Entretien du patrimoine : la piste du "National Trust à la française" se précise

Marie Lavandier, présidente du Centre des monuments nationaux, a rappelé devant la commission de la culture de l'Assemblée nationale que la piste d'un "National Trust à la française" était plus que jamais à l'étude pour trouver le moyen de mieux accompagner l'entretien des monuments, y compris ceux des collectivités territoriales.

Un National Trust à la française pour mieux entretenir le patrimoine français, c'est l'idée évoquée par Marie Lavandier, présidente du Centre des monuments nationaux (CMN), lors d'une audition devant la commission de la culture de l'Assemblée nationale, mercredi 15 octobre. Interrogée par plusieurs députés sur les pistes à suivre pour permettre l'entretien et la réparation du patrimoine, Marie Lavandier a rappelé qu'elle avait remis il y a quelques mois à la ministre de la Culture, Rachida Dati, un rapport – encore tenu secret – sur une transposition en France du modèle du National Trust britannique (de son nom complet National Trust for Places of Historic Interest or Natural Beauty, ou Fondation nationale pour les lieux d'intérêt historique ou de beauté naturelle), qui détient quelque cinq cents biens patrimoniaux outre-Manche, ce qui en fait le premier propriétaire foncier du royaume après la Couronne.

Fin de cycle pour la protection du patrimoine

Si le National Trust "s'inscrit dans une culture de la philanthropie anglo-saxonne" et si sa "transposition ne saurait être comprise de manière littérale", la présidente du CMN voit toutefois dans sa réussite une manière d'entretenir le patrimoine selon une culture différente de celle actuellement à l'œuvre en France. "Le National Trust est dans une logique d'entretien quotidien mais aussi de travaux qui modifient moins l'apparence des lieux. Très souvent, le National Trust autorise les anciens propriétaires à continuer à vivre dans les biens qui lui sont transmis moyennant certains aménagements."

Si une transposition du National Trust britannique est à l'étude, c'est que les temps l'exigent. "Conserver un patrimoine qui ne cesse de s'élargir depuis un siècle et demi, c'est quelque chose qui a un coût absolument considérable dans un contexte où les moyens n'ont pas augmenté. On est dans une situation un petit peu compliquée, a plaidé Marie Lavandier. Dans les années 1980-90, on a connu des niveaux d'investissement absolument majeurs en matière de patrimoine et une accélération de la protection du patrimoine historique qui nous conduisent aujourd'hui à une fin de cycle." 

Pour un changement de paradigme

Pour la présidente du CNM, un changement de paradigme est nécessaire, qui pousse vers le modèle britannique : "Il faut revenir à des pratiques d'entretien, qu'on reprenne la route d'un soin plus régulier, c'est une question de bon sens. La grosse difficulté, c'est de financer à la fois la restauration de nos grands monuments nécessaire à cette fin de cycle et ce changement de paradigme. À l'échelle du CMN, 20 à 25 millions par an sont consacrés à la restauration et 8 millions à l'entretien. Avec un patrimoine en bon état, ces proportions devraient être inversées. La véritable difficulté est là, profondément culturelle." Pour Marie Lavandier, c'est donc la culture de l'entretien et de la restauration des monuments historiques qui doit être remise en question.

Loin d'envisager la création d'une nouvelle structure publique, Marie Lavandier propose d'élargir "l'impact" du CNM, au-delà des cent dix monuments dont il a actuellement la charge, à des monuments en main de collectivités locales ou de propriétaires privés qui souhaiteraient bénéficier d'un appui technique ou commercial autour d'un grand label permettant une mobilisation, et notamment de la population, autour du patrimoine. Ce dernier aspect est fondamental dans la comparaison avec le National Trust britannique, lequel compte 5,35 millions de membres cotisants.

La question de la tarification

Il faut donc s'attendre à une évolution des modalités d'intervention du CMN, principalement pour répondre à "une demande très importante d'assistance technique, d'assistance en ingénierie, quasiment d'assistance à la maîtrise d'ouvrage, qui aujourd'hui fait défaut", a insisté Marie Lavandier, selon laquelle, "une communauté labellisée autour des monuments nationaux pourrait apporter un impact fort, notamment en termes de visites et de développement touristique local". 

Ce glissement vers la question de la gestion commerciale des monuments a fourni l'occasion à la présidente du CMN de soutenir que "le développement des recettes liées aux visites reste une source de financement très importante", puis d'embrayer sur la question de la tarification. Pour l'ancienne directrice du Louvre-Lens, le sujet du tarif ne doit pas être traité isolément mais "corrélé à la qualité de l'offre de médiation ou d'accompagnement". Marie Lavandier a ainsi suggéré aux collectivités locales, qui une fois par an sont amenées à prendre "une énorme décision concernant les tarifs", à travailler sur une différenciation entre les périodes de haute et basse saison ou entre les moments de la journée. Dans les monuments dont elle a la charge qui ont modifié leurs tarifs, "la fréquentation est restée très positive", a conclu Marie Lavandier.

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis