Congrès des maires – Sport et culture, des outils de cohésion en manque de moyens

À l'occasion d'un forum organisé dans le cadre du Congrès des maires, élus et acteurs associatifs ont rappelé le rôle fondamental et unique des secteurs culturel et sportif dans la cohésion sociale, tout en déplorant une baisse sensible de leurs moyens. De nouvelles pistes de financement ont toutefois été évoquées.

Non, la culture et le sport ne sont pas de simples variables d'ajustement. Oui, ce sont de véritables outils de cohésion sociale. Lors du forum organisé ce 18 novembre autour de ces deux piliers des politiques locales, les intervenants, élus en tête, se sont montrés unanimes à l'heure de répondre à la question posée par les organisateurs du 107e Congrès des maires : "Culture et sport : simples variables d'ajustement ou outils de cohésion sociale ?"

L'explication de cette unanimité tient en quelques mots : les élus croient profondément aux vertus éducatives et sociales du sport et de la culture et continuent d'y consacrer des moyens importants. Coprésidents de la commission de la culture de l'Association des maires de France (AMF), Florence Portelli et Olivier Peverelli affirment d'entrée que "l'éducation artistique et culturelle est une chance que l'on doit offrir à tous nos enfants, notamment dans les écoles". De son côté, Noëlle Chenot, coprésidente de la commission du sport de l'AMF met rapidement les points sur les "i" : "On ne peut par parler de variables d'ajustement sur un budget sport, et c'est pareil en culture, vu le montant d'investissement pour une collectivité. Si on prend des équipements vitaux pour nos communes, comme les piscines, ça va de cinq millions à vingt millions d'euros." Et la maire de Surzur (Morbihan) de poursuivre : "C'est un vrai budget, c'est un vrai besoin dans nos collectivités. On sait à quoi sert le sport, on sait combien il est important dans nos communes d'avoir des équipements sportifs."

"Je n'ai que le sport et la culture pour faire de la cohésion"

Plus que des outils de cohésion sociale parmi d'autres, le sport et la culture sont souvent les seuls outils disponibles. "Je n'ai que le sport et la culture pour faire vivre la cohésion territoriale, plaide Christine de Neuville, maire de Vicq-sur-Breuilh (Haute-Vienne). Ce n'est pas en réparant des nids-de-poule que je vais faire de la cohésion." Là encore, qu'il s'agisse de sport ou de culture, on s'entend pour louer un investissement "qui évite d'autres dépenses". Patrick Appéré, président de l'Andes (Association nationale des élus en charge du sport), rappelle qu'"un euro investi dans le sport, ce sont treize euros de dépenses publiques en moins". Tandis que Noëlle Chenot assène : "On préfère voir nos jeunes jouer sur un city-stade que traîner dans la rue." 

Culture et sport peuvent toutefois diverger. Aux dires des élus, la culture en milieu rural pâtit davantage de la question de la mobilité que le sport. De la même façon, elle souffre parfois d'une certaine distanciation de la part de la population. "L'acculturation à la culture se fait plus lentement qu'en sport", pointe Christine de Neuville. Charlotte Blandiot-Faride, maire de Mitry-Mory (Seine-et-Marne), abonde dans ce sens : "On fait plus facilement du sport que de la culture." Pour cette élue communautaire, il faut parfois un véritable travail pour convaincre les publics les plus éloignés de la culture de se rendre, par exemple, "à la Philharmonie de Paris plutôt qu'au Stade de France". Dans sa communauté de communes, les actions d'initiation à la culture commencent d'ailleurs dès la crèche.

"On est en train de se faire faire les poches par l'État"

Pourtant, en ces temps de restrictions budgétaires, c'est bien la question des moyens qui retient l'attention de tous les intervenants. Nombreux sont ceux qui soulignent que le sport a bénéficié, dans le giron des Jeux olympiques, de moyens importants. Le plan 5.000 équipements est ainsi particulièrement salué. "On a bouffé [sic] les cent millions d'euros posés sur la table à une vitesse considérable parce qu'il y avait un effet levier, la moitié de l'investissement étant payée par l'État", explique Patrick Appéré. Malgré cette manne providentielle, "on a parfois un décalage entre les attentes des habitants et nos capacités financières réelles", s'inquiète David Lazarus, coprésident de la commission du sport de l'AMF. 

