’importance de l’agriculture biologique et à la préservation des ressources naturelles.
À travers des ateliers pédagogiques, des potagers scolaires, des menus participatifs ou des journées à thème, les élèves deviennent acteurs de leur alimentation. Ils apprennent à reconnaître la qualité d’un produit, à en comprendre l’origine, et développent des habitudes alimentaires responsables qui les suivront à l’âge adulte.
Vers plus de produits bio et locaux dans les cantines
L’intégration des produits bio et locaux dans la restauration collective s’appuie avant tout sur la puissance de la commande publique. En orientant leurs commandes dans ce sens, les collectivités territoriales disposent d’un levier considérable et créent une dynamique territoriale vertueuse, avec :
- une demande stable et prévisible qui permet aux agriculteurs de sécuriser leurs débouchés ;
- le maintien et la création d’emplois non délocalisables dans les secteurs agricole et agroalimentaire ;
- un impact environnemental maîtrisé ;
- le renforcement de la résilience alimentaire face aux crises économiques et climatiques.
La qualité nutritionnelle des repas servis en restauration collective constitue par ailleurs un enjeu majeur de santé publique. Cultivés sans pesticides de synthèse et plus riches en nutriments, les produits issus de l’agriculture biologique favorisent une alimentation locale plus saine, plus fraîche et de meilleure qualité d’un point de vue nutritif et savoureux. Autant d’atouts qui favorisent leur appréciation – notamment auprès du jeune public des cantines scolaires.
Ces établissements représentent un espace privilégié de sécurité alimentaire et d’éducation à l’alimentation durable. L’approvisionnement bio et local permet aux enfants de comprendre l’origine des aliments, le caractère essentiel des métiers de l’agriculture et de l’alimentation ainsi que les enjeux du développement durable.
En recréant du lien entre producteurs et consommateurs et en pensant circuit court, la restauration collective donne du sens à l'alimentation et valorise le patrimoine gastronomique local. En bout de chaîne, cette prise de conscience aboutit à des comportements alimentaires plus responsables tels que la lutte contre le gaspillage alimentaire ou la consommation de produits de saison.
Les collectivités comme moteur de la transition vers une alimentation durable
La loi EGalim : quelles obligations pour les collectivités ?
Pour engager les collectivités dans cette démarche de mieux-manger, la loi EGalim leur impose un certain nombre de règles :
- utiliser au moins 50 % de sous signes officiels de qualité, dont 20 % issus de l’agriculture biologique ;
- interdire les plastiques à usage unique ;
- promouvoir des menus végétariens dans les cantines scolaires ;
- s’engager dans la lutte contre le gaspillage alimentaire.
Un levier stratégique pour structurer l’offre locale
Les cantines représentent bien plus que de simples lieux de restauration : c’est un maillon clé dans la structuration de l’offre locale. En orientant leurs achats vers des circuits courts et durables, les cantines soutiennent activement les filières agricoles et agroalimentaires de proximité.
Cette démarche permet aux agriculteurs de sécuriser leurs débouchés, participe à la création d’emplois non délocalisables, et contribue activement à l’ancrage économique des territoires. Ainsi, chaque repas servi devient une opportunité d’agir pour l’environnement, l’emploi et la cohésion locale.
Des solutions et des initiatives locales pour des cantines plus durables
Des acteurs engagés pour l’approvisionnement bio et le circuit court
La Ville de Paris a adopté, en juin 2022, son troisième Plan Alimentation durable (PAD), destiné à tous les usagers des cantines municipales parisiennes, à leurs familles et aux 21 gestionnaires qui commandent, préparent et servent les repas cuisinés en restauration collective. Ce PAD vise à réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre de la ville causées par la distribution alimentaire.
C’est dans ce sillage qu’a été lancé le projet Seine Nourricière, en partenariat avec les membres d’AgriParis Seine et d’autres acteurs du secteur. L’objectif ? Structurer les filières agricoles et alimentaires biologiques et décarboner au maximum leur logistique, en exploitant notamment les réseaux de voies d’eau du bassin de la Seine.
Côté approvisionnement, l’engagement provient d’acteurs tels que des associations et des entreprises au service du développement d’une démarche vertueuse et locale. C’est notamment le cas de Terres du Pays d’Othe, un groupe de producteurs dans l’Yonne, qui a développé une filière locale de légumineuses bio tout en contribuant à préserver la qualité de l’eau.
