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Environnement - Biodiversité : un bilan 2017 préoccupant

Evolution inquiétante des espèces, état mitigé des milieux naturels, poursuite de la destruction des habitats naturels, pollutions persistantes, progression des espèces exotiques envahissantes : le bilan 2017 de l’état de la biodiversité en France publié fin mai par l’Observatoire national de la biodiversité (ONB) est particulièrement sombre. Mais les actions s’intensifient pour inverser la tendance, pondère l’ONB.

Dans son bilan 2017 de l’état de la biodiversité en France  publié fin mai, l’Observatoire national de la biodiversité (ONB) juge inquiétante l’évolution de la biodiversité dans l’Hexagone. Concernant les espèces, un tiers (31%) de celles évaluées dans les listes rouges du Comité français de l'UICN et du Museum national d'Histoire naturelle sont menacées. Le bilan fait de plus apparaître une régression d’un quart (23%) des populations d’oiseaux communs les plus sensibles aux dégradations des écosystèmes entre 1989 et 2015. Les populations de chauves-souris ont, elles, connu une diminution de 46% entre 2006 et 2014. En 2016, 5% du territoire métropolitain est en outre concerné par la présence régulière d’un grand prédateur (loup, lynx, ours), relève l’ONB.
"Du côté des habitats et milieux naturels, la situation n’est guère plus encourageante", souligne-t-il. 52% des milieux humides et 43% des eaux de surface sont en bon état quand 22% seulement de l’ensemble des milieux naturels d’intérêt européen sont évalués en bon état de conservation. 64% des récifs coralliens sur les stations de suivi sont en état stable ou en amélioration. Autre chiffre alarmant : entre 1990 et 2012, 36.749 hectares de milieux naturels ont été perdus dans les secteurs de nature remarquables (ZNIEFF) métropolitains. Le bilan montre aussi que sur le territoire agricole, qui constitue la moitié du territoire métropolitain, les grands espaces en herbe régressent significativement (-7,9% entre 2000 et 2010 et -3,3% entre 2010 et 2013).

Pressions multiples

L’état des lieux publié par l’ONB analyse aussi les grandes causes responsables de l’érosion de la biodiversité. Ainsi, la destruction, la dégradation ou la banalisation des milieux naturels se poursuit. En métropole, entre 2006 et 2014, 67.000 hectares en moyenne ont été détruits chaque année du fait de l’artificialisation des sols. Sur ce total, les prairies, pelouses et pâturages naturels ont payé le plus lourd tribut avec plus de 50.000 hectares disparus. Les cours d’eau ont, eux, subi une fragmentation par les ouvrages correspondant à 15 obstacles à l’écoulement pour 100 km en 2017. En outre-mer, 314 hectares ont été artificialisés chaque année entre 2000 et 2012 : la forêt a été la plus touchée, avec 783 hectares de forêts de feuillus perdues par articialisation au cours de cette période.
Pour la première fois, l’ONB a évalué en 2016, sur un panel de 84 espèces problématiques, la progression des espèces exotiques envahissantes en métropole. Celle-ci s’effectue à un rythme d’au moins 6 espèces supplémentaires par département tous les dix ans sur les trente dernières années. L’enquête, qui a aussi été conduite auprès de l’ensemble des territoires d’outre-mer, rèvèle que 60 des 100 espèces considérées comme les plus envahissantes par l’UICN au niveau mondial sont déjà présentes dans les outre-mer français malgré la taille extrêmement réduite de ces territoires.
Les pollutions continuent aussi de peser sur la biodiversité, avec des évolutions contrastées, relève l’ONB. Si entre 1998 et 2014, la pollution des cours d’eau par les nutriments est en baisse, les nitrates font de la résistance. Entre 2008 et 2014, la pollution des cours d’eau par les pesticides a baissé de 10% en métropole et de 18% dans les départements d’outre-mer mais la consommation de produits phytosanitaires a continué à augmenter (+18% depuis la période de référence 2009-2011). Elle a seulement diminué pour les usages non agricoles, qui sont très minoritaires. En hausse de 6 personnes par km² depuis 2008, la pression démographique (résidents et touristes) sur le littoral métropolitain est estimée en 2013 à 630 habitants au km² - dont plus de la moitié liée au tourisme - contre 152 pour l’ensemble du territoire. Les manifestations du changement climatique se font également plus précises, de même que leur impact sur la biodiversité, constate l’ONB. Le gel, qui a une influence très importante sur les espèces, recule (-2,5 jours de gel annuel en métropole, en moyenne par décennie sur la période 1961-2010) tandis que les glaciers métropolitains, qui conditionnent pour une bonne part les écosystèmes montagnards, régressent de 18,8 mètres d’eau entre 2001 et 2013.

Initiatives sur le terrain

Face à ce tableau plutôt sombre, l’ONB pointe des initiatives pour la préservation qui s’intensifient, avec d’abord une prise de conscience et une mobilisation pour la biodiversité qui restent soutenues : "un quart des personnes sondées plaçaient en effet en 2017 l’enjeu de la préservation des espèces menacées parmi leurs deux principales préoccupations environnementales", note-t-il. La participation à la Fête de la nature a aussi augmenté de 59% sur la période 2009-2016. Autre exemple de cet intérêt accru du public : la fréquentation des centres d’accueil sur les zones humides a été multipliée par dix entre 1995 et 2013.
Les moyens financiers alloués à la préservation de la biodiversité augmentent également : en hausse constante depuis dix ans, l’effort financier national s’est élevé à 2,147 milliards d’euros en 2014. Quant aux mesures prises sur le terrain, elles s’intensifient également. La part du territoire national concerné par un schéma d’aménagement intégrant les enjeux de biodiversité est passée 0,7% en 2011 à 19% en 2016. Si les aires protégées terrestres couvrent moins de 1,5% du territoire en protection forte, les aires marines protégées, toutes catégories confondues, ont connu une progression spectaculaire ces dernières années. De moins de 1% en 1998, elles sont passées à 22,3% des eaux françaises en 2017 et disposent pour 95% d’entre elles d’un plan de gestion durable moins de trois ans après leur création.