La France, l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Italie s'unissent pour bâtir les "communs numériques" européens

La Commission européenne a validé la création du consortium "Edic Digital Commons", porté par la France, l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Italie. Objectif : construire des infrastructures numériques européennes ouvertes et souveraines, selon un modèle de gouvernance partagée inédit. Le lancement officiel est prévu le 11 décembre à La Haye.

Alors que plus de 80% des technologies et infrastructures numériques utilisées en Europe proviennent de fournisseurs non européens, la Commission européenne a donné, le 29 octobre 2025, son feu vert à la création du consortium Edic Digital Commons (European Digital Infrastructure Consortium). Ce nouvel instrument communautaire vise à permettre aux États membres de "concevoir, déployer et gérer ensemble des infrastructures numériques transfrontalières, dotées d'une personnalité juridique propre", détaille un communiqué de la directrice interministérielle du numérique (Dinum) publié le 29 octobre. 

L'objectif affiché : reprendre la main sur les communs numériques stratégiques – cloud, intelligence artificielle, cybersécurité, géomatique – en mutualisant les ressources, les expertises et les investissements.
"L'Edic Digital Commons incarne une ambition commune : bâtir ensemble les fondations d'un paysage numérique européen fort, ouvert et durable", souligne Stéphanie Schaer directrice la Dinum.

Gouvernance partagée et de co-investissement

Le nouveau cadre de l'Edic introduit une gouvernance partagée entre les États participants, adossée à un mécanisme de financement durable pour soutenir la production et la maintenance de ces communs à l'échelle européenne. Il servira également d'interface entre acteurs publics et privés, afin de rapprocher les besoins des administrations et l'offre technologique des entreprises européennes.

Pour Thomas Jarzombek, secrétaire d'État parlementaire au ministère allemand de la Transformation numérique, cette initiative "envoie un signal fort pour l'avenir numérique de l'Europe". L'Allemagne y participe pour la première fois, aux côtés de son Agence pour les technologies souveraines et du Centre pour la souveraineté numérique (ZenDiS).

L'Italie, également très engagée, y voit le moyen de passer "de l'expérimentation à l'industrialisation" de solutions ouvertes et mutualisées. "L'Europe peut construire, maintenir et gouverner des infrastructures critiques selon ses propres règles, au service de l'intérêt général", affirme Serafino Sorrenti, représentant du Département de la transformation numérique italien.

Au service de la souveraineté et de la compétitivité

En misant sur des solutions ouvertes, interopérables et durables, l'Edic Digital Commons entend favoriser l'autonomie stratégique de l'Europe, mais aussi réduire les coûts pour les administrations et créer des opportunités de marché pour les PME européennes.
Et l'on a bien vu le 14 octobre 2025, lorsque Microsoft a mis fin au support de Windows 10 (voir notre article du 17 octobre 2025), que les administrations de l'État et les collectivités territoriales poursuivent bon gré mal gré des investissements dans des solutions propriétaires qui perpétuent leur dépendance étrangère. Une stratégie d'habitude qui pèse sur les budgets publics et fragilise la maîtrise des données. 
Cette transition vers les communs numériques européens s'annonce donc autant technique que politique et budgétaire. Art de Blaauw, CIO de l'administration centrale néerlandaise le confirme : il s'agit de "faire grandir les alternatives open source et donner aux gouvernements européens les moyens d'agir en toute autonomie".
Le consortium ambitionne de mobiliser l'ensemble de l'écosystème européen – communautés techniques, académiques, publiques et privées – afin de renforcer la production et l'adoption des communs numériques. Les administrations, entreprises et citoyens sont appelés à devenir acteurs de cette dynamique collective.

Une initiative appelée à s'élargir

Portée par quatre États fondateurs – la France, l'Allemagne, l'Italie et les Pays-Bas – l'initiative attire déjà de nouveaux partenaires. Le Luxembourg, la Slovénie et la Pologne ont rejoint l'Edic Digital Commons en tant qu'observateurs, et d'autres États membres devraient suivre.

Le lancement officiel est prévu le 11 décembre à La Haye, en présence des représentants des pays participants. Ce consortium pourrait préfigurer une nouvelle étape de la politique numérique européenne, où la coopération entre États remplace la dépendance aux géants extra-européens.

 

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