Congrès HLM : comment oeuvrer en faveur du droit à la ville ?
Comment mieux intégrer les habitants fragiles à la ville et à ses opportunités ? Comment rénover les quartiers populaires sans en évincer les habitants ? Les acteurs du mouvement HLM ont proposé, ce jeudi 25 septembre en séance plénière, des solutions pour conserver le droit à la ville pour le plus grand nombre.

© Arnaud Paillard/Jean-Yves Mano, Laure Vuittenez et Patrice Vergriete
La centralité urbaine offre des opportunités à ses habitants. Mais comment garantir un accès égal à ces aménités, à ces biens communs à tous les habitants, ce qu’Henri Lefebvre appelait en 1968 le droit à la ville, quand le coût du logement prend une part de plus en plus importante dans le budget des ménages ? "Ce qui se développe aujourd’hui, c’est le droit à la ville pour quelques-uns seulement. Le droit à la ville pour tous, c’est le droit à un logement qui ne devienne pas un piège mortel en cas de canicule, une régulation forte pour éviter les logements vides en cœur de ville, et des recettes dédiées pour le Fonds national des aides à la pierre (Fnap) et pour l’Anah", s’inquiète Jacques Baudrier, adjoint (PC) à la maire de Paris chargé du Logement et de la transition écologique du bâti, lors d’une table ronde plénière au 85e congrès de l’USH, ce jeudi 25 septembre, à Paris. Pour lui, le risque d’une ville comme Paris est de n’accueillir dans un futur proche que logements sociaux et résidences secondaires, sans laisser de place aux classes moyennes.
Offrir les mêmes accès à la centralité au plus grand nombre passe également par la diversification des offres de logements, en particulier pour les plus fragiles : "Le programme Logement d’abord a permis un changement de regard sur les personnes fragiles. Avant, l’accès au logement intervenait après un parcours très long et parfois difficile. Le Logement d’abord, ça consiste à dire qu’il faut avant tout un chez soi, que c’est un point de départ de l’intégration pour les personnes fragiles", explique Nathalie Latour, directrice de la fédération des acteurs de la solidarité.
Pour que les personnes les plus fragiles puissent accéder à un logement, les pensions de famille jouent également un rôle prépondérant, en ce qu’elles fluidifient les parcours résidentiels de l’hébergement vers un logement pérenne. "Les pensions de famille permettent d’intégrer à la ville des habitants qui y sont parfois invisibles. J’ai le sentiment que ces pensions de famille sont désormais inscrites dans le paysage et qu’elles apportent une solution incontournable dans l’accès au logement des plus fragiles", témoigne Olivier Rigault, président de l’Union professionnelle du logement accompagné (Unafo) et directeur d’Amli, une association pour l’accompagnement, le mieux-être et le logement des isolés.
L'avenir de l'Anru toujours en suspens
Assurer le droit à la ville, c’est aussi raccrocher les quartiers populaires à leur ville-centre, recoudre des liens urbains qui ont pu se distendre avec le temps. C’est précisément ce que fait l’Agence nationale de rénovation urbaine depuis vingt ans. Son président, Patrice Vergriete, maire de Dunkerque et éphémère ministre du Logement entre juillet 2023 et février 2024, le rappelle : "L’Anru, ça marche. Je ne vois aucun maire dire qu’il veut la disparition de l’Anru, c’est un levier important pour la transformation des quartiers populaires. Et il y a encore du boulot dans ces quartiers". Quant à la suite à donner à l'Anru, Patrice Vergriete reste évasif : "Faut-il un Anru 3, 4 ou 5 ? Un Anru permanent ? Faut-il élargir son champ d’intervention ?" Autant de questions pour l’instant sans réponse. L’Anru pourrait intervenir, par exemple, sur les quartier anciens dégradés, à l’image de ce qu’elle faisait en 2007 avec le PNRQAD. Ou encore sur les entrées de ville. "La priorité, cela reste les quartiers prioritaires de la ville", juge toutefois Patrice Vergriete.
Pour qu’elle continue à garantir le droit à la ville au plus grand nombre, l’Anru devrait en tout cas mieux articuler l’urbain et le social, selon son président. "L’Anru a coupé en deux la rénovation urbaine : d’un côté le contrat de ville, de l’autre le projet urbain. Mais cela ne sert à rien de rénover une école s’il n’y a pas de professeur à l’intérieur", tonne le maire de Dunkerque.
Reste également à pérenniser les ressources de l’Anru à l’heure où le nouveau Premier ministre cherche plutôt des économies en supprimant des agences et des délégations interministérielles. "La problématique, ce n’est pas la réorganisation des agences, c’est un faux débat pour tromper les gens. L’Anru fait le job, pourquoi modifier ou supprimer ce qui fonctionne ?", s’étrangle Patrice Vergriete. Ce dernier plaide plutôt pour une pérennisation des recettes dédiées à la rénovation urbaine. "Les premières annonces de Valérie Létard en juin dernier ont levé le doute sur la poursuite de la rénovation urbaine, mais on attendait encore plus en termes d’engagements. On espère que le message sera bien passé pour le prochain projet de loi de finances", souhaite, de son côté, Marie-Laure Vuittenez, directrice générale d’Habitat et Métropole, présidente de la commission "quartiers, tranquillité, sécurité, emploi" de l’USH.