Harcèlement scolaire : des taux stables mais des signaux de vulnérabilité persistants

Une nouvelle enquête de la Depp révèle que 3% des écoliers et lycéens et 5% des collégiens se déclarent victimes de harcèlement. Si ces chiffres restent stables par rapport à ceux de l'an passé, une part importante d'élèves présente des signes de vulnérabilité préoccupants.

Chaque année, en novembre, la Journée nationale de lutte contre le harcèlement scolaire mobilise l'ensemble des écoles et établissements de France. Depuis 2023, elle s'accompagne d'une nouvelle démarche : une grille d'auto-évaluation à remplir par les élèves du CE2 à la terminale. L'objectif ? Mieux détecter et prévenir des situations souvent sous-estimées, tout en produisant des données chiffrées au niveau national.
En novembre 2024, 36. 000 élèves ont répondu à ce questionnaire. Résultat : 3% des écoliers et lycéens et 5% des collégiens se déclarent en situation de harcèlement. Des taux globalement inchangés par rapport à l'an dernier — signe, pour l'Éducation nationale, que l'outil permet désormais un suivi régulier. Mais derrière ces chiffres stables, se cache une réalité plus complexe.

Des écarts selon le niveau, la filière et le territoire

Premier constat : le harcèlement n'épargne aucun niveau. Dans le premier degré, les élèves de CE2 apparaissent particulièrement exposés (5% contre 3% en CM1 et CM2). Au collège, les proportions restent relativement homogènes de la 6 à la 3. Au lycée, la voie professionnelle concentre davantage de situations à risque : 6% des élèves en deuxième ou troisième année de CAP déclarent être victimes de harcèlement, soit deux fois plus que la moyenne des lycéens (3%).

Autre enseignement : le contexte territorial et le secteur d'enseignement jouent un rôle notable. Les établissements situés en milieu urbain enregistrent une prévalence du harcèlement légèrement plus élevée que ceux en zone rurale (+1 point). De même, le secteur public reste plus concerné que le privé sous contrat : 4% des écoliers et lycéens du public se disent victimes, contre 2% dans le privé. Au collège, l'écart est plus resserré (5% dans le public contre 4% dans le privé).

Une zone grise inquiétante

Au-delà des cas avérés de harcèlement, l'étude pointe une zone grise inquiétante : un nombre significatif d'élèves présente des signes de mal-être ou de vulnérabilité. Dans le premier degré, 18% des élèves se trouvent dans une situation intermédiaire — ni totalement épargnés, ni clairement harcelés. Cette proportion tombe à 7% au collège et 5% au lycée, mais elle souligne l'importance de la vigilance au quotidien. Ainsi, 49% des écoliers déclarent n'avoir subi aucune atteinte répétée ni problème majeur lié à la vie scolaire, tandis qu'ils sont 68% au collège et 73% au lycée dans ce cas. Ces chiffres montrent qu'une large majorité d'élèves vit sereinement sa scolarité, mais ils rappellent aussi qu'un élève sur cinq dans le premier degré manifeste un besoin de suivi renforcé.

Outil de repérage et de sensibilisation

Pour rappel, la grille d'auto-évaluation mesure le harcèlement à partir de deux indicateurs : un indice de multivictimation (atteintes répétées subies de la part d'autres élèves) et un indice de qualité de vie scolaire (réponses négatives à une série de questions). Un élève du primaire est ainsi considéré comme harcelé s'il déclare au moins 8 atteintes sur 14 et 5 réponses négatives sur 7 items de vie scolaire. Des seuils spécifiques s'appliquent pour le collège et le lycée. Rappelons aussi que ce dispositif qui n'a pas de caractère obligatoire vise avant tout à faire émerger la parole des élèves, tout en fournissant aux équipes pédagogiques un outil de repérage et de prévention. Pour cette deuxième édition, les grilles du secteur privé sous contrat ont été intégrées, élargissant encore le périmètre statistique.

Un suivi encore à consolider

Si le ministère se félicite d'une mobilisation croissante et d'une meilleure remontée des données — 135 écoles, 300 collèges et 300 lycées ont participé — l'étude rappelle la nécessité de poursuivre l'effort pour réduire durablement la prévalence du harcèlement. Dans un contexte où les violences entre pairs restent une préoccupation majeure, le suivi statistique devra s'accompagner de mesures de prévention et d'accompagnement renforcées au plus près des établissements. Rendez-vous est d'ores et déjà pris pour la prochaine Journée nationale de lutte contre le harcèlement à l'école, à l'automne 2025, pour évaluer l'impact des actions menées et ajuster, si nécessaire, les dispositifs de détection.

 

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