C’est aussi le cas de RESAN, une startup qui permet aux éleveurs laitiers de transformer leur production à la ferme avant de la vendre notamment en restauration collective, permettant ainsi à la fois d’améliorer le revenu des agriculteurs et de développer des filières locales de qualité.
C’est également ce double impact social et environnemental que recherche la légumerie Agriviva : implantée à Montpellier, elle transforme des fruits et légumes frais issus des circuits courts pour la restauration hors foyer tout en employant des personnes en insertion et en valorisant les produits hors calibre afin de lutter contre le gaspillage alimentaire.
Impact environnemental, gaspillage alimentaire et approvisionnement local au cœur des stratégies
Au-delà de la sensibilisation des consommateurs et du personnel en restauration collective, plusieurs actions peuvent être mises en place pour limiter le gaspillage alimentaire et l’impact environnemental dans ce milieu :
- le déploiement d’outils de gestion des repas et d’optimisation des stocks ;
- la redistribution et la valorisation des surplus et invendus ;
- le réemploi de matériel de restauration collective ;
- la réduction des plastiques à usage unique et le réemploi de contenants alimentaires.
Pour faciliter ces démarches, les collectivités peuvent compter sur la densité des entreprises et associations engagées pour des cantines plus durables. Parmi les initiatives soutenues par la Banque des Territoires, on peut notamment citer :
- Nona. Ce logiciel de gestion aide les cantines à concevoir leurs menus, mieux gérer leurs approvisionnements, gérer leurs stocks et à réduire les pertes ;
- Les Jardins de Solène. Cette association du Vaucluse se concentre sur la valorisation des invendus et déclassés tout en employant des personnes en situation de handicap, pour une alimentation plus inclusive et responsable ;
- Vesto. Cette entreprise à impact œuvre pour le reconditionnement du matériel de cuisine professionnel. Les collectivités investissent dans du matériel pour leurs cantines. Plutôt que d’acheter du neuf, certaines privilégient le reconditionnement et le réemploi, réduisant ainsi leur empreinte carbone ;
- Uzaje. Leader en matière de réemploi des contenants alimentaires, Uzaje développe des centres de lavage performants pour limiter les déchets et les perturbateurs endocriniens en permettant de mettre fin à l’usage de contenants en plastique dans la restauration collective.
Les collectivités locales occupent une place centrale dans la mise en œuvre des politiques publiques visant une alimentation durable. En mobilisant la commande publique, elles peuvent impulser des dynamiques locales positives, telles que la structuration des filières, le soutien aux producteurs locaux ou l’innovation dans la gestion des cantines.
Pour relever les défis liés à l’accompagnement des acteurs locaux, à la structuration des filières et à la montée en compétences des gestionnaires de cantines, il faut généraliser les bonnes pratiques. Ainsi, les cantines françaises peuvent progressivement intégrer des pratiques plus durables, contribuant à une alimentation locale, plus saine et respectueuse de l’environnement.
1Stratégies de transition alimentaire et restauration collective, janvier 2021, la Banque des Territoires, Caisse des Dépôts
FAQ : Questions/réponses
Quelles sont les obligations de la loi EGalim pour les cantines ?
Les établissements de restauration collective sont tenus d’utiliser au moins 50 % de produits durables et de qualité, dont 20 % issus de l’agriculture biologique. Les collectivités ont aussi l’obligation de s’engager dans la lutte contre le gaspillage alimentaire, de bannir l’utilisation de plastiques à usage unique, de promouvoir des menus végétariens dans les cantines scolaires.
Comment une cantine peut-elle réduire son gaspillage alimentaire ?
Les cantines et les fournisseurs peuvent réduire le gaspillage alimentaire en introduisant, dans leurs processus, des outils de gestion des repas et d’utilisation des stocks tels que Nona. Ils peuvent aussi nouer des partenariats avec des organismes et des associations qui œuvrent pour la redistribution et la valorisation des surplus et des invendus alimentaires.
Pourquoi privilégier les circuits courts en restauration collective ?
En optant pour des aliments issus de circuits courts de proximité, les cuisines travaillent avec des produits frais, locaux et de saison. Non seulement cela facilite la stratégie d’approvisionnement, mais en plus, les qualités gustatives et nutritives sont préservées au maximum grâce à la cueillette à maturité et à la limitation du transport et des variations de température. Ce modèle bénéficie à la fois aux acteurs de la restauration collective et aux consommateurs et utilisateurs du service au quotidien.