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Politique de la ville - Les ZFU "très chères pour un petit effet"

Dans un rapport publié en juillet 2011, des chercheurs du Centre de recherche en économie et statistique (Crest) tirent un bilan mitigé des zones franches urbaines avec un effet positif pour les nouveaux établissements compensé par les effets négatifs sur les zones avoisinantes.

Si les zones franches urbaines (ZFU) devraient être prolongées après 2011, comme semble le souhaiter le ministre de la Ville, le dispositif n'échappera pas à un toilettage. Dans la foulée du rapport d'Eric Raoult, député UMP de Seine-Saint-Denis, remis à Maurice Leroy en juillet dernier et plaidant pour la prolongation mais à certaines conditions, un nouveau rapport conclut à un bilan mitigé. Intitulé "Place-based tax exemptions and displacement effects : an évaluation of the ZFU program", ce document réalisé par Pauline Givord, Roland Rathelot et Patrick Sillard, chercheurs au Centre de recherche en économie et statistique (Crest), évalue le dispositif sur plusieurs années. D'un côté, il a clairement eu des effets positifs sur le nombre de créations d'entreprises dans ces zones. De l'autre, il a eu très peu d'impact sur les entreprises déjà installées dans ces zones avant le lancement du programme et a même des effets négatifs sur les zones avoisinantes. Le tout pour un coût qui reste élevé malgré une diminution au fil des années (333 millions d'euros en 2007, 198 millions en 2011). "C'est très cher pour un petit effet plutôt positif mais compensé par l'impact négatif dans les zones voisines", explique ainsi Roland Rathelot, l'un des auteurs du rapport.

"Maintenir la dynamisation à tout prix"

Se basant sur la deuxième vague des ZFU lancée en 2004 (les 100 ZFU actuelles ont été lancées à partir de 1997 en trois vagues successives), les chercheurs estiment ainsi qu'il y a un effet positif sur le nombre d'entreprises nouvelles dans ces zones, que ce soit à travers des créations ou des relocalisations. "Le programme semble être relativement efficace pour attirer de nouveaux business dans les zones bénéficiant des exonérations, détaille le rapport, le nombre de nouvelles entreprises dans ces zones a augmenté de 7 points en 2004, de 4 points en 2005 et 6 en 2006." Autre aspect positif : l'impact sur l'emploi. "Globalement, l'emploi a été développé grâce au dispositif, même si cet effet est surtout significatif pour les années 2005 et 2007", soulignent les chercheurs. Dans son rapport, Eric Raoult avait fait le même constat, avec un doublement du nombre d'embauches exonérées entre 2002 et 2007, passant de 7.923 à 18.452. Un élan qui a ensuite été stoppé par la crise. En revanche, le programme ne semble pas avoir d'effet significatif sur les établissements déjà installés en 2002 dans ces zones. Et bon nombre de ces entreprises n'ont même pas recours au dispositif, probablement du fait de sa complexité, explique Patrick Sillard, autre auteur du rapport, ou de son insécurité juridique, le dispositif étant souvent amené à évoluer. Plus grave encore, les ZFU ont eu des effets négatifs sur les zones avoisinantes. Fixant un rayon de 300 mètres, les chercheurs ont ainsi étudié les répercussions du programme sur les zones mitoyennes. "Nous observons un déclin significatif dans la croissance du nombre d'établissements localisés dans ce rayon au-delà des ZFU, avec un effet négatif sur l'afflux de nouvelles entreprises", détaille le rapport. "Dans les zones voisines, il y a plutôt moins d'activités", renchérit même Roland Rathelot. "Le dispositif a de bons côtés même si ce n'est pas la solution miracle et s'il a un coût, assure le chercheur. Tout dépend des objectifs que se fixe le gouvernement. C'est valable s'il veut maintenir la dynamisation à tout prix." Autre hypothèse : utiliser le dispositif d'une manière temporaire. "On peut imaginer de mettre en place le programme sur une zone pendant cinq ans et de passer à un autre territoire après, détaille Patrick Sillard. C'est une des questions qu'il faudrait se poser, il y a certainement de l'expérimentation à faire."