Simplification : le gouvernement lance un train de mesures réglementaires "RH"
C'est une étape importante dans le chantier de simplification de la gestion des ressources humaines dans les collectivités : le gouvernement a déposé devant le conseil supérieur de la fonction publique territoriale sept projets de décrets contenant des mesures concrètes. Avancement de grade en catégorie B, comptes épargne-temps, recrutement des attachés principaux… Tour d'horizon des dispositions envisagées.

© @LMarcangeli/ Laurent Marcangeli le 11 juin dernier lors d’une réunion avec la Coordination des employeurs territoriaux
Dans la continuité du rapport remis en mai 2024 par Boris Ravignon sur le millefeuille administratif, le gouvernement Bayrou s'intéressait à la simplification de la gestion des ressources humaines dans la fonction publique territoriale. Alors que le locataire de Matignon et ses ministres pourraient être poussés vers la sortie dès ce 8 septembre, le fruit de leurs premiers travaux sera examiné lors d'une séance plénière du conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), le 17 septembre. Il s'agit de sept courts projets de décrets "ne nécessitant pas d’accroche législative". Localtis s'est procuré ces projets de textes et présente ci-dessous le contenu de chacun d'eux. Reste à savoir, compte tenu de l'instabilité politique, s'ils seront effectivement publiés.
Les communes de moins de 2.000 habitants pourraient employer des attachés principaux et des ingénieurs principaux, ce dont elles n'ont pas la possibilité actuellement. La mesure concernera en particulier les secrétaires généraux de mairie relevant du cadre d'emplois des attachés territoriaux. Ceux qui exercent leurs fonctions dans les communes ne dépassant pas 2.000 habitants pourront poursuivre leur carrière auprès de leur employeur dans l'éventualité où ils atteindront le grade d'attaché principal. À noter que la même mesure de simplification visera les conseillers territoriaux principaux des activités physiques et sportives.
Les conditions d'avancement de grade en catégorie B seraient simplifiées par la disparition de certaines contraintes, "à compter des tableaux d'avancement établis pour l'année 2026". Ces avancements de grade sont possibles par deux voies : l'examen professionnel ou "le choix" que la collectivité effectue en fonction de la valeur professionnelle de l'agent. En l'état actuel, le nombre de promotions susceptibles d'être prononcées au titre d'une voie ne peut être inférieur au quart du nombre total des promotions. Par dérogation, ce ratio ne s'applique pas lorsqu'un seul avancement de grade est prononcé, dans un grade et au titre d'une année, par l'une ou l'autre des deux voies. Ces règles aboutissent dans les faits à une limitation des avancements de grade des fonctionnaires de catégorie B. Il est donc envisagé de "redonner une marge de manœuvre à l'employeur territorial pour l'avancement de ses agents en catégorie B" par la suppression du ratio liant les avancements prononcés au titre des deux voies et son système dérogatoire.
Les employeurs territoriaux ayant ouvert la possibilité d'une indemnisation des jours épargnés par leurs agents dans le cadre d'un compte épargne-temps (CET) pourraient décider d'instaurer un plafond du nombre de jours indemnisables. Pour rappel, seuls les jours épargnés par les agents au-delà de 15 jours peuvent être indemnisés si une délibération le prévoit. Le montant de l'indemnité par jour épargné est forfaitaire et fixé par catégorie hiérarchique (135,70 euros en catégorie A, 90,47 euros en catégorie B et 75,09 euros en catégorie C). Le gouvernement veut autoriser les employeurs territoriaux à fixer, après consultation du comité social territorial, un plafond annuel de nombre de jours épargnés donnant lieu à une indemnisation. Ce plafond serait le même pour l’ensemble des agents de la collectivité ou de l’établissement détenant un CET. Aujourd'hui, un CET ne peut comporter plus de 60 jours, mais en application de dérogations, certains agents peuvent avoir accumulé jusqu'à 70, voire 80 jours (voir notre article de janvier 2024).
Les visites médicales d'information et de prévention, qui doivent avoir lieu au minimum tous les deux ans pour l'ensemble des agents territoriaux, seraient organisées au minimum tous les cinq ans pour les agents des catégories A et B de la filière administrative territoriale. Ce délai s'applique déjà à la fonction publique d'État.
Les secrétaires généraux de mairie relevant du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux (catégorie B) bénéficieraient de conditions un peu plus favorables au titre des possibilités de promotion "au choix" dans le cadre d'emplois des attachés territoriaux. À condition de compter un minimum de quatre ans de services dans des fonctions de secrétaire de mairie en catégorie B d'une commune de moins de 2.000 habitants, ils pourraient être inscrits sur la liste d'aptitude correspondante. Pour les autres fonctionnaires territoriaux de catégorie B, la durée minimale de services requis dans cette catégorie est de cinq années.
Les centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS) pourraient employer plus facilement les cadres de catégorie A dont le recrutement est soumis à des seuils de population (par exemple minimum de 10.000 habitants pour les attachés hors classe). Pour savoir comment les CCAS et les CIAS se situent au regard de ces seuils, sont aujourd'hui pris en compte leur budget de fonctionnement et le nombre ainsi que la qualification de leurs agents à encadrer. Ces règles "conduisent à ce qu'[ils] soient le plus souvent assimilés à des communes d’une population inférieure à celle de leur collectivité de rattachement", déplore le gouvernement. Les CCAS et CIAS se voient donc dans l'impossibilité de "recruter ou accueillir en détachement certains fonctionnaires de leur collectivité de rattachement". "Afin de faciliter les mobilités", il est dès lors proposé que les CCAS et CIAS soient tout simplement assimilés à leur collectivité ou établissement de rattachement (la population de la collectivité ou de l'intercommunalité leur serait appliquée).
Les conseils de discipline de la fonction publique territoriale pourraient se réunir en de nouveaux lieux considérés comme "plus proches des collectivités territoriales et des agents". Ainsi, les présidents de ces instances pourraient décider que les réunions se tiennent à la sous-préfecture, ou au siège d'une collectivité ou d'un établissement public. Les réunions dans les locaux des centres de gestion de la fonction publique territoriale et des tribunaux administratifs seraient toujours possibles.
Trois de ces mesures sont issues des propositions du rapport Ravignon (celles qui concernent le recrutement dans les CCAS et les CIAS, la modification de la périodicité des visites médicales d'information et de prévention et l'ajout de nouveaux lieux où peut se réunir le conseil de discipline).
Selon le maire de Charleville-Mézières, la mise en œuvre des règles de la fonction publique territoriale génère un coût de gestion par agent public d'environ 1.500 euros, "le triple du coût de gestion d’un salarié privé". "L’économie potentielle liée à une simplification alignée sur le code du travail avoisine 2 milliards d'euros", estimait-il lors du "Roquelaure de la simplification" qui s'est tenu fin avril.
Les autres mesures présentées au CSFPT "ont été identifiées dans le cadre du dialogue social avec les représentants des organisations syndicales ou des employeurs des collectivités territoriales", indique le gouvernement.