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Canal Seine-Nord Europe : les élus des Hauts-de-France réclament une régionalisation du projet

Emmenés par Xavier Bertrand, président du conseil régional, une délégation d'élus des Hauts-de-France a été reçue ce 12 septembre par le ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, et la ministre chargée des transports, Elisabeth Borne, pour plaider la cause du canal Seine-Nord Europe. Pour que le projet soit sûr de voir le jour, les élus ont fait de nouvelles propositions financières impliquant davantage les collectivités. En échange, ces dernières réclament le pilotage de la société de projet.

"Le barrage sur le canal Seine-Nord Europe va peut-être se lever mais il reste encore beaucoup d’étapes à franchir", a déclaré à la presse Xavier Bertrand ce 12 septembre, à l’issue d’une réunion avec Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics, et Elisabeth Borne, ministre chargée des transports. Accompagné des présidents des conseils départementaux du Pas-de-Calais, du Nord et de la Somme, du vice-président de celui de l’Oise, et de Jean-François Legaret, conseiller régional d’Ile-de-France, qui représentait Valérie Pécresse, le président du conseil régional des Hauts-de-France a présenté plusieurs propositions pour que le projet puisse voir le jour dans le calendrier prévu, les premiers travaux devant se dérouler fin 2018-début 2019.

Un projet très attendu

Car pour les élus, la "procastination" de l’Etat n’a que trop duré et la "pause" dans les grands projets d’infrastructures annoncée par Emmanuel Macron le 1er juillet ne peut pas s’appliquer au canal Seine-Nord Europe, jugé vital pour les territoires qu’il va irriguer. "Nous avons conscience des difficultés financières que rencontre l’Etat mais des projets comme celui-là, d’intérêt européen, on n’en reverra pas de sitôt dans notre région", soutient Xavier Bertrand. Pour justifier sa réalisation, les élus mettent en avant les problèmes de saturation des axes routiers pour le transport de marchandises et les perspectives de développement économique à long terme. Jusqu’à 30.000 emplois sont attendus dans les années qui viennent. Outre ceux liés au chantier de construction de l’infrastructure, d’autres emplois pérennes devraient voir le jour à travers les quatre plates-formes logistiques qui l'accompagnent. Alors que la région et les départements travaillent déjà à des plans de formation dans cette perspective, les élus sont décidés à maintenir la pression car les attentes des milieux économiques et de la population sont très fortes, font-ils valoir. Dans l’immédiat, ils ont aussi à lever les incertitudes actuelles pour que la société de projet puisse poursuivre son programme d’acquisitions foncières.

Prise en charge provisoire du versement de la participation de l'Etat

Ils ont donc fait trois propositions aux ministres. La première consiste à ce que les collectivités prennent elles-mêmes en charge, les deux premières années, le versement de la participation de l’Etat, soit "quelques dizaines de millions d’euros", évalue Xavier Bertrand. Les collectivités proposent aussi de garantir à elles seules l’emprunt de 776 millions d’euros prévu dans le montage financier du projet (lire-ci-dessous notre article du 30 novembre 2016). "Nous posons également une exigence : nous ne voulons pas nous faire imposer n’importe quelle recette, prévient Xavier Bertrand. Nous disons tout de suite ‘niet’ à une écotaxe régionale car il n’est pas question de tuer l’industrie des transports et de la logistique dans la région alors que nous comptons au contraire la développer". Enfin, les élus proposent de "régionaliser" le projet, en faisant en sorte que les collectivités, et non plus l’Etat, aient une place majoritaire au sein de la société de projet.

La balle dans le camp de l'exécutif

Pour être adoptées, ces propositions devraient passer par des adaptations législatives et réglementaires. Pour "ne plus perdre de temps", les élus ont demandé la réunion "dès la semaine prochaine" d’un groupe de travail qui pourrait rendre ses conclusions mi-octobre. Mais il leur faut aussi obtenir le soutien du Premier ministre, Edouard Philippe, et d’Emmanuel Macron. Lors de la campagne présidentielle, celui-ci s’était prononcé en faveur du projet. "Le comble de l’ironie est qu’aujourd’hui, ce sont les collectivités qui peuvent lui permettre de tenir ses engagements", a relevé Laurent Somon, président du conseil départemental de la Somme.
Dans un communiqué, Elisabeth Borne et Gérald Darmanin se sont félicités de la réunion de travail avec l’ensemble des collectivités concernées "et de l’esprit constructif dans lequel elle s’est déroulée". Concernant le montage financier, ils ont "salué (…) les premières propositions formulées par les collectivités afin de parvenir à une solution, notamment sur la garantie des emprunts de la société de projet". "Les participants ont convenu de poursuivre les échanges dans les tout prochains jours, en particulier concernant les financements complémentaires nécessaires pour faire aboutir ce projet", conclut le communiqué.