Un rapport parlementaire appelle à clarifier la stratégie de renouvellement de la flotte aérienne de la sécurité civile
Un rapport de la commission des finances de l'Assemblée nationale appelle à "mieux définir" la stratégie de renouvellement d'une flotte aérienne de la sécurité civile "vieillissante et inadaptée". Ses auteurs militent singulièrement pour le développement urgent d'une filière industrielle française et européenne d'avions bombardiers d'eau.

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"Agir vite et fort." Telle est l'une des recommandations émises par les députés Damien Maudet (LFI, Haute-Vienne) et Sophie Pantel (Socialiste, Lozère) dans un rapport d'information consacré à la flotte aérienne de la sécurité civile, considérant que celle-ci "fait aujourd'hui face à une crise majeure". Ils déplorent une flotte qui "n'est plus adaptée aux besoins, lesquels augmentent fortement", et dont le vieillissement "ne lui permet plus d'accomplir ses différentes missions". S'ils reconnaissent que des "actions salutaires" de renouvellement ont été engagées ces dernières années – singulièrement après les incendies de 2022 –, ils jugent néanmoins les "efforts réels insuffisants".
Les avions bombardiers d'eau, la priorité
Pour eux, "la situation la plus critique est celle des canadairs". Ils y voient "un sujet de préoccupation majeure insuffisamment anticipé" (à l'image de la Cour des comptes – lire notre article du 6 octobre 2022). Une situation qui, en outre, s'éternise du fait de "négociations difficiles" avec le constructeur canadien "dont la situation de monopole pourrait menacer notre souveraineté", sans parler des doutes exprimés sur la capacité de ce dernier à tenir les délais de livraison. Une situation dont les députés peinent en outre à discerner la porte de sortie en raison d'une "stratégie qui manque de clarté". Rappelant que le président de la République avait "annoncé des investissements massifs afin que les 12 [canadairs] soient remplacés par 16 nouveaux appareils d'ici 2027" (lire notre article du 28 octobre 2022), engagement par ailleurs "confirmé dans la Lopmi" (point 3.2.7 du rapport annexé), ils observent, d'une part, que le calendrier "a évolué" et, d'autre part, qu'il ne s'agit plus d'un renouvellement intégral. Ils ajoutent que "la crédibilité de cette stratégie a également été atteinte" par une annulation, par décret de février 2024, de "près de 53 millions d'euros pourtant destinés à l'acquisition de deux appareils supplémentaires" prévus. Les deux parlementaires demandent donc à l'exécutif de clarifier rapidement la situation, en se déclarant par ailleurs favorables à la mise en place d'un "contrat opérationnel et de renouvellement de la flotte" permettant une programmation pluriannuelle des investissements (laquelle est prévue, comme l'a indiqué François-Xavier Buffet naguère à l'Assemblée). Ils militent en outre pour le développement urgent d'une filière industrielle française et européenne d'avions bombardiers d'eau, en redirigeant une partie des crédits initialement prévus pour le renouvellement des canadairs. Ils plaident encore pour diversifier la flotte, via l'acquisition d'hélicoptères lourds bombardiers d'eau et d'Airbus A400M à kit de largage, et à la compléter par des drones, capteurs thermiques et autres radars embarqués pour renforcer l'observation et la surveillance du territoire.
L'Europe avec parcimonie, repositionner et mutualiser les hélicos, attirer le personnel
Leur plan d'action reste foncièrement franco-français. Si les auteurs détaillent le fonctionnement du mécanisme européen de protection civile, ils se gardent de toute proposition pour le renforcer, insistant au contraire pour "le maintien d'une capacité nationale autonome". "Le recours à la flotte RescEU doit compléter les moyens aériens nationaux et non se substituer à eux", insistent-ils.
Ils recommandent par ailleurs de "mener à bien l'analyse visant à répartir les moyens héliportés sur le territoire afin d'assurer une meilleure couverture des risques", alors que "l'actuelle répartition se caractérise par d'importants déséquilibres entre les territoires", avec tantôt des "chevauchements", tantôt des "zones blanches", comme dans le Nord et dans le sud du Massif central. Ils suggèrent en outre de réfléchir à la mutualisation de certains hélicoptères entre les services de la gendarmerie, du Samu et de la sécurité civile. Le débat sur la nécessité ou non créer une seconde base pour les avions – réclamée en 2022 par des élus aquitains (lire notre article du 21 juillet 2022), évoquée par la Lopmi, annoncée par Gérald Darmanin à Mont-de-Marsan, et désormais abandonnée (lire notre article du 6 juin et la réponse précitée de François-Noël Buffet) – n'est en revanche pas évoqué.
Enfin, mettant également en avant les conséquences du vieillissement des appareils sur les conditions de travail des personnels de la sécurité civile, déjà "particulièrement exigeantes", qui aggravent le manque d'attractivité d'une filière où les recrutements sont déjà malaisés "en raison de la technicité des profils recherchés", ils proposent d'aligner les rémunérations avec celles du secteur privé.
› Le 4e régiment d'instruction et d'intervention de la sécurité civile installéCe 3 juillet, les ministres de la Défense et de l'Intérieur étaient à Libourne pour la cérémonie d'installation du 4e régiment d'instruction et d'intervention de la sécurité civile. Annoncée par le président de la République le 28 octobre 2022, cette nouvelle unité, rattachée à l'armée de terre, est opérationnelle depuis la fin 2024. Sébastien Lecornu a précisé qu'elle devrait se traduire pour Libourne et son territoire par environ 600 emplois directs et 1.200 habitants supplémentaires d'ici 2029. Elle vient s'ajouter à celles de Nogent-le-Rotrou (Eure-et-Loire), composé de 567 personnes, de Corte (Haute-Corse, 138 personnes) et de Brignoles (Var, 568 personnes). |