Enfants sans domicile : les villes invitées à "s’outiller" pour agir
L’Unicef France encourage les villes à développer des "politiques volontaristes" pour accompagner les enfants sans domicile et leurs familles et lutter contre ce phénomène, à travers la publication d’un guide qui décrit leurs leviers d’action.

© Unicef et Adobe stock
"L’absence de domicile porte aujourd’hui atteinte aux droits les plus élémentaires de plus de 45.000 enfants en France", selon l’Unicef France qui a récemment rendu public un "guide pour aider les villes à agir" sur ce sujet. Élaboré avec huit villes de gauche – Grenoble, Ivry-sur-Seine, Lille, Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes et Paris -, qui sont membres du réseau "Villes amies des enfants" animé par l’Unicef, ce guide contient des "recommandations pour des politiques volontaristes", des pistes d’action et des exemples de pratiques locales. Le but : rappeler le cadre légal, inspirer et outiller les élus et agents, alors que le phénomène des enfants sans domicile a pris de l’ampleur ces dix dernières années (voir notre article).
Trois domaines sont abordés : la connaissance du phénomène (qui est plus large que le sans-abrisme des enfants), le repérage et l’orientation des familles ; la résorption des lieux de vie informels et l’accompagnement des familles vers un hébergement adapté ou un logement ; et l’accès des enfants à leurs droits et en particulier aux biens et services essentiels. Il est ainsi question, outre les aspects strictement liés au domicile, de modes de garde pour les jeunes enfants sans domicile – avec le développement par exemple d’accueils d’urgence -, de scolarisation, d’accès aux soins et à une alimentation "saine et en quantité suffisante".
Partenariat et approche décloisonnée
En matière d’observation sociale, d’accompagnement et de mise à disposition d’hébergement d’urgence, l’Unicef "recommande aux villes d’intégrer le comité de pilotage des Siao" (services intégrés d'accueil et d'orientation). Et plaide plus largement sur la multiplication des partenariats, entre les villes ou leur centre communal d’action sociale (CCAS) et le département, l’État, la Caisse d’allocations familiales (via une convention territoriale globale, CTG), les missions locales et l’ensemble des acteurs du social et du logement. Dans le cadre de l’analyse des besoins sociaux (ABS) puis de la CTG, une "approche décloisonnée" est préconisée pour une prise en compte de l’ensemble des âges et des dimensions (petite enfance, jeunesse, handicap, logement, accompagnement social…), parallèlement à la conduite d’opérations de recensement des personnes à la rue telles que les Nuits de la solidarité.
Imbrication des compétences
Sensibilisation et formation des professionnels qui sont en contact avec des enfants sans domicile, développement de dispositifs ou de démarches spécifiques – par exemple des accueils de jour pour les enfants et leur famille -, ou encore "contribution à la coordination" de "maraudes mixtes" qui relèvent pourtant des compétences de l’État et du département : de nombreux "leviers d’action" sont mis en avant… même si les villes ne détiennent qu’un morceau de la réponse.
Illustrant la complexité liée à l’imbrication des compétences, un schéma occupant deux pages résume ainsi la répartition entre l’État (veille sociale, garantie du droit à l’hébergement et au logement, santé…), les départements (hébergement des femmes enceintes et mères isolées avec enfant de moins de 3 ans, action sociale et médicosociale, protection de l’enfance, protection maternelle et infantile, gestion des collèges… ), les communes et intercommunalités (habitat et attribution des logements sociaux, domiciliation, accueil du jeune enfant, gestion des écoles, distribution de l’eau potable, contrôle de l’hygiène, gestion des eaux usées et des déchets, action sociale facultative…) et les régions (fonds structurels européens, gestion des lycées, transport scolaire, planification…).
Le guide se conclut à la fois par 43 recommandations adressées aux décideurs nationaux et par une grille d’"auto-évaluation" pour permettre à une ville de vérifier si elle est bien "outillée" sur le sujet.