Sur l'issue du projet de loi de finances actuellement en débat au Parlement, aucun acteur de terrain ne se fait d'illusion. Mais on s'inquiète également des défaillances des grandes collectivités, régions et départements. Dans le public, une maire prend la parole : "On est des variables d'ajustement entre nous, nous sommes interdépendants des autres échelons territoriaux." Christine de Neuville tire carrément la sonnette d'alarme : "On ne peut pas tenir sans compétences partagées au niveau des communes rurales. Quand on voit que le département faiblit, que la région faiblit, voire pire, ça nous fait peur parce qu'on ne pourra pas compenser. Forcément, il y a des choses qui vont s'éteindre dans le monde rural." Ce à quoi Florence Portelli réagit : "Il ne faut surtout pas que les régions, les départements, les villes et les villages s'opposent entre eux. On est dans le même bateau, on a tous les mêmes difficultés et on est tous en train de se faire faire les poches par l'État." Pour illustrer ces derniers propos, Yann Rivoal, vice-président du Syndicat des musiques actuelles (Smac), rappelle que les taxes affectées au spectacle vivant ne sont toujours pas déplafonnées et que l'excédent de leur produit revient au budget général de l'État et non au secteur dont elles proviennent et qu'elles sont censées financer. 

"Le privé va être la porte de sortie, qu'on le veuille ou non."

Devant les difficultés que rencontrent actuellement régions et départements, on se tourne plutôt vers l'intercommunalité. "On mutualise avec nos communes limitrophes", illustre Noëlle Chenot. Et cela d'autant plus que le ZAN (zéro artificialisation nette) va obliger à chercher des solutions foncières au-delà des limites communales, au niveau des bassins de vie. Mais l'élue bretonne embraye aussitôt sur une autre solution : "Il va falloir aller sur le financement privé." David Lazarus approuve : "Le privé va être la porte de sortie, qu'on le veuille ou non." Dans sa ville de Chambly (Oise), les centres de loisirs et les écoles fréquentent déjà le mur d'escalade privé car "cela coûte moins cher" que d'en construire un public. Problème, les intervenants en conviennent : aujourd'hui, les acteurs publics ne savent pas s'adresser au secteur privé, aux industriels de leurs territoires susceptibles d'intervenir, par exemple à travers le mécénat, dans les actions culturelles ou sportives.

En attendant que les élus apprennent, certains acteurs privés – issus du secteur non lucratif... – présentent de bonnes nouvelles. Certes, la mi-novembre n'est pas encore Noël, néanmoins personne ne boude son plaisir quand Philippe Diallo, président de la Fédération française de football (FFF), notifie le doublement du Fonds du football amateur (Fafa), qui passe de 20 à 40 millions d'euros par an pour accompagner les collectivités dans leurs investissements. De la même façon, Amélie Oudéa-Castéra, présidente du CNOSF (Comité national olympique et sportif français) est applaudie quand elle annonce la mise en place, à l'issue des prochaines élections municipales, d'un prêt de la Banque des Territoires spécifiquement destiné aux équipements sportifs. Enfin, côté culture, Mathieu Boncour, directeur de la communication de la Sacem (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique), rappelle que son organisme subventionne concerts et festivals et vient de créer, à l'occasion du Congrès des maires, un fonds de dotation pour faire "monter en puissance" les projets d'éducation artistique et culturelle (EAC) dans les écoles et auprès des publics éloignés de la culture. Finalement, si elles se sentent parfois délaissées par l'État – la ministre des Sports, Marina Ferrari, reconnaissant lors de son intervention que les "politiques socles" que constituent le sport et la culture sont "bien souvent les premières sacrifiées par temps de contraintes budgétaires" –, les collectivités constatent qu'en matière de sport et de culture, elles ne sont pas seules.

 

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