Jeunes majeurs de l’ASE : l’Igas en appelle à une mobilisation collective

L’amélioration de la situation des jeunes majeurs issus de l’aide sociale à l’enfance (ASE) passe par un partenariat renforcé entre les départements, l’État et les acteurs du logement, de l’insertion et du handicap, pour l’Inspection générale des affaires sociales qui vient de publier un rapport d’évaluation sur le sujet. Au-delà de la voie contractuelle avec les jeunes - dont les mineurs non-accompagnés - qui respectent le cadre proposé, la généralisation d’un accompagnement, même "souple", des jeunes "en rupture" est nécessaire, pour l’Igas. 

"Pour une mobilisation collective en faveur des jeunes sortant de l’Aide sociale à l’enfance." C’est le nom du rapport d’évaluation que l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) a consacré au parcours des jeunes majeurs de l’ASE, publié le 3 septembre 2025. Les jeunes issus de l’ASE connaissent en effet, bien plus souvent que d’autres jeunes, "des trajectoires de vie défavorables", rappelle l’Igas – espérance de vie réduite, "un sur deux n’est ni en emploi, ni en études, ni en formation" et, selon un recensement réalisé par la fondation Abbé Pierre en 2019, environ "un quart des jeunes vivant à la rue viennent de l’ASE". S’appuyant notamment sur des données recueillies dans quatre départements (Eure-et-Loir, Haute-Garonne, Puy-de-Dôme et Pyrénées-Orientales), l’Igas considère que l’accompagnement de ces jeunes vers l’autonomie est globalement "peu priorisé" par les départements, malgré des différences territoriales importantes, cela "dans un contexte de fortes tensions sur l’aide sociale à l’enfance". 

Le caractère inconditionnel de l’accompagnement en question 

Le nombre de jeunes majeurs accompagnés par les départements a pourtant augmenté de façon importante, passant de 18.500 en 2010 à 34.400 en 2022. Plus de neuf de ces jeunes sur dix sont accueillis, les autres bénéficiant d’une action éducative à domicile jeunes majeurs (AED JM), avec ou sans soutien financier. Dans les quatre départements contrôlés, les mineurs non-accompagnés (MNA), représentant environ un tiers des jeunes atteignant 18 ans à l’ASE, "sont quasi-systématiquement pris en charge (entre 79% et 100%) et davantage que les autres jeunes confiés (entre 44% et 82%), du fait de la spécificité de leur situation et de leur fréquente adhésion au cadre d’accompagnement proposé par l’ASE". Les jeunes en situation de handicap sont également sur-représentés parmi les majeurs accompagnés, observe l’Igas. 

D’autres jeunes seraient exclus des dispositifs départementaux du fait d’un non-respect de leurs obligations ("adhésion au suivi socio-éducatif, engagement dans un projet professionnel"…) Si la "logique de contractualisation" est "souvent défendue par les autorités comme par les professionnels", la mission rappelle que "la loi a créé un droit opposable à l’accompagnement pour les jeunes confiés, dont le juge administratif a confirmé́ le caractère inconditionnel". Et indique que certains départements ont mis en place des dispositifs spécifiques, parfois en lien avec des équipes de prévention spécialisée, pour les jeunes issus de l’ASE "en rupture" qui sont "de plus en plus fréquemment victimes de réseaux (addictions, prostitution, ...) Elle recommande donc de généraliser ce type d’accompagnement "souple" et permettant de "maintenir un lien entre ces jeunes et les institutions". 

"La marche d’accès vers le droit commun reste souvent trop haute"

Autres préconisations : la refonte du "pécule", pour que tous les jeunes issus de l’ASE soient éligibles à cette aide financière, et la généralisation, "avec le concours financier de l’État", d’une "offre de service de suites" jusqu’aux 25 ans du jeune qui en aurait besoin. 

Plus globalement, pour une pleine application des dispositions de la loi Taquet de 2022, les Inspecteurs proposent de "développer, avant et après 21 ans, des voies d’accès privilégiées" vers les dispositifs de droit commun – le logement social, l’accompagnement par les missions locales ou encore les prises en charge relevant des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Actuellement, "la marche d’accès vers le droit commun reste souvent trop haute pour les jeunes sortant de l’ASE", estime l’Inspection. Cela nécessite de "structurer le partenariat" avec ces différents acteurs, selon la mission Igas qui recommande de s’appuyer sur les comités départementaux pour la protection de l’enfance (CDPE) – encore en phase d’expérimentation dans dix départements. 

L’amélioration de la situation des jeunes majeurs passe également par une mobilisation plus forte de l’État aux côtés des départements, pour l’Igas qui préconise qu’une feuille de route nationale spécifique soit formalisée et que des indicateurs soient suivis de façon semestrielle. 

 

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