Cinéma : le CNC propose un nouveau modèle de cofinancement aux régions volontaires
Dans le cadre du renouvellement à venir des conventions État-régions pour le cinéma, le président du Centre national du cinéma et de l'image animée propose un partenariat renforcé aux régions qui s'engagent à maintenir leur niveau de financement actuel.

© Capture du Congrès de la FNCF le 24 septembre/ Gaëtan Bruel
C'est un partenariat nouveau destiné aux "bonnes élèves" que propose le président du CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée) dans le cadre des prochaines conventions État-régions. Dans un courrier adressé le 22 septembre aux présidents des exécutifs régionaux, Gaëtan Bruel met en avant le "besoin d'intégrer davantage la question de la diffusion à notre modèle, pour être plus attentif aux spectateurs et, à travers eux, aux territoires où ils se trouvent". Il estime que "les prochaines conventions de partenariat entre l'État (CNC et Drac) et les régions dans le domaine de l'image animée ont vocation à être l'instrument privilégié pour répondre à cet enjeu".
Les propositions qu'il soumet aux régions sont pour le moins inattendues. Car après avoir assuré que l'"État exemplaire" assumera "son rôle de premier soutien du cinéma", que "les crédits d'État dévolus à l'éducation à l'image seront sécurisés", et qu'"un cadre conventionnel reconduit, dans ses objectifs, ses dispositifs et ses financements" sera à même "d'assoir la stabilité du secteur pour les années à venir", le président du CNC annonce qu'il veut associer plus systématiquement les collectivités infrarégionales, et en particulier des départements, aux conventions mais aussi offrir "une clé de cofinancement inédite" aux régions volontaires.
Gros coup de pouce pour l'éducation aux images
Cette "clé de cofinancement inédite" sera ouverte aux régions "qui souhaiteraient faire du cinéma et de l'image animée une priorité particulière" et s'engageraient "à maintenir en 2026 des enveloppes pour soutenir la diffusion (hors investissement) similaires à celles de 2025", alors que les budgets des régions consacrés à la culture étaient en baisse dans 58% des régions cette année, selon l'Observatoire des politiques culturelles. "Pour récompenser, valoriser et encourager ce choix", les régions s'inscrivant dans ce partenariat renforcé bénéficieront d'avantages. Elles seront tout d'abord associées aux réflexions et décisions nationales sur l'ensemble des enjeux de la politique du cinéma. De plus, elles bénéficieront systématiquement de l'installation des prochaines coordinations nationales de dispositifs qui seraient créées et financées par le CNC.
Mais l'avantage le plus important à attendre de ce nouveau partenariat est bien entendu d'ordre financier. Après avoir rappelé que "l'éducation aux images est la mère des batailles", le président du CNC annonce le cofinancement des actions nouvelles "pratique des images" – qui visent à "travailler le rapport des jeunes aux écrans" – sur la base de "deux pour un" (soit deux euros investis par le CNC pour chaque euro investi par la région), voire "trois pour un" pour les régions qui reviendraient à leur base budgétaire de 2024. Les régions ne s'inscrivant pas dans ce partenariat renforcé auraient toujours accès à un cofinancement pour ces actions sur la base de un pour deux.
Conventionner avec les départements avec ou sans la région
Et alors qu'une minorité de départements participe actuellement aux conventions État-régions, le CNC entend les y associer plus systématiquement. Les régions en partenariat renforcé pourraient proposer à leurs départements de bénéficier des mêmes termes. Sous condition, bien évidemment. Les départements qui maintiendraient leurs subventions pour la diffusion, en particulier via le dispositif "Collège au cinéma", pourraient accéder à un cofinancement de deux pour un ou trois pour un. Dans l'esprit de Gaëtan Bruel, ce principe vise à "conforter le rôle de chef de file des régions" – lesquelles ont à ses yeux "vocation à être des acteurs nationaux des filières et des enjeux de l'image animée" – mais aussi à valoriser et récompenser l'engagement des départements, "crucial pour l'éducation aux images". En outre, si une région ne s'inscrivait pas dans un partenariat renforcé, le CNC et la Drac proposeraient aux départements de cette région intéressés un conventionnement direct.
Cette proposition intervient alors que les régions avaient, lors du dernier Festival de Cannes, attiré l'attention sur "les fondations" d'un modèle de financement du cinéma qui "se fragilisent" (lire notre article du 26 mai). Elles avaient plaidé pour la mise en place d'un mécanisme d'indexation automatique des dotations du CNC sur les efforts réels des régions couplée à une revalorisation de l'enveloppe globale des conventions triennales. De plus, afin de compenser le désengagement de certaines collectivités et de surmonter le plafonnement territorial des contributions du CNC, elles demandaient le redéploiement de la part du CNC désengagée vers d'autres collectivités.
Une simple question de volonté ?
Interrogé par le site du Film français sur la question de savoir si sa proposition pourrait entraîner "une France des régions à deux vitesses en matière de cinéma", Gaëtan Bruel a estimé que "même avec des moyens contraints, on peut faire de grandes choses. Encore faut-il le vouloir".
Le président du CNC précise enfin dans son courrier aux régions que, compte tenu du calendrier électoral, les conventions triennales normalement prévues pour la période 2026-2028 pourraient être étendues jusqu'en 2029.
› La Corse en tête des régions les plus dotées en fauteuils par habitantAlors que s'est tenu, du 22 au 24 septembre à Deauville, le 80e Congrès de la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) - au cours duquel Gaëtan Bruel est justement intervenu -, le CNC vient de publier sa traditionnelle Géographie du cinéma, qui analyse, pour l'année 2024, l'évolution du parc de salles et donne les résultats de fréquentation au plan national, régional, départemental, ainsi que par agglomération et commune. Parallèlement, il sort les Chiffres clés du cinéma par région 2024. Ce dernier opus dresse notamment un portrait région par région, mais aussi pour chaque chef lieu de région, du nombre de fauteuils de cinéma disponibles par habitant. Il en ressort un très fort contraste entre les territoires. Alors que la moyenne nationale est de un fauteuil pour 59 habitants, la Corse (un fauteuil pour 49 habitants), la Nouvelle-Aquitaine (52) et l'Île-de-France (55) apparaissent comme les régions les mieux équipées. Les Hauts-de-France (un fauteuil pour 71 habitants), le Centre-Val-de-Loire (65) et l'Occitanie (63) ferment la marche. Du côté des grandes villes, l'offre est généralement plus importante que la moyenne régionale. Rouen arrive en tête avec un fauteuil pour 18 habitants – contre un fauteuil pour 58 habitants dans la région Normandie – devant Tours (19) et Lille (21). Trois villes, néanmoins, se distinguent en proposant moins de fauteuils de cinéma que leur moyenne régionale : Rennes (un fauteuil pour 64 habitants), Marseille (77) et Nantes (92). Une situation qui s'explique par l'implantation de complexes richement dotés en fauteuils dans des communes de la périphérie. Dans le cas nantais, quatre des cinq plus grands complexes de l'agglomération se situent en périphérie, dont deux à Saint-Herblain totalisant plus de 5.000 fauteuils. |