Harcèlement scolaire : le gouvernement élargit sa stratégie au numérique
Alors que les actes de harcèlement scolaire demeurent une source d'inquiétude pour les familles, les élèves et les enseignants, une communication présentée en conseil des ministres le 23 mai 2025 fait le bilan du plan de lutte lancé en 2023. Nouveaux chiffres, élargissement de la prévention, recentrage sur le numérique : l'exécutif affiche sa volonté de s'attaquer au harcèlement scolaire sous toutes ses formes.

© Pierre MERIMEE/REA
Le harcèlement scolaire reste au cœur de l'agenda gouvernemental. Deux semaines après la remise du prix "Non au harcèlement" à l'Élysée, Elisabeth Borne, ministre de l'Éducation nationale a présenté en conseil des ministres, le 23 mai 2025, une communication sur l'état d'avancement et les perspectives du plan interministériel lancé en 2023. Ce point d'étape intervient dans un contexte de forte attente : selon une étude publiée en novembre 2024, un élève sur dix serait victime de harcèlement à l'école, avec des formes de plus en plus numériques.
Le programme pHARe généralisé
Le programme pHARe, désormais généralisé, repose sur une triple ambition : "100% prévention, 100% détection, 100% solutions". Il s'incarne dans plusieurs mesures concrètes : formation systématique des personnels d'ici 2027, cours d'empathie à l'école primaire, 10 heures annuelles de sensibilisation aux compétences psychosociales pour les collégiens, et outils à destination des familles.
Le bilan 2024 confirme une mobilisation croissante. Lors de la semaine dédiée en novembre 2024, trois millions d'élèves ont participé à des actions de sensibilisation. 100.000 élèves se sont portés volontaires comme ambassadeurs, et le prix "Non au harcèlement" a vu sa participation augmenter de 20%, avec 180.000 élèves impliqués. Autre outil central : le questionnaire annuel d'auto-évaluation, déployé de la classe de CE2 à la terminale pour libérer la parole.
Sur le terrain, les équipes ressources se généralisent. 150 postes ont été créés en 2024 pour renforcer les référents académiques et départementaux. Un protocole de traitement des situations est désormais activé dans chaque établissement, avec une réponse systématique, pouvant aller jusqu'au changement d'école de l'élève auteur en cas de faits graves.
Le numérique sous surveillance
L'un des tournants du plan concerne le cyberharcèlement, qui touche particulièrement les collégiens. La "pause numérique", déjà expérimentée dans plusieurs établissements, sera généralisée à la rentrée 2025. Objectif : améliorer le climat scolaire en limitant l'usage des écrans. Les évaluations montrent déjà une réduction des conflits et une amélioration des relations entre élèves.
Autre nouveauté : l'attestation Pix, rendue obligatoire en 2024 pour les élèves de 6e, devient un outil de prévention à part entière. Elle évalue les bonnes pratiques numériques, en lien avec l'éducation aux médias et à l'information. Les parents seront également mieux informés des effets d'une exposition excessive aux écrans et des risques associés au harcèlement en ligne.
Un dispositif viendra les y aider : les ENT (environnements numériques de travail) et logiciels de vie scolaire seront désormais inaccessibles entre 20 heures et 7 heures en semaine, ainsi que les week-ends, afin de limiter les sollicitations numériques hors temps scolaire (lire notre article du 14 mai 2025).
Appel à tous les acteurs
La communication du 23 mai souligne l'implication des recteurs, Dasen, personnels éducatifs, mais aussi des autres services de l'État. La lutte contre le harcèlement est érigée en "priorité absolue" du ministère, avec un appel à l'engagement de "l'ensemble de la communauté éducative". L'objectif reste inchangé : faire de l'école "un environnement bienveillant et propice à l’apprentissage pour tous".
Si la dynamique est enclenchée, les chiffres de terrain continuent d'alerter. Plusieurs collectivités s'interrogent sur leur rôle : soutien aux actions locales, mise à disposition de psychologues ou médiateurs, ou encore animation de temps périscolaires protecteurs. Dans ce combat, l'échelon local a lui aussi un rôle à jouer (lire notre article du 30 mai 2024).