Nouvel acte de décentralisation, scène 3

Sébastien Lecornu vient d'adresser aux élus un nouveau courrier confirmant sa volonté de préparer un projet de loi relatif à la décentralisation. Principal objectif : la clarification des compétences. Y compris entre niveaux de collectivités. Les contributions des associations d'élus notamment sont attendues pour le 31 octobre. Les champs visés en priorité : santé, enironnement, urbanisme et logement, transports, culture, tourisme et sport.

Le 14 septembre, Sébastien Lecornu faisait part de sa volonté de lancer "un grand acte de décentralisation" (voir notre article). Le 17 septembre, il signait un courrier à l'attention de l'ensemble des maires dans lequel il confirmait entre autres qu'un texte "sera bientôt présenté devant le Parlement pour définir précisément la compétence de chacun et éviter la dilution des responsabilités" (voir notre article). Troisième séquence : deux jours plus tard, vendredi 19 septembre, nouveau courrier, cette fois destiné aux présidents de l'Assemblée et du Sénat, aux présidents des délégations aux collectivités des deux chambres, aux présidents de région et de département ainsi qu'aux présidents des associations d'élus locaux.

Le constat est classique. Il s'agit tout d'abord, écrit le Premier ministre, de "se poser la question de ce que l'on attend de l'État, au moment où nos concitoyens expriment des attentes de plus en plus fortes sur les compétences régaliennes (justice, sécurité, défense, diplomatie) de l'État, mais aussi sur la qualité et l'efficacité de nos services publics". Et donc aussi de clarifier les "rôles et compétences entre État et collectivités territoriales". Mais aussi entre niveaux de collectivités : "Le maintien de nombreuses interventions croisées des collectivités publiques a conduit à une perte de lisibilité et de compréhension par les citoyens de l'action publique, à une dilution des responsabilités et à des surcoûts collectifs. Trop d'acteurs interviennent sur les mêmes sujets, multipliant les dépenses, allongeant les délais de réponses, sans nécessairement améliorer le service public. Cette clarification devra permettre à nos concitoyens de comprendre qui est responsable et donc, ultimement, de savoir à qui demander des comptes."

Le "principe" affiché se veut simple : "soit c'est une compétence de l'État central et un ministre aura autorité ; soit c'est une compétence de l'État local et un préfet aura autorité ; soit c'est une compétence d'une collectivité territoriale et un élu local aura autorité". Le jardin à la française auquel beaucoup ne croient plus guère depuis longtemp ? ("La décentralisation ne peut s’apparenter à un jardin à la française dans lequel chaque collectivité serait enfermée dans un silo de compétences", reconnaissait par exemple Eric Woerth dans son fameux rapport de mai 2024).

Elément à relever : le chef du gouvernement fait sien "le principe constitutionnel de subsidiarité" souvent défendu par les élus locaux afin d'"identifier l'échelon le plus pertinent pour répondre aux besoins de nos concitoyens - politique publique par politique publique - et d'en tirer toutes les conséquences en matière de compétence et de financement".

Il compte aller vite. Du moins pour la phase de recueil des contributions des destinataires du courrier sur cette "nouvelle organisation des compétences, et des moyens affectés". Ces "contributions" ou "propositions" sont en effet attendues pour le 31 octobre. Aura-t-on eu entre-temps la nomination d'un nouveau gouvernement et donc d'un ministre en charge de ces sujets ? Pour l'heure en tout cas, le ministre démissionnaire François Rebsamen n'aurait pas été consulté par Sébastien Lecornu… et s'en est dit surpris. "Il aurait pu !", a-t-il déclaré dans une interview au Parisien, ajoutant : "J'ai beaucoup travaillé avec l'Assemblée et le Sénat. Je lui aurais fourni toutes les études nécessaires." Et François Rebsamen de mettre pour sa part l'accent sur la nécessité de donner aux collectivités "un vrai pouvoir réglementaire et normatif".

Le courrier du Premier ministre identifie d'ores et déjà certains champs prioritaires : la santé "et en particulier l'offre de soins de proximité", "les politiques environnementales", "l'urbanisme et le logement", "les transports et la mobilité". La liste inclut aussi les trois champs que la loi Notr de 2015 a préservé comme "compétences partagées" entre niveaux de collectivités, à savoir la culture, le tourisme, le sport.

Il assure aussi que les représentants des élus seront reçus avant la présentation du projet de loi. Et que Matignon compte s'appuier "également sur les conclusions des travaux parlementaires et de ceux émanant d'élus locaux, et de l'ensemble des contributions de la société civile, qui ont déjà été réalisés et qui nous permettront d'agir rapidement".

 

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