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Communication - Les collectivités bien décidées à défendre leur marque

Deux affaires très récentes mettent en lumière la volonté des collectivités territoriales - en l'occurrence des communes - de contrer les utilisations jugées abusives de leur nom. La première affaire concerne la célèbre commune de Deauville. Pionnière en matière de marketing territorial, la ville a entrepris de valoriser sa marque, dans une optique aussi offensive que défensive. Deauville gère ainsi plusieurs licences - "moyennant une juste rémunération, et ce au bénéfice de l'intérêt général et de la collectivité" -, tout en développant sa propre gamme de produits dérivés. En 1998, elle a notamment passé un accord avec la société Honda, accordant à cette dernière un droit d'usage de la marque Deauville pour commercialiser des motos (en l'occurrence un modèle de 700 cm3).
Mais la ville vient de décider - comme le contrat de 1998 lui en donne le droit - de dénoncer l'accord avec Honda. Dans un communiqué du 7 septembre 2012, elle ne cache nullement que cette dénonciation a pour objectif d'"engager des négociations avec le groupe pour reconduire le contrat à des conditions financières plus en rapport avec le chiffre d'affaires réalisé avec les motos portant la marque Deauville". Mais Honda a fort mal pris la chose et vient d'assigner la commune devant le tribunal de grande instance (TGI) de Paris aux fins de déchéance de la marque Française "Deauville" et d'annulation de la marque internationale "Deauville". Face à cette réaction qu'elle qualifie de "brutale", la ville de Deauville "prend toutes les mesures, y compris judiciaires, pour faire respecter ses droits de marque, protéger sa notoriété et obtenir, dans l'intérêt de la collectivité, la juste compensation de l'utilisation de sa marque faite par le groupe Honda". Le jugement ne devrait pas manquer d'intéresser d'autres communes.
La seconde affaire peut faire sourire par son sujet, mais elle est pourtant d'autant plus significative qu'elle vient de faire l'objet d'un jugement du TGI de Bordeaux en date du 28 août 2012. Saisi en référé par la commune de Condom (Gers) pour utilisation abusive de son nom et atteinte à l'image de la ville, le tribunal a en effet décidé l'interdiction de la vente de préservatifs estampillés "from Condom, France" et produits par une société française pour les marchés anglo-saxons toujours avides de "french touch". Il faut savoir que préservatif se dit "condom" en anglais et qu'une légende veut que le préservatif a été inventé à Condom (le terme vient en réalité du latin "condere", autrement dit protéger). On notera au passage que la ville de Condom n'est pas totalement étrangère à la légende, car elle abrite un musée... du préservatif.
Dans son jugement, le TGI de Bordeaux constate que le siège social de l'entreprise "est fictivement fixé à Condom". Il observe également que "l'usage du terme répété 'Condom' comme élément de la marque est de nature à tromper le public sur la provenance géographique du produit" (en réalité fabriqué en Asie), "ainsi que sur ses qualités de fabrication". Outre l'interdiction, le TGI a condamné la société à verser 7.000 euros de dommages et intérêts à la ville.