« BIMBY » : à Lanvallay, la densification pavillonnaire réduit l’étalement urbain (22)

La commune bretonne de Lanvallay s’est lancée dès 2015 dans une démarche dénommée BIMBY, incitant les habitants à diviser leurs terrains devenus trop grands pour créer de nouveaux logements. En six ans, 23 opérations ont vu le jour : création de lots constructibles, construction d’une maison adaptée au vieillissement ou destinée aux enfants, investissement locatif…

BIMBY, comme « Build in my backyard » pour « Construis dans mon jardin » : cette initiative venue d’outre-Manche commence à fleurir dans l’Hexagone. Certes, après plusieurs confinements, nombre de citadins rêvent d’un immense jardin ; mais un terrain trop grand, difficile à entretenir, devenu inutile une fois que les enfants ont grandi, n’est pas forcément du goût de tous. Dans les lotissements de Lanvallay, les terrains font souvent 1.000 m2 ou plus. Aussi, quand Bruno Ricard et Haude Lecointre, maire et adjointe à l’urbanisme, ont décidé, en 2015, d’expérimenter la démarche « BIMBY », ils n’ont pas reçu un mauvais accueil, tant s’en faut.

« Nous avons été accompagnés par le bureau d’études et d’architecture Villes vivantes, qui connaît bien le sujet BIMBY », expose l’édile, réélu en 2020. Trois sessions d’une durée de deux jours ont été organisées, entre 2015 et 2018, avec les habitants. Pendant une heure, le projet de division de terrain de l’habitant était étudié dans le détail par les experts de Villes vivantes, qui allaient jusqu’à fournir un croquis en 3D. « Soixante-trois entretiens ont eu lieu lors de la première session. Outre la possibilité de voir un projet matérialisé dans un schéma, ces rencontres permettaient de montrer comment une ville se construit et de parler d’urbanisme. C’était intéressant en phase de préparation du plan local d’urbanisme intercommunal », appuie le maire, qui est aussi vice-président de Dinan Agglomération, en charge de l’eau et de l’assainissement.

Petits logements en nombre insuffisant

En parallèle, Villes vivantes a enquêté sur les forces et faiblesses du parc immobilier. Résultat : la ville manque de locations et de petits logements (qu’il s’agisse d’achat ou de location).

En six ans, 23 opérations de divisions parcellaires ont été menées à bien. Certains propriétaires ont construit, sur leur terrain, une autre maison pour un investissement locatif – ce qui répond aux besoins du territoire. D’autres ont implanté une maison adaptée à leurs vieux jours, ou bien créé un lot constructible, destiné à leurs enfants.

« Des riverains déjà installés étaient parfois inquiets pour leur confort et l’ensoleillement, ajoute Bruno Ricard, mais ils ont été rassurés par l’approche architecturale fine des projets ».

Toute cette démarche sécurise la division parcellaire, qui est ainsi mieux admise et encadrée, tout en restant marginale.

Un lotissement de 23 maisons évité

« Trois à quatre logements sont construits chaque année par ce biais, sans extension urbaine : cela correspond à 10 % des logements que nous devons créer selon le programme local de l’habitat, qui en prévoit 40 par an à Lanvallay, résume le maire. Avec 23 opérations entre 2015 et 2021, on peut considérer que cela équivaut à l’économie d’un lotissement de 23 maisons. »

Quant à la diminution de la taille du jardin, elle n’a pas incommodé les propriétaires des parcelles : certains sont soulagés d’avoir moins d’entretien à réaliser. Et la cession d’une partie de leur terrain est pour eux une source de revenus.

Des bénéfices financiers pour la commune

Pour la commune, la division parcellaire rime avec la réduction de l’étalement urbain, favorable à l’écologie mais aussi aux finances locales : « plus un lotissement s’agrandit, plus l’entretien et la maintenance des réseaux, voirie, eau, assainissement, etc… sont coûteuses », souligne Bruno Ricard. Il en est de même avec les tournées de ramassage des ordures ménagères.

Quant aux nouvelles maisons construites dans le cadre de BIMBY, elles génèrent des droits de mutation à titre onéreux au bénéfice de la commune.

D’autres communes proposent la démarche BIMBY à leurs résidents : Baullon (35), Challans (85), La Chapelle-Launay (44). Les conseils du maire de Lanvallay ? « Être accompagné par des spécialistes, comme le bureau d’études Villes vivantes, qui fournit du conseil architectural précis et concret. Pour limiter l’extension urbaine, il faut faire feu de tout bois : BIMBY est un des leviers possibles. »

Côté budget, ce projet a coûté un peu moins de 50.000 euros en prestations extérieures (bureau d’études, formation, impression de guides…), avec une aide de la région Bretagne s’élevant à 28.500 euros. Dinan Agglomération a participé à hauteur de 6.960 euros, pour la réalisation d’un guide de la démarche BIMBY, accessible en ligne.

Pour conclure, la démarche BIMBY est un maillon parmi d'autres de la politique urbaine de la commune, qui compte également un partenariat avec l'Établissement public foncier de Bretagne (EPFB), une forte réduction des surfaces urbanisables dès avant le PLUi, et désormais, une maîtrise d'ouvrage publique à venir pour 40 logements

Quand « BIMBY » participe à l’élaboration des documents d’urbanisme

En 2011, le Parc naturel régional (PNR) de la Haute-Vallée de Chevreuse (78) a lancé une expérimentation autour de la démarche BIMBY (lien ci-dessous). Les communes situées dans son périmètre étaient incitées à organiser, comme à Lanvallay, des rencontres entre leurs habitants et les experts de Villes vivantes, dans une approche participative. Dans la ville des Essarts-le-Roi, fin 2011, 70 foyers avaient été reçus par les architectes : les deux tiers avaient un projet sur leur terrain – garage, extension de maison, second logement pour les enfants ou pour des personnes âgées… Les demandes et remarques des habitants recueillies lors des entretiens ont été prises en compte dans l’élaboration du PLU. « BIMBY, outil participatif et inédit, a donc permis au PNR d’accompagner les communes dans l’élaboration de leur document d’urbanisme », commente Jennifer Bureau, chargée de mission urbanisme au PNR. Aujourd’hui, s’il n’y a pas de bilan chiffré, « il s’avère que la démarche a permis des divisions de parcelles, notamment dans le hameau de Saint-Hubert aux Essarts-le-Roi, qui a pu s’ouvrir à l’urbanisation ; il était jusque-là verrouillé par des règles urbanistiques contraignantes, précise Jennifer Bureau. Ces divisions se sont parfois faites de manière non maîtrisée, c’est pourquoi il a fallu réajuster les documents d’urbanisme pour aller vers une densification plus équilibrée ». Le PNR a lancé en 2017 une nouvelle démarche plus orientée vers l’efficacité énergétique, dénommée BIMBY énergie.

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