Archives

Lutte contre l'exclusion - Accès aux soins : l'assurance maladie s'y met à son tour

La Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) a annoncé, le 28 mars, la généralisation progressive à l'ensemble du territoire d'un nouveau dispositif de lutte contre le renoncement aux soins. A vrai dire, ce dispositif n'est pas totalement nouveau, puisqu'il est expérimenté depuis novembre 2014 dans une vingtaine de départements, sous l'intitulé de Planir (plan d'accompagnement du non-recours, des incompréhensions et des ruptures). Planir s'inscrit dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale de 2013, repris dans l'axe 1 de la COG 2013-2017 de l'assurance maladie, qui vise à "garantir à tous les assurés un accès réel aux droits et aux soins", avec pour objectif de "favoriser l'accès aux droits et aux prestations, notamment pour les assurés les plus fragiles".

Une généralisation à la mi-2018

A ce jour, il ne s'agit pas encore d'une généralisation proprement dite, puisque Nicolas Revel, le directeur général de la Cnam, a annoncé, lors de sa conférence de presse, une première vague d'extension qui devrait toucher environ la moitié des départements, avant deux autres vagues qui devraient aboutir à la couverture de tout le territoire à la mi 2018. Cette initiative de l'assurance maladie s'inscrit dans le mouvement général de la protection sociale consistant à repérer les situations de fragilité et à aller au-devant des personnes ignorant leurs droits ou rencontrant des difficultés pour les faire valoir.
Inspiré d'une initiative de la CPAM du Gard, le dispositif Planir s'appuie sur une enquête menée par l'Observatoire des non-recours aux droits et aux services (Odenore) et montrant que plus d'un quart des assurés interrogés dans les accueils de l'assurance maladie - une population nettement plus restreinte que celle de l'ensemble des assurés - seraient concernés par des situations de renoncement aux soins.
L'étude a mis également en évidence trois "constats clés". Tout d'abord, si les raisons financières - citées trois fois sur quatre - constituent un frein majeur à l'accès aux soins, elles ne sont pas pour autant seules en cause. Intervient aussi ma "méconnaissance des circuits administratifs et médicaux", tout comme d'autres raisons (délais pour obtenir un rendez-vous, peur du médecin ou du diagnostic...).
Ensuite, il apparaît qu'une partie des assurés est en attente d'explications, voire d'orientation, dans un système de protection maladie et de soins perçu comme complexe. Enfin, les conséquences du renoncement aux soins sont multiples, en termes de santé, mais aussi sur les plans professionnel, social, voire familial.

Un repérage des situations et une réponse adaptée

Fort de ces constats, le dispositif Planir consiste d'abord à repérer les situations de difficulté de recours aux soins, notamment avec l'aide des partenaires. La démarche, adaptée à chaque situation, comprend alors trois composantes. La première consiste en "un bilan exhaustif des droits aux prestations, intégrant une explication approfondie de leurs usages", allant par exemple jusqu'à l'accompagnement dans la bonne utilisation du chèque de l'aide à la complémentaire santé (ACS). La seconde composante comprend une orientation de la personne accompagnée dans le système de soins, par exemple en l'aidant à trouver un gynécologue ou en lui expliquant où s'adresser pour effectuer un bilan de santé. Enfin, la troisième consiste en un accompagnement au montage financier, "construit, le cas échéant, par cofinancement de plusieurs partenaires pour faire face à des restes à charge auxquels la personne, en raison de son 'reste pour vivre', ne pourrait faire face".

Un premier bilan très positif

Un premier bilan, portant sur la phase expérimentale, a été réalisé en mars 2017 par l'Odenore. Il met déjà en évidence l'apport de la démarche. Sur un échantillon de 9.400 dossiers - dont 2.400 ouverts dans le Gard -, 30% ont abouti à la réalisation effective de soins, 42% font l'objet de démarches encore en cours et 28% ont été classés sans suite ou interrompus avant réalisation des soins.
Sur l'ensemble des dossiers 19% des assurés ont pu bénéficier d'un accompagnement pour réaliser un montage financier et 19% ont été accompagnés dans leur parcours de soins (avec une durée moyenne d'accompagnement de 71 jours). En matière d'accès aux droits, 26% des dossiers ont conduit à l'attribution de la CMU-C ou de l'ACS, 18% à l'accès à une complémentaire santé (ou à une complémentaire santé plus adaptée) et 9% à une mise à jour du dossier.
Le bilan précise que "pour beaucoup d'assurés, les bénéfices de l'accompagnement sont multiples : réalisation des soins, soulagement physique et/ou moral, stimulation pour avancer dans leur parcours de vie, perspectives professionnelles et/ou sociales renforcées...".