Pour sauver les RIP, les élus appellent à augmenter les tarifs au plus vite

L'Avicca, Départements de France, la FNCCR et Régions de France ont répondu d'une même voix à la consultation de l'Arcep sur les tarifs des réseaux de fibre optique. Sans une revalorisation "immédiate" de la grille tarifaire de 2015, base de négociation des réseaux d'initiative publique, c'est l'avenir même de la connectivité dans les zones peu denses qui est menacée, en métropole comme en outre-mer.

Le modèle économique des réseaux d'initiative publique (RIP), créés pour pallier l'absence d'investissements privés dans le fibrage des zones rurales, est aujourd'hui menacé. Encadré par le plan France THD, il repose – dans la phase exploitation des RIP - sur des tarifs de location assis sur une grille de l'Arcep. Or dix ans après la fixation de ces tarifs en 2015, l'écart entre les recettes et les coûts grandit, menaçant certains RIP de cessation de paiement à court ou moyen terme comme le démontrent l'Avicca, Départements de France, la FNCCR et Régions de France dans leur réponse commune à la consultation de l'Arcep.

Flambée des coûts

De fait, les coûts d'exploitation des RIP se sont révélés 2 à 4 fois supérieurs aux estimations initiales, selon une étude de la FNCCR et de la Banque des Territoires portant sur 25 RIP datant de 2024. L'Arcep elle-même reconnaît dans sa consultation que le coût moyen de maintenance et d'exploitation a explosé, passant de 0,80 euro en 2015 à une fourchette comprise entre 1,65 euro et 2,60 euros par mois et par accès actif. Une hausse de plus de 200% qui n'a jamais été répercutée sur les tarifs.

Sous-estimations des coûts en zone rurale

Cette explosion s'explique essentiellement par les spécificités des zones rurales alors que la grille, faute d'antériorité au dire des associations, s'est basée sur les déploiements en zone périurbaine. Ces RIP ruraux comptent des longueurs de lignes plus importantes, notamment en aérien, doivent faire face à une dispersion géographique des abonnés et à une accidentologie beaucoup plus élevée. 
Plus de 80% des réseaux FttH aériens sont situés en zone publique, exposés aux chutes de poteaux, aux inondations, aux vents violents et aux chutes d'arbres. 
S'ajoutent à cela des coûts de génie civil sous-estimés pour les raccordements complexes et les dégâts occasionnés par les opérateurs commerciaux (mode Stoc) lors des raccordements de leurs clients.

Pouvoir de négociation asymétrique

Le déséquilibre est aggravé par un rapport de force défavorable aux collectivités. Comme le soulignait déjà l'Arcep en 2015, il existe un "pouvoir de négociation asymétrique" entre les opérateurs commerciaux et les opérateurs d'infrastructures. En position dominante, "les premiers ont ainsi imposé aux collectivités de vendre leurs prises sur 40 ans au lieu de 20 pour le même prix, aggravant encore les déséquilibres financiers" notent les associations. Enfin, les hypothèses de pénétration de la fibre ont été surévaluées, la concurrence des technologies alternatives comme la 4G et la 5G fixes contribuant par ailleurs à freiner l'adoption du FttH en zone rurale.

Demande de tarifs différenciés

Face à une situation devenue critique, les quatre associations exigent une révision de la grille tarifaire de l'Arcep avant la fin de l'année 2025. Elles insistent sur la nécessité de tarifs tenant compte de la totalité des coûts (taxes, contrôles, maintenance du génie civil), basés sur les fichiers IPE des opérateurs et non la population Insee, différenciés par types de territoire (prédominance de l'aérien, résidence secondaire…). Elles demandent aussi l'inclusion du coût de la résilience des réseaux face au changement climatique et un rattrapage des déficits accumulés. Plus fondamentalement, elles estiment que ni l'État, ni les collectivités ne doivent financer l'exploitation des réseaux FttH.

Elles réitèrent ensuite leur demande de voir instaurée une péréquation nationale. Cette mesure, qui relève du législateur et non de l'Arcep, viserait à redistribuer les "droits de péages" assumés par les opérateurs commerciaux depuis les zones rentables vers les zones déficitaires, afin d'éviter de trop grands écarts de tarifs entre territoires. Les associations alertent enfin sur le coût de l'inaction. Certains RIP pourraient être contraints à la vente à un acteur privé qui, contrairement aux collectivités, serait libre de déconnecter les zones les moins rentables, d'augmenter les tarifs pour les seuls usagers ruraux ou de négliger la qualité du service.

 

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