Redevance incitative, l’exemple durable de la communauté d’agglomération de Haguenau (67)
Mise en place il y a plus de dix ans, la redevance incitative pour l’enlèvement des ordures ménagères a permis de diviser la quantité d’ordures ménagères par deux. Sur le territoire de la communauté d’agglomération de Haguenau, le poids moyen de déchets collectés est ainsi passé de 280 kg à 146 kg par an et par habitant.
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Lancée en 2012, sur le territoire de ce qui était à l’époque la communauté de communes de la Région de Haguenau, la redevance incitative repose sur le principe du pollueur-payeur. « L’objectif était clair pour nos prédécesseurs, dans la foulée du Grenelle de l’Environnement : responsabiliser les habitants sur la quantité de déchets produits », se souvient Philippe Specht, vice-président en charge des déchets à la communauté d’agglomération de Haguenau (CAH). À l’époque, plusieurs intercommunalités voisines membres du syndicat mixte de traitement des ordures ménagères (Smitom), expérimentent des pratiques similaires. Lors de la création de la CAH en 2017, par fusion de quatre intercommunalités couvrant 36 communes, cette approche est alors unifiée à l’échelle de tout le territoire.
Un fonctionnement simple et transparent
« Le principe est simple : moins on sort sa poubelle, moins on paie », résume Jean-Eudes Kessenheimer, directeur des interventions et du cadre de vie à la CAH. Chaque foyer reçoit de la CAH un bac à ordures ménagères (rouge), et un bac pour le tri sélectif (jaune), tous deux équipés d’une puce électronique. Un forfait annuel inclut un nombre défini de levées : 12 pour les bacs rouges, 26 pour les jaunes.
« Pour un bac rouge de 120 litres, le forfait s’élève à 148 euros par an, auxquels s’ajoutent 3,5 euros par levée au-delà du quota. Les camions de collecte, équipés de lecteurs de puces, dénombrent automatiquement les levées pour établir des factures semestrielles », précise Jean-Eudes Kessenheimer. Ce forfait comprend aussi le passage, une fois tous les quinze jours, pour les bacs jaunes. Mais pour ces derniers, il n’y a pas de levées supplémentaires possibles. Le dispositif s’adapte à l’habitat collectif : bacs individuels verrouillés lorsque c’est possible, ou partagés avec facturation aux bailleurs et syndics. Et depuis 2020, la CAH investit dans des bacs de tri plus grands, pour s’adapter aux nouveaux besoins des foyers.
Des résultats spectaculaires
Entre 2010 et 2024, la quantité annuelle d'ordures ménagères a chuté, passant de 280 kg à 146 kg par habitant. Cette baisse a été amplifiée par les nouvelles consignes de tri de 2022, qui permettent de mettre plus de déchets dans le bac jaune. En 2024, l’introduction de la collecte séparée des biodéchets renforce encore cette dynamique. « Les biodéchets remplissaient une grande partie des poubelles rouges. Nous avons incité les particuliers à s’équiper de composteurs ou lombricomposteurs à des tarifs très avantageux et installé des points d’apport volontaire de biodéchets », indique Philippe Specht.
L’usine d’incinération locale perçoit directement les effets de cette évolution : autrefois dimensionnée pour traiter les déchets de 230 000 habitants, elle peut aujourd’hui absorber ceux de 400 000 personnes. Autre conséquence notable de cette politique incitative : les factures des ménages diminuent constamment et la redevance reste inchangée depuis 2012 !
Un investissement maîtrisé pour des choix durables
Selon Jean-Eudes Kessenheimer, équiper les bacs de puces électroniques pour 100 000 habitants représente un investissement d’environ 200 000 euros. Quant au coût de la collecte, il ne constitue pas un frein : « les prestataires proposent systématiquement des camions équipés de lecteurs de puces. Certains peuvent même facturer au poids, mais c’est plus complexe et coûteux. » Avant l’unification des pratiques, certains territoires appliquaient des tarifs plus élevés et collectaient le tri en points d’apports volontaires. Cela générait des dépôts sauvages et les points d’apports étaient parfois saturés de sacs-poubelles. « Depuis l’harmonisation, il n’y a plus de point d’apport volontaire et ces phénomènes ont disparu », observe Jean-Eudes Kessenheimer.
Une adhésion forte
Des dépôts sauvages subsistent (petits électroménagers, pneus, sacs d’ordures ménagères…), mais ils existaient avant la mise en place de la redevance. Globalement, pour les élus comme pour les habitants, l’adhésion à la redevance incitative est forte. « Avec des factures en baisse, les ménages constatent concrètement les effets de leurs efforts. Bien sûr les déchets ne disparaissent pas, mais ils sont valorisés autrement que par l’incinération : revente, recyclage, compostage… c’est la voie que nous voulons poursuivre. »
Pour 100 % de véhicules électriques
« Notre prochain objectif, inscrit dans le cadre de notre nouveau marché, sera de renouveler toute la flotte de camions de collecte pour atteindre 100 % de véhicules électriques d’ici 2027 », se réjouit Philippe Specht. Si l’objectif est avant tout de réduire les émissions polluantes, notamment le CO2, il s’agit aussi de limiter les nuisances sonores.
Communauté d’agglomération de Haguenau
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